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Levée de l’immunité d’exécution des Etats et de leurs émanations : abandon du critère prétorien du lien entre les biens objet de la mesure d’exécution et la demande en justice

Créé le

06.04.2022

5. Selon le droit international coutumier, tel que reflété par l’article 19 de la Convention des Nations Unies du 2 décembre 2004 sur l’immunité juridictionnelle des Etats et de leurs biens, à défaut de renonciation à l’immunité d’exécution, ou d’affectation des biens saisis à la satisfaction de la demande, les biens d’un Etat étranger ou de ses émanations ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’exécution forcée, en vertu d’un jugement ou d’une sentence arbitrale, que s’il est établi que ces biens, situés sur le territoire de l’Etat du for, sont spécifiquement utilisés ou destinés à être utilisés autrement qu’à des fins de service public non commerciales et ont un lien avec l’entité contre laquelle la procédure a été intentée.

 

6. La cour d’appel a énoncé à bon droit qu’il résulte du droit international coutumier, tel que reflété par la Convention précitée, qu’il n’est pas nécessaire, pour qu’ils soient saisissables, que les biens de l’émanation d’un Etat aient un lien avec la demande en justice, mais que ceux-ci doivent avoir un lien avec l’entité contre laquelle la procédure est intentée.

9. Selon le droit international coutumier, tel que reflété par la Convention des Nations Unies précitée, à défaut de renonciation à l’immunité d’exécution, ou d’affectation des biens saisis à la satisfaction de la demande qui fait l’objet de cette procédure, les biens d’un Etat étranger ou de ses émanations ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’exécution forcée, en vertu d’un jugement ou d’une sentence arbitrale, que s’il est établi que ces biens sont spécifiquement utilisés ou destinés à être utilisés autrement qu’à des fins de service public non commerciales.

10. Après avoir rappelé que l’insaisissabilité était de principe à l’égard des biens d’un État ou de ses émanations et qu’il incombait donc au créancier poursuivant de rapporter la preuve contraire, la cour d’appel a retenu que les fonds saisis avaient été déposés par la société Rasheed Bank sur un compte ouvert au titre de la constitution d’un gage-espèces, qu’il résultait d’une expertise financière que ce compte avait été constitué au milieu des années 1990, à une époque où il était constant que la société Rasheed Bank se présentait comme une banque indépendante de l’Etat irakien, réalisant des opérations commerciales courantes, ce qui constituait d’ailleurs toujours une partie de son activité, enfin que les mesures de gel des avoirs irakiens résultant des sanctions prononcés par l’ONU après le 6 août 1990 excluaient que les fonds déposés à titre de gage-espèces aient pu changer d’usage et que des mouvements aient pu ultérieurement affecter le compte litigieux.

11. De ces constatations et appréciations, la cour d’appel a pu déduire, sans inverser la charge de la preuve, que l’actif saisi, instrument de garantie bancaire constitué à l’occasion d’opérations commerciales, était, par nature, destiné à être utilisé autrement qu’à des fins de service public non commerciales.

Civ. 1re, 3 nov. 2021, n° 19-25.404, Rasheed Bank c/ Citibank : Dalloz actualité,30 nov. 2021, obs. F. Mélin ; Gaz. Pal. 15 mars 2022, obs. J.-J. Ansault.

Déjà repéré par les spécialistes de droit international privé et des voies d’exécution, l’arrêt rendu par la première chambre civile le 3 novembre dernier relatif aux conditions des immunités d’exécution dont bénéficient les émanations des Etats étrangers mérite un rapide examen dans ces colonnes. Il signe en effet une réduction du champ du bénéfice des immunités d’exécution tel qu’il avait été délimité ...

À retrouver dans la revue
Banque et Droit Nº202