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Banco Santander : une histoire de famille

Créé le

23.10.2014

-

Mis à jour le

27.10.2014

Emilio Botin est décédé le 10 septembre dernier, à l’âge de 79 ans. Il était l’un des banquiers les plus influents et respectés d’Europe. Retour sur ses années de présidence, qui ont propulsé Banco Santander au sommet des banques mondiales.

Né le 1er octobre 1934 à Santander (Espagne), Emilio Botin est issu d’une dynastie de banquiers. Son arrière-grand-père est l’un des neuf fondateurs, en 1857, de Banco Santander. Son grand-père, Emilio Botin Lopez, en prend la présidence en 1909 et développe un réseau de succursales à partir de 1920. Son père ensuite, Emilio Botin Sanz de Sautuola y Lopez, à la tête de la banque à partir de 1950, rachète plusieurs petites banques espagnoles. Emilio Botin Sanz de Sautola y Garcia de los Rios, la rejoint quant à lui en 1958, en devient directeur général en 1964, puis président en 1986. Tout au long de son règne, qui dura 28 ans, il n’aura eu de cesse d’étendre l’empire familial (voir Encadré 1).

Dès son arrivée, « Emilio III » s’emploiera à renforcer Banco Santander sur son marché domestique. Il commença par une stratégie de croissance interne fondée sur les supercuentas, comptes de dépôts bénéficiant d’une rémunération agressive. Le vrai changement de dimension intervient cependant en 1994, quand il rachète en plein scandale son compatriote Banco Espanol de Credito (Banesto), précipité dans le gouffre par la mauvaise gestion de Mario Conde. Toujours à l’affût des plus belles opportunités, Emilio Botin fusionne en 1999 avec son concurrent Banco Central Hispano (BCH), hissant l’établissement à la première place du classement des banques espagnoles.

À partir de la fin de la décennie 90, et surtout durant les années 2000, Emilio Botin met résolument le cap à l’international. Il multiplie les opérations de croissance externe en Europe, en Amérique latine (Brésil, Mexique, Chili) et aux États-Unis, comme, en 2004, la prise de contrôle de la banque britannique Abbey National ou encore, en 2007, l’acquisition d’une partie du géant bancaire néerlandais ABN Amro, dans le cadre d’une « vente à la découpe » inédite. Il profite aussi de la crise bancaire de 2008 pour reprendre à bon compte plusieurs établissements fragilisés aux quatre coins du monde. Banco Santander devient alors la première banque de la zone euro par la capitalisation boursière.

Grâce à une gestion financière rigoureuse et une stratégie de diversification géographique efficace, Banco Santander a réussi le double exploit d’échapper au naufrage d’une large partie du secteur bancaire espagnol, après l’éclatement de la bulle immobilière en 2008, et de sortir sans encombre de la crise des subprime. Cela lui vaut, à la fin des années 2000, une aura internationale illustrée en particulier par le titre de « Meilleur banquier du monde » décerné par le magazine Euromoney en 2008. Emilio Botin touche là les dividendes des deux qualités unanimement reconnues par ses confrères : la prudence et le flair, qui ont fait passer son établissement du statut de banque régionale à celui de géant bancaire international.

Emilio Botin avait émis le souhait que sa fille aînée, Ana Patricia Botin, dirigeante de la filiale britannique de Santander, lui succède. Convoqué en urgence en septembre dernier, le conseil d’administration a approuvé à l’unanimité ce choix. Âgée de cinquante-quatre ans, Ana Patricia Botin se préparait depuis des années à perpétuer l’autorité de la famille Botin sur Banco Santander. Aussitôt installée, elle a montré sa volonté de marcher dans les pas de son père avec l’acquisition du canadien Carfinco et l’annonce de l’entrée en négociations exclusives avec l’italien Unicredit pour le rachat de Pioneer, afin de créer l’un des principaux gestionnaires d’actifs européens (voir Encadré 2).

Même si la banque connaît en 2014 une certaine « normalisation » de ses résultats, la nouvelle présidente devra relever plusieurs défis majeurs à court terme dont la reconquête de son marché national. En effet, Banco Santander n’a pas participé à l’intense mouvement de concentration qui a touché le secteur bancaire espagnol ces dernières années, contrairement à ses deux principales concurrentes, BBVA et CaixaBank.

 

Achevé de rédiger le 23 octobre 2014.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº777