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Finances publiques

La hausse des taux exacerbe les risques
de soutenabilité de la dette française

Créé le

26.08.2022

-

Mis à jour le

08.09.2022

La France s’approche des 3 000 milliards d’euros de dette publique. Selon l’Insee, à la fin du premier trimestre 2022, la dette trimestrielle des administrations publiques s’est établie à un record de 2 901,8 milliards d’euros, en hausse de 88,8 milliards d’euros. Sur les trois premiers mois de l’année, la part de l’État y a augmenté de 64,8 milliards et celle des administrations de Sécurité sociale s’est accrue de 25,6 milliards. La dette publique française a progressé de 19 % par rapport aux 2 433,6 milliards d’euros enregistrés à la fin du premier trimestre 2020, au démarrage de la crise pandémique. C’est un bond de 60 % comparé aux 1 808 milliards d’euros atteints fin 2011, juste avant le pic de la crise de la dette souveraine en zone euro. Cette envolée galopante devient de plus en plus problématique pour l’État français, qui reste au chevet des ménages et des entreprises pour faire face, non seulement, à la nouvelle vague pandémique, mais également au choc inflationniste et aux répercussions liées à l’enlisement de la guerre en Ukraine.

Un poids de la dette record

Le poids de la dette publique en pourcentage du PIB s’élève à 114,5 %, flirtant avec le niveau record de 117,4 % de la fin du premier trimestre 2021. Le ratio avait cassé la barre psychologique des 100 % début 2020, à la suite de la mise en place des mesures d’urgence de politique budgétaire du gouvernement Macron visant à amortir les effets de la crise du Covid-19. Si elles ont réussi à réduire le déficit public de 8,9 % en 2020, à 6,5 % en 2021 grâce au rebond économique et aux recettes, les autorités publiques françaises dérogent toujours aux règles budgétaires européennes des déficits publics inférieurs à 3 % du PIB et de dette publique inférieure à 60 % du PIB. Même si celles-ci ont été suspendues par la Commission européenne depuis mars 2020 et le resteront jusqu’en 2023, les dérives budgétaires placent l’Hexagone parmi les quinze États membres aux déficits les plus élevés en 2021, faisant uniquement mieux que Malte (-8 %), la Grèce (-7,4 %), la Lettonie (-7,3 %), l’Italie (-7,2 %), la Roumanie (-7,1 %), l’Espagne (-6,9 %) et la Hongrie (-6,8 %). En terminant l’exercice précédent avec un ratio de dette publique de 112,9 %, la France tutoie les niveaux des ratios de l’Espagne (118,4 %) et du Portugal (127,4 %), tandis que la situation est beaucoup plus préoccupante du côté de l’Italie (150,8 %) et de la Grèce (193,3 %).

40 milliards d’euros par an en plus

L’état de santé des finances publiques du pays a de quoi inquiéter. D’autant plus que la normalisation de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne entamée le 21 juillet avec une première hausse des taux directeurs de 50 points de base accroît à moyen terme les risques de soutenabilité de sa dette. Évoluant à 0,23 % au début de l’année, les taux à 10 ans français s’échangeaient à 1,92 % le 23 août, soit un bond de 169 points de base. Ils avaient atteint les 2,4 % en juin, un niveau prenant en compte les anticipations de hausse de taux. « Selon nos estimations, chaque hausse de 1 % des taux entraînera au bout de 10 ans une augmentation de la charge annuelle d’intérêt de 1 point de PIB, et une augmentation de la dette de 5½ points de PIB, par rapport à une situation sans hausse de taux, avait alerté début mai François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, lors d’une conférence du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Chaque 1 % de hausse des taux d’intérêt représente donc à terme un coût annuel supplémentaire de près de 40 milliards d’euros, soit presque le budget actuel de la Défense. »

Dans son avis du 4 juillet relatif au projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022 présenté le 6 juillet en Conseil des ministres, le HCFP note que « la forte augmentation de la charge de la dette pour 2022 (+17,8 Md€) par rapport à la LFI [loi de finance initiale, NDLR] rappelle que la plus grande vigilance doit être apportée à la soutenabilité à moyen terme des finances publiques ». Il y souligne que les charges d’intérêts de la dette pourraient être accrues, notamment celles des titres de dette indexés sur l’inflation, en raison d’une inflation plus élevée que prévu.

$!<b>La dette publique française atteint des niveaux record – </b>Dette au sens de Maastricht des administrations publiques en montant et en points de PIB
À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº871