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Rencontre avec... Maël Bernier, directrice de la communication et porte-parole de meilleurtaux.com

« Les demandes de prêt correspondent à
des besoins, non plus à des “achats plaisir”»

Créé le

20.03.2024

-

Mis à jour le

25.03.2024

En 2023, le crédit à la consommation a marqué le pas. Comment cela s’est-il traduit dans vos activités de courtage ?

Effectivement, 2023 a été une année dure. Le crédit à la consommation n’est pas une de nos activités phares mais nous l’exerçons depuis le milieu des années 2000 et avons constaté une baisse assez franche de la demande, tandis que l’offre s’est nettement resserrée. Nos partenaires sont prudents : ces crédits sont devenus un peu plus risqués. Le taux de défaut dans le crédit à la consommation est toujours plus important que dans le crédit immobilier. D’une certaine façon, dans un contexte comme le nôtre, le marché s’autorégule. La « bascule » a eu lieu dès 2022. Elle est indubitablement liée à l’inflation et à la baisse du pouvoir d’achat.

Il faut cependant préciser que l’encadrement légal en France, depuis la loi Lagarde, et la vigilance des autorités durcissent les conditions d’accès au crédit.

Avec le durcissement des conditions d’octroi, avez-vous observé une évolution du profil type des emprunteurs ?

Le « portrait-robot » de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation n’est plus le même qu’en 2020 ou 2021. Les emprunteurs bénéficient de revenus relativement élevés, en moyenne à partir de 4 300 euros mensuels pour un foyer en 2022, alors que la moyenne a pu se situer en dessous de 4 000 euros il y a quatre ou cinq ans.

Ils ne sont pas forcément représentatifs de ceux qui constituent des dossiers de demande, mais ce sont ces foyers-là qui obtiennent le crédit.

Avez-vous constaté des modifications dans la nature des prêts ?

Le montant des prêts, tout d’abord, a baissé. Il était au-dessus de 10 000 euros en 2021, il s’établit aujourd’hui à une moyenne de 8 500 euros. La finalité du prêt n’est plus la même non plus. Aujourd’hui, il correspond à un besoin de trésorerie pour faire face à une dépense imminente ou à plusieurs imprévus. Il ne justifie pas par un achat. C’est pourquoi les demandes de prêts non affectés sont proportionnellement en hausse, au détriment des prêts affectés à un achat particulier.

Ces demandes correspondent à des besoins. Auparavant, elles pouvaient répondre à une certaine forme d’ « achat plaisir », pour financer un voyage, un mariage, sans grever ses économies. On pouvait de temps à autre trouver un profil d’ « emprunteur opportuniste », en quelque sorte. Il profitait des taux bas et empruntait pour une acquisition ou une activité non indispensable, afin d’éviter de prélever dans son épargne. Les taux d’emprunt le permettaient, ce n’est plus le cas. Les emprunts répondent aujourd’hui à une ou des nécessités.

Ce besoin de trésorerie survient parfois après que le client a contracté plusieurs crédits et doit faire face aux échéances. Il entame un processus pour contracter un prêt personnel non affecté, qui n’est finalement pas le plus adapté. Nous amorçons alors une démarche de conseil, notamment pour l’orienter vers un regroupement de crédits, l’option la plus adéquate dans ce cas de figure. Ce type de situation est plus fréquent aujourd’hui.

La baisse du crédit affecté à l’achat d’équipement peut-elle aussi être attribuée à l’essor de l’économie de l’usage et du leasing ?

Indubitablement, les modes de consommation évoluent. Le leasing permet de disposer d’un équipement sans mauvaises surprises. Le financement est plus accessible qu’un achat, à plus forte raison dans la période que nous traversons. Sans compter que le paiement des mensualités inclut toute une gamme de services.

2023 a été une année difficile et il est peu probable que nous retrouvions à moyen terme les niveaux de taux que nous avons connus auparavant. Nous nous en sommes sortis sans trop de casse grâce à notre importante diversification. Certaines agences par exemple ont pu conserver un niveau d’activité suffisant grâce aux prêts aux entreprises, en particulier pour le rachat de fonds de commerce.

Notre métier consiste à aborder toutes les problématiques liées à l’argent et au financement : ce sont des évolutions que nous suivons et des pistes de développement possibles. À l’instar du « prêt vert ». Nous n’en sommes qu’aux prémices, mais c’est l’avenir, on n’y coupera pas. 

Propos recueillis par Fanny Avignon

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº891
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