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Crise sanitaire

Covid-19 : les banques au cœur du dispositif de soutien à l’économie

Créé le

22.03.2020

Les banques jouent un rôle central dans le vaste dispositif d’aides, orchestré par le ministère de l’Economie, visant à aider les entreprises confrontées, lors de la crise sanitaire, à un besoin urgent de financements et de trésorerie.

Face au choc économique que représente la crise sanitaire du coronavirus, les établissements bancaires et d’assurance se montrent résilients grâce aux réformes mises en œuvre depuis une dizaine d’années, a estimé le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), lors de sa séance du 18 mars. « Contrairement à la crise de 2008 qui était essentiellement financière, celle-ci touche l’économie réelle, a précisé Bruno Le Maire : des dizaines de milliers de très petites entreprises, de commerçants, d’artisans, de PME, et de très grandes entreprises industrielles qui n’ont plus aucune activité ». Le ministre de l’Économie et des Finances a exhorté tous les acteurs de l’économie à « jouer le jeu de la solidarité » en prenant part à un vaste dispositif d’urgence d’aide aux entreprises, afin de pallier leur besoin urgent en financements et de trésorerie. Dispositif dans lequel les banques se voient confier un rôle central. Initialement évalué à 45 milliards d'euros, le montant total des mesures budgétaires et de trésorerie du plan d'urgence pour l'économie est passé à 100 milliards d'euros dans le nouveau budget rectificatif présenté mercredi 15 avril.

 

Les mesures décidées par les banques. La Fédération Bancaire française (FBF) les a présentées dès le 6 mars : procédures accélérées d'instruction de crédit pour les situations de trésorerie tendues, dans un délai de cinq jours ; report sans frais jusqu'à six mois des remboursements de crédits pour les entreprises ; suppression des pénalités et des coûts additionnels de reports d'échéances et de crédits des entreprises ; et enfin relais des mesures gouvernementales auprès des clients – report d'échéances sociales et fiscales, mécanisme de garantie publique de Bpifrance, etc.

Les entreprises pourront enfin demander à leur banque un prêt d’un montant pouvant atteindre trois mois de chiffre d’affaires annuel. Le coût de ces nouveaux prêts comprendra le coût de la garantie (0,25 à 0,50 %), ainsi que celui du taux d’intérêt auxquels les banques empruntent. Toutefois, pendant un an, les banques ne prendront pas de marge sur ces crédits.

Les mesures de Bpifrance. La banque publique d’investissement octroie sa garantie sur les prêts de trésorerie accordés par les banques privées aux entreprises affectées par la crise sanitaire et prolonge, sans frais de gestion, les garanties habituelles de crédits d’investissement lors des réaménagements par les banques. Bpifrance remonte à 90 % le niveau de garantie des crédits de 3 à 7 ans accordés par des banques privées ainsi que la garantie pour les découverts de 12 à 18 mois, confirmés par la banque de l’entreprise. Une série de mesures d’urgence vise à apporter du cash directement aux entreprises, dans le cadre du plan d'urgence propre à Bpifrance : prêts de soutien à la trésorerie, sans garantie, sans sûretés sur les actifs de la société ou du dirigeant, et assortis d’un différé de remboursement du capital. Elle accorde des crédits de trésorerie à hauteur de 30 % des volumes de facture mobilisés ainsi que des prêts sans garantie de 3 à 5 ans, de montants allant de 10 000 à plusieurs dizaines de millions d’euros. Elle suspend, à compter du 16 mars, le paiement des échéances de prêts qu’elle a déjà octroyés.

Les engagements de la médiation du crédit aux entreprises. Celle-ci va accélérer la négociation des entreprises avec leur banque en vue d’obtenir un rééchelonnement des crédits. Le médiateur doit répondre à l’entreprise dans les 48 heures suivant la saisine, pour vérifier la recevabilité de sa demande, définir un schéma d’action et saisir les banques concernées. Un comité de crise, enfin, réuni sous l’égide du Médiateur des entreprises et du Médiateur du crédit, doit traiter en temps réel les cas les plus graves de détérioration du crédit inter-entreprises, en veillant à la santé des petites et moyennes entreprises.

Les mesures en garantie l'État. Le gouvernement a introduit dans le projet de loi de finances rectificative une série de mesures en garantie destinées à renforcer le financement des entreprises, visant à protéger les entreprises de la faillite et à préserver l’emploi. Un premier volet consiste en un dispositif massif de nouveaux prêts de trésorerie consentis par les banques, du 16 mars au 31 décembre 2020, adossés à une garantie de l’État de 300 milliards d’euros. Ces prêts pourront couvrir jusqu’à 25% du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise, pour faire face aux besoins les plus urgents. L’entreprise aura jusqu’à 6 ans pour rembourser son prêt. La tarification sera de 0,25% pour un prêt d’un an aux PME et 0,50% aux ETI et grandes entreprises. Bpifrance assure le suivi de ce dispositif. Le deuxième volet consiste en une réassurance publique sur les encours d’assurance-crédit, à hauteur de 10 milliards d’euros, mise en œuvre par la Caisse centrale de réassurance. Ce nouveau dispositif de garantie doit aider les entreprises à faire face aux réductions d’encours garantis et annulations de garantie. Le troisième volet repose sur le doublement du plafond d’encours réassurable par l’État du dispositif de réassurance publique des crédits export de court terme, Cap Francexport. Celui-ci est porté à 2 milliards d’euros afin d’aider les exportateurs français, à conserver leurs parts de marché à l’international. Les quotités garanties par l’État à travers Bpifrance Assurance Export pour les cautions et les préfinancements de projets export sont relevées à 90% pour toutes les PME et ETI. La durée de validité des accords de garanties des préfinancements export sera prorogée, pour atteindre six mois. Les assurances-prospection en cours d’exécution sont prolongées d’un an. Enfin le gouvernement annonce un ensemble de mesures spécifiques pour les start-up évalué à 4 milliards d’euros.

Les mesures en capital de l’État. Afin de soutenir le crédit aux petites et moyennes entreprises, qui dépend du financement bancaire, le HCSF a décidé de relâcher intégralement le coussin de fonds propres bancaires contracycliques. Le 2 avril 2020, son taux aurait dû atteindre 0,5 % des actifs pondérés par les risques sur les expositions françaises des établissements de crédit. Il sera donc de 0 % jusqu’à nouvel ordre. Le gouvernement compte dégager ainsi 8 milliards d’euros de capital pour le financement de l’économie.

Le fonds de solidarité. Créé par l'État et doté de 2 milliards d’euros, il a été abondé de 250 millions d’euros par les régions. Il permet d’accorder très vite une aide d'urgence de 1.500 euros maximum aux plus petites entreprises, indépendants et micro-entrepreneurs, dont le chiffre d’affaires a diminué d’au moins 70 % entre mars 2019 et mars 2020, notamment en raison des fermetures administratives. Au cas par cas, le fonds apporte un soutien complémentaire aux entreprises menacées de faillite, jusqu'à 2000 euros. La direction générale des Finances publiques (DGFiP) est chargée de sa mise en œuvre. Cette aide sera renouvelée au mois d'avril 2020, et la perte du chiffre d'affaires pour en bénéficier ramenée à 50 % entre avril 2019 et avril 2020. Le ministre a enfin annoncé le 30 mars qu'il était prêt à augmenter le montant de l'aide complémentaire au-delà de 2000 euros, et que le fonds de solidarité serait maintenu aussi longtemps que durerait l'épidémie.

Les mesures de la Banque Centrale européenne (BCE). « Les temps extraordinaires nécessitent une action extraordinaire », a déclaré Christine Lagarde dans un tweet. L'institution monétaire de l'Union européenne a lancé un programme d'urgence pandémique d’achat (PEPP) de dette privée et publique, pour un montant de 750 milliards d'euros, qui durera au moins jusqu’à la fin de l’année. Ce plan concernera toutes les catégories d'actifs éligibles dans le cadre du programme d'achat d'actifs (APP) existant. « Surtout, il évitera la fragmentation de la zone euro et renforcera la solidarité entre les États membres », a commenté Bruno Le Maire.

 

Les mesures proposées par les assureurs. Ceux-ci n’assurent pratiquement pas les pertes d’exploitation. « Mais il n’est pas question que ce grand secteur d’activité, qui a su compter récemment sur le soutien du gouvernement notamment pour l’assouplissement de règles prudentielles, ne participe pas à la solidarité nationale, » n’a cessé de scander Bruno Le Maire pendant la première semaine de la crise sanitaire. La FFA a annoncé le 19 mars le maintien des garanties des contrats des entreprises en difficulté en cas de retard de paiement, pour toute la durée du confinement. « Cette mesure de solidarité permettra aux professionnels les plus touchés de poursuivre leur activité en restant couverts pour leurs risques assurés », a estimé Florence Lustman, présidente de la Fédération Française de l’Assurance. Les membres de la FFA se sont engagés le 23 mars à contribuer à hauteur de 200 millions d’euros au fonds de solidarité en faveur des TPE et des indépendants. Enfin, ils prendront en charge, au titre des contrats, les indemnités journalières pour les personnes fragiles placées en arrêt de travail selon la procédure dérogatoire et dans la limite de 21 jours d’arrêt de travail, mesure qui, indique la FFA « représentera une charge exceptionnelle pour le secteur ». Le 30 mars, Bruno Le Maire a annoncé, dans une interview sur BFM TV, qu'une réflexion était en cours avec les assureurs pour prendre en compte la notion de catastrophe sanitaire.

 

Article actualisé le 9 avril 2020

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº843