À l’image de leur économie nationale, les banques canadiennes ont fait preuve de dynamisme en octobre avec l’annonce de trois acquisitions dont celle du gestionnaire d’actifs BlueBay par Royal Bank of Canada pour plus d’un milliard d’euros. Ce constat renvoie plus généralement à la bonne santé des établissements bancaires canadiens depuis le début de la crise financière. Même si cette dernière n’a pas épargné les grandes banques canadiennes, ses effets ont été moindres qu'ailleurs. En effet, le Canada est le seul pays industrialisé qui peut s’enorgueillir d’avoir un secteur bancaire qui a traversé la crise sans vastes plans de sauvetage ni faillites retentissantes. Dans un contexte où leurs concurrentes étrangères accumulaient les pertes, les six principaux établissements bancaires du pays ont réalisé plus de 46 milliards de dollars américains de profits entre 2007 et 2009 (voir l'encadré 1).
Ainsi,
Tout d’abord, il s’agit d’un modèle de banque plutôt traditionnel avec des pratiques en matière de gestion plus prudentes et conservatrices, fruit d’un héritage culturel et historique. Par exemple, la plupart des banques du pays ont fui les produits structurés ainsi que les crédits subprime et n’ont pas pratiqué la titrisation à tout va. En outre, la loi bancaire est révisée tous les cinq ans afin de veiller à ce que le cadre réglementaire évolue avec le secteur et ses innovations financières. Par ailleurs, les choix en matière de fiscalité ont également contribué à la stabilité du système. Si, aux États-Unis, l'intérêt des crédits immobiliers est déductible des impôts, ce qui encourage l’endettement privé, ce n'est pas le cas au Canada.
Enfin, il existe dans ce pays une réglementation bancaire plus contraignante qu’ailleurs. En effet, le régulateur canadien – Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF ou OSFI en anglais) – a fixé des normes beaucoup plus strictes que celles qui existent à l’échelle internationale, notamment au niveau des fonds propres et de l'effet de levier (leverage). Alors que les normes Bâle II imposent un ratio de solvabilité supérieur à 8 % ainsi qu’un Tier 1 de 4 %, ces pourcentages sont respectivement de 10 % et 7 % au Canada. Ce qui explique que les grandes banques canadiennes étaient mieux capitalisées que leurs homologues étrangères en 2007 (voir l'encadré 2). De plus, les établissements bancaires ne doivent pas afficher un effet de levier (actifs/capitaux propres) de plus de 20 au Canada. Un ratio qui a pu monter jusqu'à 60 en Europe sur la période récente.
Au final, il apparaît que la prudence excessive des banques canadiennes, qui était vivement critiquée par les analystes avant la crise, s’est donc transformée en vertu quelques années plus tard. « Boring is the new sexy » disait récemment non sans humour Jim Flaherty, l’actuel ministre des Finances du gouvernement canadien.