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Frédéric Guyonnet, président, SNB CFE-CGC : « Le confinement a entraîné des réorganisations durables autour du télétravail »

Créé le

18.06.2020

La crise sanitaire du coronavirus aura des conséquences durables dans le quotidien des salariés du secteur bancaire. Bilan avec Frédéric Guyonnet, président du SNB CFE-CGC, sur le déconfinement et le retour à la normale, mais aussi sur les changements en profondeur accomplis en quelques semaines.

Comment s’est déroulée la sortie du confinement dans le secteur bancaire ?

Dans les réseaux d’agences, assez peu de choses ont changé, finalement, par rapport à la période du confinement. Certains réseaux, comme LCL, qui avaient fermé jusqu’à 50 % de leurs agences, les ont rouvertes, tout en maintenant le principe du filtrage des demandes des clients. Chaque fois que c’est possible, les opérations doivent être faites à distance. Pour celles qui nécessitent une visite en agence, un rendez-vous est accordé. L’ensemble du réseau bancaire français a enfin été doté d’équipements de sécurité et de protection, pour les clients comme pour les collaborateurs, notamment des maques et du gel. Pendant la période du confinement, des parois en plexiglas ont été mises en place sur les bureaux et à l’accueil, et elles continuent de se généraliser.

Dans les sites centraux et les sièges, où les open spaces sont courants, on note désormais une très forte pratique du télétravail. Peu à peu, les salariés sont revenus, mais pas à 100 %, loin de là. Sur certains sites de BNP Paribas, Société Générale, LCL, Natixis, ou BPCE, le télétravail s’est mis en place quasiment à 100 % pendant le confinement. Aujourd’hui, en moyenne, 20 % de ces collaborateurs viennent travailler sur site, et 80 % demeurent donc en télétravail. Le plus souvent, le travail en présentiel se fait par roulement : les salariés viennent par exemple deux jours par semaine.

L’organisation du travail dans les banques a donc été transformée en profondeur ?

Absolument. Les collaborateurs des agences se sont mis à vendre et à mener des entretiens à distance. Petit à petit, la visioconférence se développe. La plupart des bureaux en agence ne sont pas encore équipés de webcam, mais les réseaux d’agences se dotent des matériels pour ce faire.

Dans les sites centraux, d’énormes changements sont en cours. Société Générale, BNP Paribas, Natixis ou BPCE ont déjà annoncé la vente de certains de leurs immeubles, dans le cadre de la mise en place d’une nouvelle organisation du travail. Le confinement leur a permis de constater que non seulement le télétravail fonctionne très bien, mais qu’il pouvait leur permettre de gagner des mètres carrés très coûteux, notamment sur Paris. Les réorganisations en cours autour du télétravail sont telles, que la majorité des banques renégocient aujourd’hui leurs accords de télétravail. Les accords qui étaient en cours d’expérimentation se pérennisent.

Comment les banques, opérateurs d’importance vitale qui ne devaient pas recourir au chômage partiel, ont-elles géré le passage des arrêts maladie pour garde d'enfants vers le chômage partiel, au 1er mai ?

Ce fut une négociation inédite. Au cours de la dernière semaine d’avril, presque 50 000 salariés des banques qui étaient en garde d’enfants ont en effet pu passer du régime de la sécurité sociale à celui du chômage partiel. Avec André-Guy Turoche, directeur des affaires sociales à la FBF, les syndicats ont directement proposé à la ministre du Travail des amendements aux textes de loi. Le 30 avril, Muriel Pénicaud nous a répondu par courrier que les salariés des banques auraient eux aussi accès au dispositif d’activité partielle et à ses avantages.

Où en sont les primes Covid ?

Elles sont apparues début juin. La Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne est la première à les avoir mises en place. Une mesure unilatérale de la direction accorde cette prime aux seuls salariés qui sont venus travailler sur place, et établit une différenciation entre le réseau d’agences et le siège. Les télétravailleurs n’y ont pas eu droit. BNP Paribas, selon le même principe, a récompensé les salariés qui se sont déplacés, mais pas les télétravailleurs. D’autres banques sont en cours de négociation : Société Générale, Crédit Mutuel, CIC, quelques banques populaires.

Comment la négociation de l'accord pour la Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), conclu avec l’AFB pour quatre ans, s’est-elle déroulée ?

Cet accord fixe les règles de fonctionnement de l’Observatoire des métiers. Au-delà du fond, c’est la forme qui est intéressante, car pour la première fois, cet accord a été négocié et signé à distance. Il a été entièrement bâti au téléphone, et cela a très bien fonctionné ! C’est pour cela qu’il y a autant de signataires de cet accord. La direction a envoyé une ébauche de l’accord et les partenaires sociaux l’ont amendée par mail. Lors d’une négociation en présentiel, il y a un côté très théâtral : chacun tient ses postures, direction comme organisations syndicales. Quand la négociation se fait à distance, on ne se perd pas en fioritures, positions politiques ou détails. Chacun sait où trouver les points qui vont gêner et les lignes qu’il faut bouger. On va directement à l’essentiel.

Propos recueillis par Géraldine Dauvergne.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº846
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