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Publication du règlement révisant
le règlement CSDR

Créé le

31.01.2024

Le règlement 2023/2845 apporte au règlement CSDR plusieurs modifications visant à alléger les contraintes et les coûts pesant sur les acteurs, notamment au titre de la discipline
de règlement, et à favoriser l’activité transfrontière
des dépositaires centraux de titres. Les exigences organisationnelles sont par ailleurs renforcées.

Le règlement (UE) 2023/2845 modifiant le règlement n° 909/2014 du 23 juillet 2014 concernant l’amélioration du règlement des opérations sur titres dans l’Union européenne et les dépositaires centraux de titres, dit CSDR (Central Securities Depositories Regulation)1, a été adopté le 13 décembre 2023 et publié au Journal officiel le 27 décembre. Le règlement CSDR est venu encadrer l’activité des dépositaires centraux de titres, qui remplissent des fonctions essentielles pour l’efficience des marchés financiers et pour la stabilité du système financier : la fonction « notariale », consistant à enregistrer, dans un compte spécifique, l’intégralité des instruments financiers composant chaque émission admise aux opérations du dépositaire central, afin de vérifier en permanence que le nombre d’instruments financiers enregistrés aux comptes de ses adhérents correspond bien au montant total de chaque émission ; la tenue centralisée de comptes de titres, qui permet d’assurer la circulation des instruments financiers par virement de compte à compte ; et la gestion de systèmes de règlement de titres2.

La révision du règlement CSDR s’inscrit dans le cadre du plan d’action de 2020 pour une union des marchés des capitaux (UMC)3 et du programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT) de la Commission européenne. A ce titre, elle vise à ajuster un certain nombre de dispositions jugées porteuses de contraintes et de coûts excessifs pour les acteurs concernés, afin de mettre en place un régime mieux proportionné et plus efficace4. Certains des sujets qui s’étaient avérés les plus sensibles lors de la préparation du règlement CSDR, tels le régime de la discipline de règlement et la fourniture de services accessoires de type bancaire, ont ainsi été réexaminés. Comme cela a été le cas lors de la révision du règlement EMIR5, certaines obligations sont modifiées alors même qu’elles sont applicables depuis peu, voire ne sont pas encore entrées en application.

La proposition de règlement présentée par la Commission européenne en mars 20226 comportait trois principaux axes. Le premier tient à l’assouplissement du régime de la discipline de règlement (1.). Le deuxième vise à favoriser l’activité transfrontière des dépositaires centraux de titres en allégeant le régime du passeport européen, en améliorant la coopération entre les autorités de surveillance et en facilitant l’accès aux services accessoires de type bancaire pour permettre le règlement de transactions en devises (2.). Le troisième concerne le régime applicable aux dépositaires centraux de pays tiers (3.). Le texte adopté le 13 décembre 2023 comporte des dispositions qui ne figuraient pas dans la proposition initiale ; ce quatrième axe concerne pour l’essentiel les exigences organisationnelles et prudentielles applicables aux dépositaires centraux de titres (4.).

La discipline en matière de règlement a été l’un des sujets les plus sensibles tant lors de l’adoption du règlement CSDR qu’au stade de sa mise en œuvre. Pour assurer le bon fonctionnement des systèmes de règlement de titres et, partant, des marchés financiers européens, le règlement CSDR a prévu des mesures destinées à lutter contre les défauts de règlement – c’est-à-dire l’inexécution, totale ou partielle, de son obligation de règlement ou de livraison par un participant, quelle qu’en soit la cause7. La discipline en matière de règlement désigne ainsi les mesures qui visent à sanctionner le participant en cause, avec un système de sanctions pécuniaires8, et celles qui visent à remédier aux défauts de règlement, grâce au rachat d’office – les titres sont rachetés sur le marché afin que l’acheteur soit livré9.

Si les mesures d’apurement des suspens et l’application de sanctions pécuniaires ne sont pas en elles-mêmes nouvelles, la mise en œuvre du nouveau régime, détaillé par des textes de niveau 2, a nécessité de la part des dépositaires centraux des modifications de leurs systèmes informatiques notamment pour automatiser le calcul, l’application, le recouvrement et la redistribution des sanctions pécuniaires10, modifications particulièrement lourdes pour les dépositaires centraux utilisant une infrastructure de règlement commune, tel le système TARGET2-Securities (T2S). Les différentes mesures prévues au titre de la discipline de règlement impactent également les participants des systèmes de règlement de titres (notamment les entreprises d’investissement et les établissements de crédit participants), les contreparties centrales et les plates-formes de négociation. En raison de ces difficultés, accrues du fait de la pandémie de Covid-19, l’entrée en application du dispositif de sanctions pécuniaires a été repoussée au 1er février 202211, tandis que l’entrée en application du régime du rachat d’office a reportée sine die12, en attendant la révision du règlement CSDR.

Le règlement 2023/284513 introduit un certain nombre de modifications visant à rendre ce régime plus proportionné. Il est à noter que les dispositions relatives aux sanctions pécuniaires et au rachat d’office, auparavant réunies dans le même article, font désormais l’objet d’articles distincts (respectivement les articles 7 et 7 bis du règlement CSDR).

Sanctions pécuniaires. L’application du mécanisme de sanctions pécuniaires est désormais écartée lorsque le défaut de règlement est causé par des facteurs non imputables aux parties à la transaction – on songe notamment aux défauts dus à des sanctions internationales – ainsi que pour les opérations qui ne sont pas considérées comme des activités de négociation. Ces deux cas seront précisés par la Commission dans des actes délégués14.

Rachat d’office. La procédure de rachat d’office fait l’objet de modifications plus profondes. Le régime initialement prévu par le règlement 909/2014 a été finalement jugé excessivement rigoureux et risquant d’entraîner une réduction de la liquidité du marché, une augmentation des coûts pour les investisseurs et un désavantage concurrentiel pour les dépositaires centraux de titres de l’Union par rapport aux dépositaires centraux de titres de pays tiers qui n’y sont pas soumis15. En conséquence, en premier lieu, son champ d’application est considérablement réduit. La procédure de rachat d’office ne s’appliquera qu’à certains instruments financiers ou à certaines catégories de transactions sur ces instruments financiers, déterminés par la Commission dans un acte d’exécution. Il s’agit des instruments ou transactions pour lesquels cette procédure est considérée comme étant « un moyen nécessaire, approprié et proportionné de réduire le niveau des défauts de règlement dans l’Union », ce qui suppose que l’application des sanctions pécuniaires se soit avérée insuffisante et que le niveau des défauts de règlement dans l’Union soit susceptible d’impacter la stabilité financière de l’Union16. La procédure de rachat d’office devient donc un instrument subsidiaire, une mesure de dernier ressort17. La liste des instruments concernés sera réexaminée au moins tous les quatre ans, ce qui pourra conduire le cas échéant la Commission à modifier ou abroger l’acte d’exécution, de son propre chef ou sur recommandation de l’AEMF18. En deuxième lieu, pour les instruments financiers concernés, l’application de la procédure de rachat d’office est écartée dans les cas dans lesquels les sanctions pécuniaires le sont également, à savoir lorsque le défaut de règlement est causé par des facteurs non imputables aux parties à la transaction et pour les opérations qui ne sont pas considérées comme des activités de négociation19. En troisième lieu, la Commission se voit conférer la possibilité, sur recommandation de l’AEMF, de suspendre, par un acte d’exécution, le mécanisme de rachat d’office pour certaines catégories d’instruments financiers, en cas de grave menace pour la stabilité financière ou pour le bon fonctionnement des marchés financiers dans l’Union. Cette suspension est décidée pour une durée initiale maximale de six mois, prorogeable pour des périodes maximales de trois mois, dans la limite d’une durée totale de douze mois20. Il est à noter que si la suspension est publiée sur le site internet de la Commission ainsi qu’au Journal officiel, la recommandation de l’AEMF et, en cas de rejet, les motifs de rejet de la Commission, ne sont pas rendus publics. Enfin, le régime du rachat d’office est retouché, notamment pour permettre sa mise en œuvre par le participant destinataire final, de sorte qu’un seul rachat soit nécessaire pour dénouer l’ensemble de la chaîne de transactions21 ; et pour faire en sorte qu’en cas de différence de prix des instruments financiers entre la transaction initiale et la mise en œuvre du rachat, celui-ci soit économiquement neutre pour les deux parties22.

Renforcement de la coopération entre les autorités de surveillance23. Collèges d’autorités de surveillance. Le règlement 2023/2845 introduit diverses mesures visant à renforcer la coopération entre les autorités et améliorer la convergence des pratiques de surveillance, afin d’alléger les contraintes administratives (et les coûts afférents) pesant sur les dépositaires centraux de titres. Le règlement 909/2014 est modifié pour renforcer la coopération entre l’autorité de surveillance du dépositaire central, l’autorité chargée de la surveillance du système de règlement-livraison exploité par le dépositaire central et les banques centrales concernées. Une procédure d’avis motivé est ainsi introduite dans le cadre de la procédure d’agrément et du processus de réexamen24. L’autorité compétente devra se justifier si elle entend passer outre l’avis négatif d’une autre autorité concernée ; l’affaire pourra le cas échéant être portée devant l’AEMF dans le cadre de sa fonction de médiation non contraignante25.

Est également prévue la mise en place de collèges d’autorités de surveillance26, à l’image de ce qui existe déjà pour les contreparties centrales ou pour la surveillance sur base consolidée des établissements de crédit. Alors que la proposition de la Commission prévoyait un dispositif assez complexe distinguant deux types de collèges (un « collège de passeportage » et un « collège de groupe »)27, le règlement 2023/2845 prévoit un seul type de collège, sur la base d’un unique critère, lorsque les activités du dépositaire central dse titres « sont considérées comme revêtant une importance considérable pour le fonctionnement des marchés de titres et la protection des investisseurs dans au moins deux États membres d’accueil ». Le collège doit être établi lorsque l’autorité compétente de l’État membre d’origine, l’autorité compétente d’un État membre d’accueil dans lequel les activités du DCT revêtent une importance substantielle, l’ABE (lorsque le DCT est agréé pour fournir des services bancaires), l’AEMF ou l’une des autorités concernées visées à l’article 12, estime que les activités exercées par le DCT dans au moins deux États membres d’accueil revêtent une importance considérable. Ce collège est établi et présidé par l’autorité compétente de l’État membre d’origine et composé des autorités précitées. Il a principalement pour mission d’assurer les échanges d’informations, d’éviter les redondances et d’assurer la coopération entre les autorités des États membres d’origine et d’accueil28. Il peut adopter, à la majorité simple, des avis non contraignants sur des problèmes relevés au cours des processus de réexamen, des questions en matière d’externalisation ou d’extension des activités ou encore relativement à toute violation potentielle du règlement CSDR dans le cadre de la prestation de services dans un État membre d’accueil.

Allègement et clarification du régime du passeport européen. Les consultations menées ont fait émerger un consensus sur les incertitudes et la lourdeur excessive du régime du passeport européen des dépositaires centraux de titres, accrues par les divergences entre les pratiques des autorités dans la mise en œuvre de ce régime29.

Le régime actuellement en vigueur30 se démarque des régimes « classiques » de passeport en matière bancaire et financière en conférant un pouvoir de blocage non seulement à l’autorité de l’État membre d’origine, qui peut refuser de transmettre les informations à l’autorité de l’État membre d’accueil, mais aussi à cette dernière, ce qui est plus inhabituel dans un système qui repose sur le principe de la reconnaissance mutuelle et du home country control. L’autorité de l’État d’accueil peut en effet s’opposer à la fourniture, par un dépositaire central d’un autre État membre, de services portant sur des titres émis sous son droit national, si elle juge insatisfaisante l’évaluation des mesures que le dépositaire central envisage de prendre pour faire en sorte que ses utilisateurs respectent les dispositions du droit des sociétés ou les dispositions similaires de son droit en vertu desquelles les titres sont constitués31. Désormais, cette évaluation ne sera plus exigée que pour les actions, et non pour les autres types de titres financiers32. Par ailleurs, le pouvoir de blocage de l’autorité du pays d’accueil est supprimé. Cette autorité pourra seulement fournir un avis non contraignant à l’autorité du pays d’origine33. Les dispositions de l’article 24 relatives à la coopération entre autorités des États d’origine et d’accueil sont retouchées en conséquence34.

Le règlement lève par ailleurs des incertitudes en ce qui concerne le droit applicable lorsqu’un émetteur fait enregistrer ses titres par un dépositaire central de titres établi dans un autre État membre (et par voie de conséquence en ce qui concerne le périmètre des dispositions incluses dans l’évaluation précitée) : il s’agit non seulement des dispositions du droit des sociétés de l’État membre dans lequel l’émetteur est établi, mais aussi, lorsqu’elles sont distinctes (particulièrement en ce qui concerne les émissions obligataires), des dispositions en vertu desquelles les titres sont émis35. Les États membres, qui ont déjà l’obligation de dresser la liste de ces dispositions, devront en outre la tenir à jour, au moins tous les deux ans.

Assouplissement des règles relatives à la fourniture de services accessoires de type bancaire. La question de savoir si les dépositaires centraux de titres devaient être autorisés à fournir des services bancaires accessoires a fait l’objet d’importantes discussions lors de la préparation du règlement CSDR. En l’état, un dépositaire central de titres ne peut fournir de services accessoires de type bancaire, notamment proposer le règlement en espèces et en devises des transactions dans son système de règlement de titres, qu’à la condition d’être agréé comme établissement de crédit et d’obtenir un agrément supplémentaire délivré par son autorité de surveillance, ou de désigner à cette fin un établissement de crédit, lequel doit être un établissement ad hoc ne pouvant avoir d’autres activités, à moins que la valeur des paiements en espèces reste en-dessous de certains seuils, auquel cas il peut recourir à un établissement de crédit ordinaire36.

Le règlement 2023/2845 vient assouplir ce régime à plusieurs égards, pour permettre les règlements en devises nécessaires au développement de l’activité transfrontière des dépositaires centraux de titres qui ne sont pas agréés pour fournir des services bancaires37 (c’est-à-dire de la majorité des dépositaires centraux de titres de l’UE, puisque seuls quatre d’entre eux ont un agrément bancaire). Premièrement, le seuil en-dessous duquel un dépositaire central peut s’adresser à une banque commerciale est ajusté ; mandat est donné à l’Autorité bancaire européenne d’élaborer des projets de normes techniques de réglementation (ou RTS, Regulatory Technical Standards) sur ce point38. Deuxièmement, les dépositaires centraux de titres agréés pour la fourniture de services accessoires de type bancaire sont désormais autorisés à fournir de tels services à d’autres dépositaires centraux de titres39. Troisièmement, les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux dépositaires centraux de titres agréés pour fournir des services accessoires de type bancaire sont adaptées40. Les exigences prudentielles seront également précisées par des RTS élaborées par l’ABE.

Obligations de notification. Comme d’autres textes contemporains, notamment le règlement EMIR, le règlement CSDR a mis en place un régime d’équivalence destiné à permettre à un dépositaire central de titres établi dans un pays tiers de fournir le service notarial ou le service de tenue centralisée de comptes sur des instruments financiers constitués en vertu du droit d’un État membre sans avoir à obtenir un agrément dans l’Union. Ce régime repose sur les deux étapes classiques : décision d’exécution de la Commission européenne reconnaissant que le cadre juridique et le dispositif de surveillance du pays tiers concerné garantissent que les dépositaires centraux agréés dans ce pays respectent des exigences équivalentes à celles prévues par la réglementation de l’Union, puis reconnaissance du dépositaire central de pays tiers par l’AEMF41. Les dépositaires centraux de titres de pays tiers qui fournissaient des services dans l’Union avant l’entrée en vigueur du règlement CSDR peuvent continuer à le faire jusqu’à ce qu’une décision soit prise sur leur agrément ou leur reconnaissance42.

Le régime d’équivalence n’est pas remanié en profondeur par le règlement 2023/2845, à la différence de ce qui a été fait lors de la révision du règlement EMIR, sans doute parce que les enjeux ne sont pas les mêmes à ce jour – ce régime d’équivalence n’a été mis en œuvre qu’une fois, à l’occasion du Brexit43 – et que l’on manque encore d’informations sur les services effectivement fournis dans l’Union par des dépositaires centraux de titres de pays tiers44. Pour pallier ce manque d’informations, le règlement 2023/2845 instaure une obligation de notification à l’AEMF, d’une part, pour les dépositaires centraux de titres de pays tiers qui envisagent de fournir des services de règlement portant sur des instruments financiers constitués en vertu du droit d’un État membre (les informations à fournir seront précisées dans des RTS)45 et, d’autre part, pour ceux qui fournissent déjà des services en bénéficiant de la clause d’antériorité. Par ailleurs, pour mettre fin aux conditions de concurrence inégale résultant de cette clause, une « date d’expiration » est ajoutée, fixée au 17 janvier 202746.

Adaptations concernant la supervision et les exigences prudentielles et organisationnelles. L’évaluation périodique des dépositaires centraux de titres en activité ne sera plus annuelle mais triennale47. Les exigences organisationnelles et prudentielles sont par ailleurs complétées pour tenir compte de certaines situations particulières. Tel est le cas des règles organisationnelles, pour appréhender les risques de conflits d’intérêts lorsqu’un dépositaire central a l’intention de fournir des services accessoires de type bancaire à d’autres dépositaires centraux (les règles et procédures à mettre en œuvre seront précisées dans des RTS)48. Tel est également le cas des exigences prudentielles, pour prendre en compte les risques de crédit et de liquidité découlant de la mise en œuvre par un système de règlement de titres d’un mécanisme de règlement différé49, dans lequel les ordres de transfert des participants font l’objet d’une compensation, le règlement des créances et obligations nettes des participants ayant lieu à la fin de cycles de règlement prédéfinis au cours ou à la fin du jour ouvrable50. Les modalités de la mesure, du suivi, de la gestion et de la déclaration de ces risques seront précisées dans des RTS51.

Plans de redressement et de liquidation ordonnée. Il n’est plus exigé des dépositaires centraux de titres qui n’ont pas la qualité d’établissement de crédit qu’ils se dotent d’un plan de résolution (il n’existe pas à ce jour de régime de résolution pour les dépositaires centraux de titres), mais de plans de redressement et de liquidation ordonnée52. Les dépositaires centraux de titres qui relèvent de la directive 2014/59/UE53 et qui à ce titre sont dotés d’un plan de redressement et d’un plan de résolution, sont logiquement dispensés d’élaborer les plans de redressement et de liquidation ordonnée prévus par le règlement 909/201454.

Contrôle des acquisitions de participations qualifiées. Il s’agit d’un ajout important, qui ne figurait pas dans la proposition de la Commission. Les dispositions relatives aux organes de direction ainsi qu’au contrôle de l’actionnariat sont considérablement étoffées. Auparavant sommairement traitées à l’article 27 du règlement CSDR, elles font désormais l’objet des articles 27 à 27 quater. Une obligation de notifier à l’autorité compétente tout changement dans la direction est prévue55. Une procédure de contrôle des acquisitions de participations qualifiées56, calquée sur celle applicable aux contreparties centrales57, elle-même inspirée de celle applicable aux établissements de crédit58, est mise en place. Ces nouvelles exigences ne s’appliquent pas aux dépositaires centraux de titres agréés pour fournir des services bancaires et soumis à la directive 2013/3659, puisqu’ils sont déjà à ce titre soumis à des exigences similaires.

Entrée en application, textes de niveau 2 et modifications ultérieures. Le règlement 2023/2845 est entré en vigueur le 17 janvier 2024. Par exception, l’entrée en application de certaines dispositions est différée au 17 janvier 202660, car elle nécessite l’adoption de normes techniques de réglementation. Il est à noter à cet égard que le règlement 2023/2845 confère de nombreux nouveaux mandats à la Commission européenne, pour l’adoption d’actes délégués, et aux autorités européennes de surveillance (AEMF ou ABE selon les cas), pour l’élaboration de projets de RTS ainsi que pour l’adoption d’orientations.

