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Assurance vie et saisie de la valeur
de rachat par le comptable public

Créé le

02.04.2024

Cass. com. 14 févr. 2024, n° 21-25.616, publié au Bulletin.

Si en principe la valeur de rachat d’un contrat d’assurance vie est insaisissable par les créanciers du souscripteur, le comptable public peut, pour le recouvrement de dettes fiscales, exercer contre la compagnie d’assurances une « saisie administrative à tiers détenteur » (LPF, art. 262), dispositif de saisie de valeurs entre les mains des tiers applicable depuis le 1er janvier 2019 (L. n° 2017-1775, 28 déc. 2017, art. 73).

Lorsque la saisie administrative à tiers détenteur porte sur un contrat d’assurance rachetable, elle entraîne le rachat forcé dudit contrat (art. préc.).

Depuis cette date, il ne fait donc aucun doute que la totalité de la valeur de rachat du contrat d’assurance vie peut être saisie par le comptable public dans la limite de la créance fiscale impayée et de la disponibilité de la valeur de rachat.

Cette précision est importante, car la disposition antérieurement applicable (LPF, art. 263-0 A, abrogé par la loi du 28 décembre 2017, précitée) était ambiguë sur ce point. Selon ce texte, pouvaient « faire l’objet d’un avis à tiers détenteur notifié par le comptable chargé du recouvrement, dans les conditions prévues aux articles L. 262 et L. 263, les sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l’objet de limitations, dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l’avis à tiers détenteur ».

À lire ce texte, seule une fraction de la valeur de rachat était saisissable, celle correspondant aux primes versées par le souscripteur. Interpréter ainsi cette disposition aurait conduit à restreindre l’effet de l’avis à tiers détenteur (mode de saisie applicable au contrat d’assurance vie avant la réforme de 2017), à une partie de la valeur de rachat (au moins pour les contrats en plus-value).

Conséquence difficilement justifiable puisque la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013, à l’origine de cette faculté de saisie simplifiée des créances détenues par les tiers, a pour objet la lutte contre la fraude fiscale. Sur le fond, aucune raison ne pouvait justifier de limiter ainsi l’assiette de la saisie.

C’est donc sans surprise que la Cour de cassation (Cass. com. 14 févr. 2024, n° 21-25.616, publié au Bulletin) précise que sous l’empire du droit antérieur la saisie pouvait porter sur la totalité de la valeur de rachat de contrats en plus-value : « Il ressort des travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale, laquelle, a introduit, à l’article L. 263-0 A du livre des procédures fiscales, la possibilité pour les comptables publics de procéder à la saisie des sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, que le législateur a entendu que la saisie porte sur la part rachetable des contrats d’assurance vie.

Il s’ensuit que l’avis à tiers détenteur notifié, en application de l’article L. 263-0 A du livre des procédures fiscales, par le comptable chargé du recouvrement saisit la valeur de rachat des droits résultant du contrat d’assurance rachetable auquel le redevable a souscrit ou dont il est adhérent, quand bien même cette valeur serait supérieure au montant cumulé des versements effectués par le redevable. » n

À retrouver dans la revue
Banque et Droit Nº214
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