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Six leviers RH pour sécuriser la transformation bancaire

Créé le

14.03.2022

Le secteur de la banque a vécu, ces vingt dernières années, des bouleversements majeurs. Ils entraînent une modification profonde des emplois et des compétences. L’attractivité apparaît donc comme l’un des éléments clés de la transformation bancaire.

Le monde bancaire et ses emplois se transforment à grands pas, au rythme des évolutions technologiques. Elles permettent de gagner en efficacité et en compétitivité en digitalisant ou en automatisant certaines tâches et activités. Ces mouvements s’ajoutent à une autre forme de transformation enclenchée depuis le début des années 2000 : la nécessité pour les organisations bancaires de mieux intégrer dans leurs pratiques la gestion des risques opérationnels et financiers, ainsi que la conformité.

Dans ce contexte, les établissements bancaires doivent relever des enjeux importants. Ils impactent tous les métiers, des activités de marché au retail banking, en passant par l’asset management et le consumer ou le wealth banking. D'une part, il leur faut se doter d’une capacité d’innovation robuste afin de pouvoir automatiser les tâches les plus simples, dématérialiser et fluidifier les processus au rythme des attentes des clients. Cela passe par une plus forte intégration des relations entre back/middle et front office, par l’usage du Big Data management, de l’intelligence artificielle ou de la blockchain. D'autre part, il leur faut gagner en satisfaction client par la proximité et le niveau d’expertise fourni. Le respect de la confidentialité des données et, plus globalement, celui des réglementations bancaires constituent une autre condition indispensable au renforcement de la confiance des clients.

Afin de répondre aux enjeux du secteur, il est donc devenu vital de décliner auprès de l’ensemble des professionnels de la banque une base commune de compétences à partir du triptyque suivant :

– l’acculturation à la digitalisation et à l’automatisation des tâches ;

– l’intégration de la conformité et de la gestion du risque ;

– l’expertise métier au bénéfice du client.

Le développement durable et la responsabilité sociale sont aussi devenus des composantes incontournables que le collaborateur bancaire doit prendre en compte dans son métier, qu’il soit trader ou responsable RH. Voici six leviers à exploiter pour réussir la transformation de la banque, sachant par ailleurs que le secteur est de plus concurrencé (voir encadré).

1. Avoir des collaborateurs aux multiples casquettes

Concrètement, le collaborateur doit à la fois se montrer un expert prêt à proposer des produits et des services personnalisés de manière instantanée, un pédagogue financier accompagnant le client dans sa compréhension des produits et des marchés, un interlocuteur agile capable de communiquer aussi bien avec des clients technophiles via une plateforme en ligne qu’en proximité avec des clients seniors ou réticents à toute technologie, un technicien intégrant dans sa pratique une culture du contrôle et les aspects juridiques de son domaine !

En pratique, les impacts diffèrent en fonction du domaine d'activité. Ainsi, les conseillers clientèles en banque de détail ont vu leur rôle évoluer considérablement. Ils doivent désormais répondre à des clients en forte attente de services personnalisés et pointus, mais aussi d’expériences utilisateurs distinctives. Ceci dans un environnement où les échanges entre la banque et son client se sont complètement digitalisés. Sur les activités de marché, le métier d’agent front office est, lui, forcément impacté par la pratique du trading algorithmique qui, par la rapidité d’exécution de passages d’ordres à gros volume, permet de démultiplier des gains sur des produits à faible marge. Quant aux métiers du back office, ils sont amenés à fortement changer, voire à disparaître du fait de la prise en charge de la gestion manuelle des données par la technologie.

2. Maintenir, si possible, l’employabilité

Pour faire face à ces évolutions, dans certaines activités, les établissements ont mené des opérations importantes de formation des collaborateurs impactés afin de faire évoluer leur compétences (upskilling) et de les renouveler (reskilling). Gare toutefois aux illusions…

L’up/reskilling possède un intérêt certain sur des postes où le collaborateur peut être opérationnel – et surtout compétitif ! – dans un temps très court afin de se distinguer vis-à-vis des jeunes professionnels intégrant le secteur. Ainsi, des opérations d’up/reskilling sur les métiers supports transverses (par exemple, pour devenir un « comptable digitalisé ») ou dans la banque de détail peuvent donner des résultats intéressants car ce sont des métiers accessibles et potentiellement répétitifs dans les tâches. La durée d’acquisition du nouveau modèle de compétences a donc de forte chance d’être courte.

En revanche, la technicité et la complexité des métiers de front office et des activités de marché rendent ces opérations d’up/reskilling relativement inefficaces. Cette fois, le temps nécessaire à l’apprentissage et à la maîtrise parfaite de la compétence technique va à l’encontre de l’exigence de performance à court terme caractérisant ce type d’activités bancaires.

3. Attirer les nouveaux talents au-delà du salaire

À défaut de mise à niveau du personnel existant, la gestion de la mutation des emplois doit se traduire principalement par une politique de recrutement soutenue afin de favoriser le renouvellement de l’expertise. Se pose alors la question des conditions de l’attractivité. Aujourd’hui, elles dépassent les traditionnelles réflexions autour des niveaux de rémunération du secteur.

Les institutions bancaires doivent ainsi démontrer leur implication en matière de RSE, notamment la place qu’elles occupent et le rôle qu’elles jouent dans un monde économique et une société en quête de sens. Elles doivent montrer aux professionnels du secteur leur capacité à contribuer à la construction du « moi » en tant que membre actif d’une humanité et d’un collectif sociétal. Les banques ont par exemple énormément travaillé à l’hybridation de l’organisation du travail pour mieux répondre aux (futurs) collaborateurs soucieux de pouvoir travailler à distance. La décarbonation de leurs activités, le respect environnemental, l’engagement social, la qualité de vie sont aussi des défis que les acteurs du secteur veulent relever par le pacte social qui les lie aux collaborateurs. Les accords sociaux « verts » sont aujourd’hui plus que jamais d’actualité.

4. De meilleurs managers, malgré la pression

Mais ce n'est pas tout. La banque doit aussi garantir des pratiques managériales responsables. La transformation de la banque de détail et la diminution d’agences physiques peuvent se traduire aujourd’hui par une raréfaction de la ligne managériale. Celle-ci se voit attribuer une couverture et une responsabilité géographique plus grande. À cela, s'ajoutent la pression concurrentielle, la complexité réglementaire, la contrainte des objectifs commerciaux et l’animation des équipes. Cette situation peut être le terreau de risques psychosociaux pour les collaborateurs, mais aussi pour leurs managers de proximité.

Le manager en banque de détail se trouve donc aujourd’hui en première ligne sur plusieurs fronts. La tâche n’est pas aisée et la robustesse managériale nécessaire ne peut s’acquérir que par un travail de fond. Tout d’abord, il est important que le manager prenne conscience de son rôle et du sens qu’il doit lui donner. La méthode et l’organisation pour gagner en efficacité se révèlent bien entendu indispensables. À travailler également, la maîtrise de soi et la résilience. En effet, le manager doit veiller à ne pas diffuser telle quelle la pression du résultat qu’il subit lui-même vers ses collaborateurs et être en mesure de faire face à la complexité de l’organisation. Enfin, doit être développée l’écoute active vis-à-vis des collaborateurs, pour à la fois maintenir leur engagement et maîtriser les risques psychosociaux. Les banques travaillent beaucoup sur le rôle de manager coach qui valorise et donne confiance au collaborateur.

5. Exploiter la carte de la diversité

Enfin, la banque doit faire face à deux enjeux sociétaux importants :

– d'une part, la maîtrise des codes d’une clientèle mais aussi d’un corps social représentatifs de l’immense diversité de notre société, une diversité générationnelle, culturelle, religieuse, ethnique, sociale et de genre de plus en plus affirmée ;

– d'autre part, la présence nécessaire dans les territoires reculés ou dits défavorisés pour avoir accès à une autre clientèle.

Afin de répondre à ces enjeux, les banques ont pris à bras-le-corps l’intégration des minorités culturelles dans le cadre de leur politique de recrutement, notamment dans les activités de réseau. Là encore, le manager apporte une contribution essentielle : la maîtrise de l’inclusion devient donc fondamentale afin d’apprendre à tirer parti du meilleur de la diversité dans son ensemble malgré les différences.

6. Démontrer sa capacité à se transformer de manière responsable

Après avoir profité des effets du papy-boom en 2007-2008, le secteur bancaire a dû trouver d’autres solutions sociales pour faire évoluer la capacité de production RH. Il s'agit de solutions responsables ne mettant pas à mal l’image de l’institution ni le lien de confiance avec les collaborateurs : les employeurs favorisent désormais le volontariat en mobilité dans leur politique d’adaptation des ressources.

 

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº867