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Économie

Un euro… moins allemand ?

Créé le

15.11.2011

-

Mis à jour le

29.11.2011

L’euro est l’une des constructions interétatiques les plus désastreuses de l’histoire contemporaine et l’échec le plus flagrant de toute la construction européenne. Lors de la dernière décennie (2001-2010), la croissance annuelle moyenne de la zone a été de 1,1 %, soit la décennie la plus faible depuis 1945 (2,2 % durant les années 1990, 2,4 % dans les années 1980, 3,4 % dans les années 1970). La croissance par tête a été la plus faible des grandes zones développées. Certes, l’euro n’est pas l’unique responsable de ce déclin. Mais en supprimant la contrainte d’équilibre extérieur de chaque pays, il a instauré un mécanisme de protection illusoire en annihilant l’esprit de réformes au lieu de le stimuler. Il a ainsi favorisé, via la thématique de la pseudo-convergence, une baisse excessive des taux pour la plupart des pays, d’où un financement sans pleurs des déficits publics et/ou des bulles immobilières. Il s’est aussi et surtout traduit par un mode de gouvernance défaillant, qui s’explique principalement par la vision allemande de l’euro. La BCE a toujours mené une politique passéiste et anachronique, axée sur la lutte contre un risque inexistant sur les 20 dernières années, l’inflation, en passant à côté de tous les déséquilibres et bulles d’actifs à l’origine de nos difficultés. Comment aussi se plaindre aujourd’hui de la désindustrialisation, alors que c’est la démission politique vis-à-vis de l’Allemagne, via la BCE et son euro fort (depuis 2001), qui y a pour une part contribué ?

Durant la crise de la dette souveraine, l’emprise allemande a pris une proportion extravagante. L’Allemagne a, à chaque fois, ralenti les initiatives en matière de mutualisation européenne. De ce fait, l’Europe a « réussi » depuis 2 ans à faire de la Grèce (0,3 % du PIB mondial) un problème systémique international. Parmi les autres « exploits » européens, voici une zone qui a 3 ou 4 pays en situation de quasi-faillite et dont la Banque Centrale – la seule dans ce cas parmi les grandes zones développées – relève ses taux, fait s’apprécier la monnaie et rechigne à racheter de la dette des pays affaiblis. La Banque d’Angleterre ou la Fed (dont les États ne sont pourtant pas proches d’un défaut) ont respectivement racheté en dette publique l’équivalent aujourd’hui de 14 et 6 % du PIB contre… 2 % en zone euro. C’est enfin l’Allemagne qui est à l’origine du retour à la logique bête et comptable du Pacte de stabilité, construction uniforme, arbitraire et pro-cyclique qui ne peut que renforcer les enchaînements récessifs, réduisant ainsi encore plus la croissance potentielle européenne.

 

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº742
RB