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Change et taux

Le "combat des politiques contre les marchés" !

Créé le

12.07.2010

Jusqu’à fin avril, les tergiversations des gouvernements de la zone euro face à une crise qui, depuis plusieurs mois déjà, rampait, rappelaient étrangement l’attitude des autorités américaines dans la période qui a précédé la faillite de Lehman Brothers : faute d’audace, elles laissèrent alors la crise se propager. Loin de tirer les leçons de cet épisode, les autorités européennes se sont longtemps contentées de discuter des modalités d’un éventuel plan de soutien à la Grèce… tout en expliquant d’ailleurs qu’il n’était pas vraiment nécessaire !

Début mai, la prime de risque de l’État grec dépassait largement celle de la plupart des pays émergents et les ingrédients d’une nouvelle panique financière étaient réunis : une grève générale en Grèce qui dégénère en violences, des déclarations laissant deviner des gouvernements européens toujours désunis, des opérateurs de marchés désormais inquiets de la solvabilité… du Portugal et de l’Espagne, et, coup de grâce, une cascade d’ordres de ventes automatiques qui, le 6 mai dernier, vont faire violemment chuter Wall Street. Face à cette évolution, les autorités européennes vont avoir une réaction salutaire : le 9 mai, l’annonce de la création d’un fonds de stabilisation européen – doté de plusieurs centaines de milliards d’euros – et du rachat par la BCE de titres de dettes décotées va, pour un temps au moins, permettre de ramener le calme sur les marchés.

Avec le recul, le drame qui s’est joué semble d’autant plus paradoxal que, prises ensemble, les finances publiques de la zone euro sont plutôt moins dégradées que celles du Royaume-Uni ou des États-Unis. D’où la tentation de ne voir dans cet épisode que la conséquence d’une spéculation débridée et une nouvelle preuve de l’irrationalité des marchés. La leçon à tirer est pourtant autre. Les propriétés de stabilité de la finance globalisée sont semblables à celles de beaucoup de systèmes complexes : leur plage de stabilité est limitée. Les autorités doivent, avant que l’évolution des marchés n’ait pris un tour extrême, assumer leurs responsabilités et intervenir. La remise sur rails du système sera sinon à chaque fois plus dramatique… et plus coûteuse !

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº725