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L’Espagne soutient
une plus grande intégration

Créé le

17.02.2023

-

Mis à jour le

21.02.2023

Le secteur bancaire espagnol a largement bénéficié de l’Union bancaire depuis sa création. Il est ainsi favorable à son achèvement, mais reste réservé sur le système de garantie des dépôts.

« L’Espagne est sans doute l’un des pays à avoir le plus bénéficié en Europe de l’Union bancaire ! s’exclame Ángel Berges, vice-président de l’AFI (Analistas Financieros Internacionales). La mise en œuvre de cette union a permis aux banques espagnoles de regagner leur crédibilité et d’améliorer leurs niveaux de capitalisation. » Des conséquences de la crise financière mondiale à la celle des dettes souveraines en 2011-2012, le pays n’a pas été épargné. Très exposé à la bulle immobilière, le secteur bancaire a subi une restructuration, durant la dernière décennie, avec la quasi-disparation des caisses d’épargne provinciales et une concentration autour de quatre grandes banques : Santander, BBVA, CaixaBank et Sabadell.

Le pourcentage des créances douteuses en proportion des prêts de banques flirtait en 2013 avec les 13 %. Signe de l’assainissement de la banque espagnole, le taux de non performing loans (NPL) avoisine désormais les 3 %. « Du point de vue de la notation, une supervision de grande qualité associée à un cadre pour la résolution ordonnée des banques contribue positivement à la stabilité financière », ajoute Marco Troiano, responsable des institutions financières au sein de Scope Ratings.

Le cas de Banco Popular

Aussi positif soit-il, le bilan reste néanmoins entaché de quelques manquements. Plombée par les actifs toxiques immobiliers, Banco Popular avait pourtant passé une série de stress-tests sans que les superviseurs ne tirent la sonnette d’alarme. « Cet épisode a clairement mis en doute l’efficacité des procédures de stress-tests, estime le vice-président de l’AFI. En revanche, Banco Popular a également bénéficié d’une résolution complète à l’initiative de l’Union européenne. » La banque avait été jugée en état de faillite ou de faillite probable par la Banque Centrale Européenne (BCE), en accord avec le Mécanisme de résolution unique (MRU). Une première à l’époque pour la BCE, en charge de ce mécanisme, dont l’objectif était de faire face aux défaillances et de protéger les épargnants.

En juin 2017, Banco Popular avait été vendue pour un euro symbolique au numéro un bancaire espagnol, Santander. « Certaines questions d’ordre structurel doivent encore être réglées, estime de son côté Cristina Torrella, Senior Director au sein du département institutions financières chez Fitch. Nous constatons qu’il existe encore des liens étroits entre les risques souverains et bancaires. À l’image d’autres pays européens, les banques espagnoles détiennent encore une proportion importante de dette souveraine domestique dans leurs portefeuilles et n’ont pas encore suffisamment diversifié leur exposition aux risques. »

La grande majorité des opérations de fusions-acquisitions à l’initiative des banques espagnoles au cours de ces dix dernières années ont été réalisées sur le sol domestique, comme en témoigne par exemple le rachat récent de Bankia par CaixaBank, à l’automne 2020 : « Les synergies sont perçues comme étant plus importantes au sein d’un même marché, en raison des barrières importantes à l’entrée d’autres marchés européens », poursuit l’analyste de Fitch.

Risques souverains et bancaires

« Bien que cela soit politiquement compliqué, l’ajout d’un système européen de garantie de dépôts pourrait aider à rompre ce lien entre risques souverains et bancaires », renchérit Pablo Manzano, VP institutions financières chez DBRS Morningstar. En 2021, la mise en œuvre d’un droit de préférence aux déposants, à l’image de ce qui se fait déjà en Italie, au Portugal ou en Grèce, avait fait l’objet de discussions en Espagne. « Or ce système n’offre qu’une couche supplémentaire de protection aux épargnants et ne casse pas le lien avec le risque souverain domestique », estime Cristina Torrella.

Du côté espagnol, on s’accorde à penser que la mise en œuvre du troisième pilier de l’Union bancaire reste un projet distant : « Les banques disposent de grandes quantités de capitaux propres, de capitaux subordonnés et de dettes prioritaires pouvant être renflouées, explique Marco Troiano. Le risque pour les dépôts est très faible, ce qui explique que ce système de dépôts ne soit pas toujours considéré comme nécessaire. Cependant, nous pensons que l’achèvement de l’Union bancaire est important pour sa valeur de signal. Faire l’impasse sur ce dispositif serait le signe d’un manque de volonté politique de progresser vers une plus grande intégration financière en Europe. »

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº878
RB