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Change et Taux

La leçon à tirer des années 1930

Créé le

14.06.2012

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Mis à jour le

25.06.2012

De fin 1946 à fin 2006, le PIB réel des États-Unis aura fluctué dans un étroit tunnel haussier (autour d’un trend à +3,5 % annualisé). 2007 fut une vraie cassure : le PIB a subi alors jusque mi-2009 un recul considérable, jamais vu depuis les années 1930, avant d’amorcer très difficilement une reprise qui s’est avérée très faible. Au cours des cinq dernières années, la progression se limite ainsi à +0,5 % l’an.

Après avoir perdu 8,78 millions d’emplois salariés entre janvier 2008 et février 2010, l’économie américaine n’en a regagné que 3,77 entre février 2010 et mai 2012.

Le chômage au sens large, qui était à 7,9 % en décembre 2006, a surgi pour marquer un sommet à 17,2 % en octobre 2009, avant de redescendre à seulement 14,5 % en mars 2012 et y stagner depuis lors.

Très révélateur, l’indice synthétique de fécondité des femmes américaines, en hausse jusque 2007, s’est renversé brutalement à la baisse : il est revenu de 69,3 en 2007 à 63,4 en 2011, soit une baisse de 8,3 % en 4 ans. Pas étonnant que la confiance des ménages, après avoir inscrit des points bas historiques fin 2008, ne parvienne pas à revenir à ses niveaux d’avant 2006.

En Europe, les évolutions sont pires encore, bien que plus difficiles à quantifier. La plupart des pays dits industrialisés subissent donc depuis 2007 une crise aussi prolongée et aussi désespérante que celle des années 1930. Aucune issue n’est en vue. Pire, moins de trois ans après le début de la reprise anémique évoquée, ces mêmes pays reviennent à la récession franche.

Charles Kindleberger, spécialiste reconnu des années 1930, a déclaré que « s’il ne fallait retenir qu’un seul facteur pour expliquer la crise des années 1930, [il] retiendrai[t] l’excédent commercial massif et renouvelé des États-Unis depuis 1920. » Cet excédent (qui existait surtout sur l'Europe) ne prit fin qu’après 1948, quand les États-Unis eurent enfin consenti la formidable réévaluation rééquilibrante du dollar dont l’Europe et le Japon avaient alors besoin.

S’il ne fallait retenir qu’un seul facteur pour expliquer la crise depuis 2007, je retiendrais pour ma part l’excédent commercial massif et renouvelé depuis 2002 de la Chine vis-à-vis du reste du monde. Et la Chine, au lieu de réévaluer fortement le yuan, comme il serait nécessaire et urgent de le faire, s’est récemment permise de le faire reculer de 1,5 % contre dollar. Nous sommes encore très loin de 1948…

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº750