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Incomplétude de la monnaie unique

Les solutions fédéralistes des partisans de l’euro

Créé le

20.10.2017

-

Mis à jour le

27.10.2017

Lorsque les Européens s’attelèrent à la construction d’une union monétaire, sans aucune forme de mise en commun de leurs dettes publiques ou de mécanismes de solidarité budgétaire, énormément de spécialistes internationaux exprimèrent leur surprise et leur scepticisme. Il leur semblait difficile qu’une union monétaire puisse fonctionner sans un minimum de fédéralisme fiscal. La crise des dettes souveraines des pays de la zone euro a ensuite confirmé la validité de ces critiques. Sans mise en commun au moins partielle du financement des États, et puisque les dépréciations compétitives sont impossibles, tout choc asymétrique oblige les pays concernés à des mesures d’austérité sévère qui induisent ensuite des tendances récessives chez les autres. Et cette situation est aggravée par l’interdiction du principe même d’un financement monétaire des gouvernements par la BCE, puisque les marchés exigent alors, des pays en détresse, des taux d’intérêt onéreux. L’opinion qu’il faudrait réformer la zone euro pour y adjoindre une forme de fédéralisme fiscal est donc maintenant largement répandue. Pour que cela soit efficace, il est obligatoire qu’un budget commun de la zone euro ait une taille significative en proportion du PIB de la région. Les suggestions qui circulent ont une ampleur insuffisante de ce point de vue, mais ce serait une première étape politique. Au départ, une petite partie des budgets nationaux, qui porterait par exemple sur des investissements publics d’infrastructure, pourrait être mise en commun, avec un financement par émission obligataire partagée. D’autre part, la crédibilité de l’assurance des dépôts bancaires exige qu’elle soit mise en commun, et donc que l’union bancaire soit complétée, ce qui représente une autre forme de solidarité. Toutes ces propositions se heurtent toutefois à l’opposition de l’Allemagne et de quelques autres pays. Les persuader de réformer la zone euro est une entreprise très compliquée.

Une manière complémentaire de renforcer la zone euro prend la forme de réformes législatives pour unifier le marché des capitaux. Ce sont des initiatives législatives pour accroître les possibilités de titrisations, favoriser la libre circulation des capitaux, encourager les placements en fonds de pension ou unifier les procédures judiciaires de traitement des entreprises en défaut sur leurs emprunts. L’objectif est d’augmenter sensiblement les opportunités de financement des entreprises de la zone euro, et ainsi de stimuler leurs investissements. De quelque pays qu’elles soient, les entreprises auraient accès à l’épargne de l’ensemble de la zone euro. Ce but semble toutefois très ambitieux. Depuis la crise financière, la fragmentation financière de la zone euro persiste. Elle se manifeste d’ailleurs par les déséquilibres croissants des comptes TARGET2 des banques centrales nationales. Les capitaux des pays du centre répugnent à financer les débiteurs des pays de la périphérie. Comme les comportements des investisseurs dépendent avant tout de leur perception des risques, il est incertain que des réformes législatives d’unification du marché des capitaux suffisent à inverser cette tendance. À ce titre, une mise en commun partielle des budgets publics est une condition impérative pour rétablir la confiance.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº813