Square

Innovation

Société Générale mise sur la blockchain publique

Créé le

23.05.2019

-

Mis à jour le

28.05.2019

Le groupe bancaire a réussi sa première émission d’obligation sécurisée sous forme de security tokens sur la blockchain Ethereum.

Société Générale SFH, filiale de Société Générale, a mené à bien, le 18 avril dernier, l’émission de 100 millions d’euros d'obligations sécurisées sous forme de security tokens, directement enregistrées sur la blockchain Ethereum. La transaction a été mise en œuvre sur la plateforme développée par Forge, l'une des 60 start-up internes du programme intrapreneurial du groupe, « Internal Startup Call ». « L’idée initialement présentée à la direction générale était d’explorer ce que la blockchain pouvait apporter au groupe, alors que la réglementation prend forme, retrace Jean-Marc Stenger, directeur général de Société Générale Forge. Il fallait concevoir un business de rupture, doté d’un potentiel de transformation à l’échelle du groupe. » La phase d’incubation du projet a été prolongée afin de poursuivre le développement du business model dans le sillage de la loi PACTE, qui instaure un nouveau régime pour les crypto-actifs en France. « Société Générale veut être en mesure d’établir un nouveau standard d'émission et de négociation sur le marché secondaire standard, souligne Frédéric Oudéa, directeur général du groupe. Les solutions disruptives de Société Générale Forge nous ouvrent des perspectives nouvelles d’utilisation des crypto-assets, de tokenisation et de virtualisation de transactions. »

Un schéma d'émission intégré, automatisé, sécurisé

La rapidité d’exécution constitue le principal atout de cette technologie. « Aujourd’hui, il faut deux à quatre jours pour exécuter une émission obligataire classique. Avec une obligation sous forme de token, le titre passe de portefeuille à portefeuille en moins de dix minutes », précise Jonathan Benichou, cofondateur de l’équipe Société Générale Forge. Certaines interventions techniques ne sont alors plus nécessaires. « Le schéma d’émission est totalement intégré et automatisé, le process sécurisé », explique Vincent Robillard, responsable du funding du groupe. Si le support de l’émission est numérique, l’actif reste le même : il s’agit d’obligations de financement de l'habitat ou « OFH », directement enregistrées sur la blockchain Ethereum. « Juridiquement, l’OFH Token a les mêmes droits et obligations que l’OFH classique », insiste Jonathan Benichou. D’autres banques ont lancé des initiatives comparables, telles que JP Morgan et son JPM Coin, émis sur sa blockchain maison Quorum. « Mais ces banques utilisaient jusqu’à présent des blockchains privées et fermées, nuance Jonathan Benichou. Notre plus-value est d’émettre sur une blockchain publique, Ethereum. S’il faut demain opérer sur Tezos, Hyperledger ou sur une tout autre technologie, notre plateforme d’émissions le permet. »

Avec la technologie dite de « registre distribué », le groupe entend développer de nouvelles activités. « Si ce marché venait à se développer, nous envisageons à terme d’utiliser la blockchain comme un canal de distribution, complémentaire au circuit d’émission obligataire standard », assure Vincent Robillard. Ce schéma de distribution constitue un marché de niche aujourd’hui, mais « il pourrait se développer au regard de l’intérêt que cela a suscité auprès d’investisseurs ». Pour cette première opération à valeur de test, le groupe bancaire s’était lui-même positionné comme investisseur. « Notre objectif est de proposer ce type d’émission, d’obligations sécurisées, mais aussi d’obligations “senior unsecured”, à des investisseurs externes », révèle Vincent Robillard.

Une offre de services qui reste à construire

La plateforme blockchain de Forge a vocation à s’ouvrir à toute la communauté financière. Mais l'offre de services reste à construire. « Les besoins de nos clients ne sont pas encore parfaitement formalisés », résume Jean-Marc Stenger. Le directeur général de Forge estime toutefois que la blockchain va radicalement transformer le secteur bancaire. « Pendant deux ans, nous avons travaillé sur l’acculturation à la technologie blockchain dans les différents services, métiers et fonctions. Le coût d’entrée intellectuel est élevé, mais l’invention a un très fort potentiel. » D’autres projets liés à la blockchain ont déjà été lancés par le groupe bancaire, tels que we.trade, plateforme dédiée au financement de commerce international pour les entreprises clientes du groupe en France, ou Komgo SA, plateforme de digitalisation du commerce de matières premières.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº833
RB