Le nouveau règlement illustre par ailleurs une autre tendance lourde du droit de l’Union en matière bancaire et financière, en ce qu’il préfigure des modifications ultérieures des textes. Il comporte ainsi une clause de réexamen (au plus tard en janvier 2029) 61 et prévoit que l’AEMF, outre les rapports périodiques qu’elle doit remettre à la Commission pour rendre compte de l’application de certaines dispositions (notamment sur l’efficacité des sanctions pécuniaires), remette au Parlement européen et au Conseil, au plus tard le 17 janvier 2025 puis tous les deux ans, un rapport sur l’évaluation relative à l’éventuel raccourcissement du délai de règlement livraison (actuellement de J+2). Les États-Unis, qui sont passés à J+2 plus tardivement que les pays européens, vont passer, ainsi que le Canada, à J+1 au printemps 2024. D’autres pays l’ont déjà fait ou envisagent de le faire62. Dans ce contexte, il s’agira d’évaluer l’opportunité de passer à un cycle plus court (J+1, voire J+0) et d’avoir « une vue d’ensemble de l’évolution internationale des cycles de règlement et de leur incidence sur les marchés des capitaux de l’Union »63. n

À retrouver dans la revue
Banque et Droit Nº213
Notes :
1 Règl. PE et Cons. (UE) n ° 909/2014 du 23 juill. 2014 concernant l’amélioration du règlement de titres dans l’Union européenne et les dépositaires centraux de titres, et modifiant les directives 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le règlement (UE) n° 236/2012 (JO L 257 du 28 août 2014, p. 1).
2 Cf. T. Bonneau, P. Pailler, A.-C. Rouaud, A. Tehrani et R. Vabres, Droit financier, LGDJ, 4e éd., 2023, n° 7399 et s. ; A.-C. Rouaud et F. Palmieri, « Dépositaires centraux de titres et systèmes de règlement-livraison de titres », Étude Joly Bourse.
3 Communication de la Commission, « Une union des marchés des capitaux au service des personnes et des entreprises – nouveau plan d’action, », COM(2020) 590 final, action n° 13.
4 Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil établi en application de l’article 75 du règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l’amélioration du règlement de titres dans l’Union européenne et les dépositaires centraux de titres, 1er juill. 2021 (COM(2021) 348 final).
5 Règl. PE et Cons. (UE) n° 648/2012 du 4 juill. 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux.
6 Prop. de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n°909/2014 en ce qui concerne la discipline en matière de règlement, la fourniture transfrontière de services, la coopération en matière de surveillance, la fourniture de services accessoires de type bancaire et les exigences applicables aux dépositaires centraux de titres de pays tiers (COM(2022) 120 final) ; Banque et Droit n° 204, juill.-août 2022, p. 54, note A.-C. Rouaud.
7Art. 2, § 1, 15° et 26° CSDR.
8Art. 7 CSDR.
9 Cf. T. Bonneau, P. Pailler, A.-C. Rouaud, A. Tehrani et R. Vabres, Droit financier, préc., n° 1378.
10 Cf. Règl. dél. Comm. UE n° 2018/1229 du 25 mai 2018 complétant le règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation concernant la discipline en matière de règlement.
11 Règl. dél. Comm. (UE) 2020/1212 du 8 mai 2020 et 2021/70 du 23 octobre 2020.
12 Son entrée en application a été reportée à celle des mesures de niveau 2 qui seront adoptées sur la base du règlement révisant le règlement CSDR : art. 17, règl. PE et Cons. (UE) 2022/858 du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, et modifiant les règlements (UE) n° 600/2014 et (UE) n° 909/2014 et la directive 2014/65/UE (JO L 151 du 2.6.2022, p. 1). AEMF, Final Report, CSDR RTS on Settlement Discipline – Suspension of Buy-in, 2 juin 2022 (ESMA70-126-5011).
13 Art. 1er, point 3.
14 Art. 7 § 3 CSDR dans sa nouvelle rédaction.
15 Cf. Rapport Commission préc.
16 Nouvel art. 7 bis, § 1er CSDR.
17 Cf. cons. 10 du règl. 2023/2845.
18 Nouvel art. 7 bis, § 14 CSDR.
19 Nouvel art. 7 bis, § 7 CSDR.
20 Nouvel art. 7 bis, § 13 CSDR.
21 Nouvel art. 7 bis, § 6 CSDR.
22 Nouvel art. 7 bis, § 8 CSDR.
23 Art. 22 CSDR.
24 Respectivement art. 17 § 4 et art. 22 § 6 CSDR dans leur nouvelle rédaction.
25Médiation prévue à l’article 31 § 2, c) du règl. (UE) 1095/2020.
26 Nouvel art. 24 bis CSDR.
27 Art. 1er, point 9 de la proposition de règlement.
28 Nouvel article 24 bis, § 8 CSDR.
29 Cf. Commission européenne, rapport préc. ; Rapport de l’AEMF à la Commission européenne, «Cross-border services and handling of applications under Article 23 of CSDR», 5 nov. 2020 (ESMA70-156-3569).
30 Art. 23 CSDR.
31 Art. 23, § 6, a) CSDR.
32 Art. 23, § 3, d) CSDR, dans sa nouvelle rédaction.
33 Art. 23, § 5 CSDR, dans sa nouvelle rédaction.
34 Cf. égal. cons. 25.
35 Art. 49, § 1er CSDR, dans sa nouvelle rédaction.
36 Art. 40 et art. 54 CSDR.
37 Cf. Rapport de l’AEMF à la Commission européenne, « Provision of banking-type ancillary services under CSDR », 8 juill. 2021 (ESMA70-156-4582).
38 Art. 54, § 5 et 9 CSDR, dans leur nouvelle rédaction. Cf. égal. cons. 37.
39 Art. 54, nouveau § 2 bis et art. 55, § 1 et 2 dans leur nouvelle rédaction.
Cf. égal. cons. 36.

40 Art. 59, § 4 CSDR dans sa nouvelle rédaction et art. 59, nouveau § 4 bis.
41 Art. 25 CSDR.
42 Art. 69 CSDR.
43 Cf. A.-C. Rouaud, « Brexit et infrastructures de post-marché », Banque et Droit n° 196, mars-avril 2021, p. 28.
44 Commission européenne, rapport préc.
45 Art. 25, nouveau § 2 bis et nouveau § 13.
46 Art. 69, nouveau § 4 bis.
47 Art. 22, § 1er, point 6, prop. règl.
48 Art. 26, § 2, nouvel al. 2 et § 9 CSDR.
49 Nouvel article 47 bis CSDR et cons. 32.
50 Art. 2, § 1er, nouveau 50° CSDR.
51 Nouvel art. 47 bis, § 3.
52 Nouvel article 22 bis.
53 Dir. PE et Cons. 2014/59/UE du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (dite BRRD).
54 Nouvel art. 22 bis, § 7, in fine.
55 Nouvel art. 27 bis, § 1er CSDR.
56 Nouveaux art. 27 bis § 2 à 9 et 27 ter CSDR. Cf. égal. cons. 29.
57 Art. 31 et 32 d’EMIR.
58 Art. 22 à 27, dir. PE et Cons. 2013/36/UE du 26 juin 2013 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement. Cf. J. Stoufflet et A.-C. Rouaud, Droit bancaire, LexisNexis, 10e éd., 2023, spéc. n° 296.
59 Nouvel art. 27 quater CSDR.
60 Art. 3, règl. 2023/2845.
61 Art. 75 CSDR, dans sa nouvelle rédaction.
62 Cf. AEMF/ESMA, Call for Evidence on Shortening the Settlement Cycle, oct. 2023 (ESMA74-2119945925-1616).
63 Art. 75, § 3 CSDR.
RB