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La CJUE interprète l’arsenal européen anti-sanctions extraterritoriales

Créé le

21.02.2022

Confrontée à l’exposition croissante des entreprises européennes aux conséquences néfastes des sanctions unilatérales à visée extraterritoriale américaines, l’Union européenne s’est dotée en 1996 d’un Règlement communément appelé « loi de blocage » – visant à neutraliser les effets de ces sanctions. L’annonce par l’ancien président Trump le 8 mai 2018 du rétablissement des sanctions secondaires contre l’Iran a conduit la Commission européenne à actualiser la loi de blocage par l’adoption du Règlement délégué du 6 juin 2018, réaffirmant ainsi l’attachement de l’Union à ce dispositif comme instrument essentiel de lutte contre l’extraterritorialité des sanctions unilatérales étrangères.

De nombreuses incertitudes persistent néanmoins sur la mise en œuvre pratique de la loi de blocage ; la rareté de la jurisprudence sur cette question n’ayant pas permis de les lever. C’est dans ce contexte que s’inscrit cet arrêt très attendu de la Cour de Justice de l’Union européenne, qui a permis aux juges européens d’interpréter certaines dispositions de la loi de blocage. Rendu sur renvoi préjudiciel par une juridiction allemande, l’arrêt portait sur des questions soulevées par un litige survenu à la suite de la notification par une société allemande de la résiliation des contrats qu’elle avait conclus avec la succursale allemande d’une banque iranienne visée par les sanctions américaines. La succursale faisait valoir que cette résiliation, qui avait eu lieu peu après l’entrée en vigueur des nouvelles sanctions américaines, n’était motivée que par la volonté de l’opérateur allemand de se conformer à ces dernières, violant ainsi l’interdiction de se mettre en conformité avec des sanctions extraterritoriales. Si la Cour de Justice a saisi cette occasion pour se prononcer sur plusieurs difficultés posées par la loi de blocage, elle ne parvient pas à compenser les limites structurelles du dispositif instauré ni à lever l’ensemble des incertitudes qu’il soulève.

1. Les sanctions économiques sont un outil privilégié de la politique étrangère. Par leur aspect juridique et économique, les sanctions apparaissent comme l’un des instruments les plus efficaces pour faire pression sur la politique d’un État sans recourir à la force. Si certaines sanctions peuvent être adoptées par des institutions multilatérales telles que le Conseil de Sécurité des Nations Unies, on assiste au développement de mesures restrictives, ou de contre-mesures, unilatérales ...

À retrouver dans la revue
Banque et Droit Nº201