La fin de l’année 2018 a été marquée par une avancée importante en matière de réduction des risques. Le 4 décembre, le Conseil européen a publié un document montrant que le trilogue est en très bonne voie pour aboutir à un accord complet sur le paquet bancaire : BRRD 2 pour la résolution et CRD5 et CRR2 pour le prudentiel.
Dans ce document du 4 décembre, des zones de flou subsistent mais il s’agit d’un point d’étape montrant clairement que l’essentiel des divergences entre le Parlement et le Conseil sont aplanies.
Pour arriver à ce point d’étape, l’un des points d’achoppement sur le
Faciliter les cessions de NPL
Une autre décision marquante concerne les prêts non performants (ou Non Performing Loans, NPL). Aujourd’hui, lorsqu’une banque cède une part d’un portefeuille de NPL, elle doit appliquer la valeur de cession de cette transaction à l’ensemble de son portefeuille de NPL qui restent en stock. Ce mark to market à appliquer à l’ensemble du portefeuille pouvant être pénalisant, certaines banques ont obtenu, au cas par cas, un LGD
Enfin, les banques allemandes et autrichiennes sont satisfaites par une disposition concernant les Additional Tier 1 : aujourd’hui, les coupons liés à ces titres doivent être payés depuis des ressources distribuables au sens des normes comptables locales. En Autriche et en Allemagne la définition de la notion de réserve distribuable étant particulièrement stricte elle crée, pour les banques émettrices de ces pays, un risque élevé de suspension de coupon en raison de ce critère particulier. Dans CRD5 et CRR2, la règle sera différente de sorte que les banques allemandes et autrichiennes ne seront plus pénalisées par leur comptabilité locale.
Ces dispositions devraient faire l’objet d’un vote au Parlement européen au premier trimestre 2019, l’objectif étant de faire voter le paquet bancaire avant les élections européennes.
Achevé de rédiger le 14 décembre 2018
Ils ont dit
Des banques plus sûres mais peu rentables
“[Aujourd’hui, la plupart des banques européennes sont nettement plus sûres, grâce au renforcement de leurs fonds propres que (S&P Global Ratings) juge satisfaisant. Et dans ce domaine, l’essentiel du travail a été fait, ce qui devrait rassurer les investisseurs :] par exemple, dans le texte de la finalisation de Bâle III publiée le 7 décembre 2017, l’augmentation des exigences de fonds propres a été revue à la baisse et les banques avaient anticipé cet accord. C’est donc maintenant davantage la faible rentabilité des banques européennes qui préoccupe.”
Alexandre Birry, responsable mondial des études bancaires, S&P Global Ratings, Revue Banque n°823, septembre 2018, pp. 20-21.
L’union bancaire souhaitée par les investisseurs
“Le marché bancaire européen n’est pas globalisé. L’achèvement de l’Union bancaire serait une bonne chose, car la lecture du secteur serait plus facile. Malheureusement, cet achèvement se heurte à des divergences politiques. Et la montée des populismes ne va pas dans le bon sens.”
Jean-Pierre Cave, trésorier général, Groupe Pasteur Mutualité, Revue Banque n° 823, septembre 2018, pp. 34-35.
Attention aux ventes d’obligations bancaires aux particuliers !
“Pour les nouvelles émissions (d’obligations bancaires, ndlr), la commercialisation d’Additional Tier 1, de Tier 2 et de seniors non préférées auprès de particuliers n’est pas en odeur de sainteté chez les régulateurs et les émetteurs n’envisagent guère d’y procéder. Plus généralement, la distribution d’obligations par l’émetteur lui-même via son réseau retail est sur la sellette.
Le régulateur poursuit deux objectifs qui peuvent sembler contradictoires : protéger les consommateurs et pousser les banques à émettre des instruments capables d’absorber des pertes. En effet, si la clientèle retail est écartée de la base investisseurs des banques, celles-ci risquent de voir leurs coûts de financement augmenter.”
Julien de Saussure, gérant dette financière, Edmond de Rothschild AM, Revue Banque n° 822, juillet-août 2018, p. 6.
Les investisseurs veulent des fusions
“Demain, l’un des axes porteurs du secteur bancaire, ce seront les fusions entre établissements européens. Elles ont d’ailleurs déjà commencé, et ces opérations pourraient créer de la valeur ! Il s’agirait pour des établissements français de racheter ou fusionner avec des banques italiennes ou allemandes. Il faut absolument que les banques européennes réussissent leurs fusions, ceci est plus important que l’achèvement de l’union bancaire.”
Jean-Pierre Mottura, directeur général, CAPSSA, Revue Banque n° 823, septembre 2018, pp. 36-37.
Fusions qui tardent à venir
“Il existe peu de banques de taille moyenne en France, mais elles sont nombreuses à l’échelle européenne et, comme le souligne régulièrement Danièle Nouy, beaucoup n’ont vraisemblablement pas d’avenir.
Voir fusionner ces banques avec d’autres établissements à l’occasion d’opérations transfrontalières constituerait le scénario idéal. C’est par exemple ce qui s’est passé lors du rachat de BPI au Portugal par l’espagnole CaixaBank. Mais ce n’est pas toujours aussi simple. Par exemple, il y a eu ces dernières années un certain nombre de rachats de banques (en partie ou en totalité) par des fonds de private equity (par exemple, BAWAG en Autriche, NKBM en Slovénie, ou Hellenic Bank à Chypre), qui eux-mêmes vendront probablement, d’ici quelques années, à d’autres banques. Mais c’est un processus en plusieurs étapes, qui prend du temps.”
Nicolas Véron, économiste, cofondateur, Bruegel (Think-tank européen), Chercheur, Peterson Institute, Revue Banque n° 823, septembre 2018, pp. 22-24.
Suspens sur la compensation
“Malgré les difficultés rencontrées par les négociateurs, le scénario le plus probable demeure que l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni vont s’entendre, au travers d’un accord, pour que le Brexit se déroule sans heurt majeur, notamment dans le domaine de la compensation. Dans l’hypothèse où ce scénario A ne se réaliserait pas, se posera alors le problème de la continuité des contrats de dérivés mais l’UE apportera probablement des solutions, au moins temporaires ; elle en a les moyens juridiques mais elle ne communique pas sur cette hypothèse, qui constituerait un plan B, car elle ne souhaite pas torpiller la négociation de l’accord avec le Royaume-Uni qui constitue un intérêt supérieur de l’UE.”
Nicolas Véron, économiste, cofondateur, Bruegel (Think-tank européen), Chercheur, Peterson Institute, Revue Banque n° 825, novembre 2018, p. 13.