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Sur le terrain

Le prêt aux PME à l’heure de l’innovation

Créé le

19.11.2012

-

Mis à jour le

27.11.2012

Grâce à des partenariats avec des régions, des gérants d'actifs et/ou des assureurs, les banques tiennent compte des contraintes réglementaires, tout en demeurant présentes dans les nouveaux dispositifs de financement.

Réelle ou ressentie, la timidité des banques à octroyer des prêts aux PME et ETI inspire des schémas de financement innovants.

Pour Simon Munsch, secrétaire général de la région Pays de la Loire, la réticence des établissements de crédit à prêter date du début de la crise : « les entreprises trouvent des financements, mais pas suffisamment ». Aussi, dès 2008, cette région a décidé d'encourager les banques en prêtant à leurs côtés et en offrant des garanties.

Une première opération a permis d'afficher un bilan de 130 dossiers financés entre fin 2009 et octobre 2012. Un second millésime a donc été lancé. Le 20 octobre dernier, la région a bouclé l'étape indispensable de la levée de fonds auprès d'institutionnels (qui ont apporté 28 millions d'euros) mais aussi des particuliers de la région. Ceux-ci ont souscrit à hauteur de 87 millions d'euros à l'émission obligataire lancée par la région qui a besoin de fonds pour financer son initiative. Les obligations ont été distribuées par les établissements bancaires, acteurs indispensables au dispositif en raison également de leur connaissance des entreprises. « Ce sont les banques qui instruisent les dossiers de demande de financement présentés par les entreprises, explique Simon Munsch. Si le comité d'engagement de la banque décide d'octroyer une partie du financement, alors nous acceptons d'apporter le complément. » Le partage est parfois de 50/50 mais le plus souvent la banque prend en charge 75 %, la région 25 %. Dans les deux cas de figure, le prêt accordé par la banque est garanti à hauteur de 70 % par la région et par Oséo.

« Toutes les banques présentes dans la région participent à l'opération », affirme Simon Munsch. BPCE, Crédit Agricole, Crédit Mutuel-CIC, BNP Paribas, Société Générale et Crédit Lyonnais étaient présents dès la première édition et réitèrent l'expérience. Certes, la distribution des obligations a pu faire hésiter les établissements bancaires (à l'heure où les réseaux tentent d'orienter l'épargne des clients vers les placements bilanciels), mais la perspective des prêts accordés en partenariat avec la région est de nature à faire passer la pilule.

Une région qui porte le risque

Grâce à ce dispositif - en vigueur également, sous des formes similaires, dans d'autres régions –, les banques prennent donc un risque très mesuré, tout en demeurant au cœur du financement des entreprises. Quant aux porteurs d'obligations, ils ne prennent aucun risque, à en croire Simon Munsch : « Le remboursement des obligations est pour la Région une dépense obligatoire. » Le risque est donc porté par la Région et par Oséo. Mais pour l'instant, estime Simon Munsch, « les incidents de paiement en provenance des entreprises sont rares. J'en dénombre 2 sur les 130 premiers dossiers. »

Autres schémas novateurs, cette fois imaginés par Société Générale et par BNP Paribas : dans les deux cas de figure, les prêts sont davantage portés par des investisseurs institutionnels, et moins par les établissements bancaires.

La banque rouge et noire a noué un partenariat avec AXA France. L'assureur cherche en effet à investir dans des prêts accordés aux entreprises. Dans ce contexte, la banque a proposé à Sonepar (acteur mondial de la distribution de matériel électrique) d'être financé en partie par AXA. Après avoir obtenu l'accord de l'entreprise, l'établissement bancaire a transmis les informations financières la concernant à AXA, sous couvert de confidentialité. Puis une négociation entre les trois parties s'est engagée pour définir le montant du crédit, le taux et l'échéance.

Un nouveau rôle pour les assureurs

Dans cette opération rendue publique en octobre dernier. AXA a souscrit 80 % du prêt. « Les 20% conservés par la banque permettent d'aligner nos intérêts avec ceux de l'investisseur, explique Société Générale Mid Cap Investment Banking. Cette part nous permet également d'avoir la main en cas d'incident de paiement, ce dont l'investisseur préfère se délester. »

Les schémas comme celui-ci, de type « originate to distribute », tendent à se développer et font généralement intervenir un gérant d'actifs. Par exemple, BNP Paribas IP (Investment Partners), la filiale de gestion d'actifs de la banque de la rue d'Antin, gère un fonds commun de placement baptisé BNP Paribas France Crédit dévoilé à la presse en novembre dernier et alimenté (à hauteur de 250 millions d'euros sur 3 ans) par BNP Paribas Cardif, la filiale d'assurance vie et dommages du groupe. Celle-ci souhaite, via ce véhicule, financer des entreprises françaises de taille moyenne. Le fonds va donc investir principalement sur des titres de créances correspondant à des prêts octroyés à des entreprises de ce type. Ces prêts ont été originés par la BFI de BNP Paribas, puis sélectionnés par l'asset manager. Ici aussi, un alignement d'intérêt est recherché, notamment via la conservation, par la BFI, d'une partie du prêt.

BNP Paribas IP travaille déjà à la création d'autres fonds de ce genre, ouverts à d'autres investisseurs et pouvant acquérir des prêts originés par d'autres banques.

Les assureurs, qui cherchent à diversifier leurs placements au travers d'actifs procurant des rendements intéressants, pourraient bien prendre le relais des banques dans le financement des PME et de l'économie en général.

Le tête à tête banque-entreprise semble ainsi prendre fin. Des partenaires s'invitent à la table : assureurs, asset managers, régions... L'effet sur les taux n'est pas toujours le même. Les prêts octroyés par les Pays de Loire sont à taux bonifié. L'intervention des investisseurs et des gérants d'actifs n'a sans doute pas le même effet déflationniste. S. G.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº754