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Stress-test et aides d’État

Faut-il s’inquiéter des petites clauses de la BRRD ?

Créé le

17.10.2014

-

Mis à jour le

27.10.2014

Les contribuables doivent-ils s’inquiéter de voir l’argent public aider à la recapitalisation des banques qui auraient échoué au stress-test ? On croyait le problème résolu avec le nouveau régime de résolution bancaire mis en place dans l’Union européenne ( BRRD [1] ), qui vise à casser le lien entre banques et États. Pourtant, la question est soulevée par Paulina Przewoska, analyste senior pour Finance Watch, dans une note [2] basée sur une petite clause de la BRRD, plus précisément l’article 32, paragraphe 4.

Il s’agit d’une clause dérogatoire au régime de résolution, une « escape clause » qui permettrait aux États membres, sous certaines conditions, de participer au renflouement d’une banque jugée insuffisamment capitalisée suite à un exercice comme le stress-test que viennent de mener l’EBA et la BCE. Toutefois, les conditions prévues par le texte sont strictes : il faut être dans le cadre d’une recapitalisation de précaution, que la banque soit solvable, qu’elle respecte les normes prudentielles, qu’elle ne souffre pas d’un déséquilibre actif-passif qui la mène à la faillite – indicateurs classiques pour jauger de la nécessité d’une résolution. Par ailleurs, la recapitalisation ne doit pas venir couvrir des pertes cachées au moment du stress-test et, enfin, l’établissement doit ne pas avoir trouvé sur le marché les fonds propres dont il a besoin. « La clause ne peut s’appliquer que dans le cas d’une banque saine. Elle n’a d’autre objectif que de couvrir le cas d’un dysfonctionnement des marchés à l'issue d'un exercice collectif de stress-test ou de revue d'actifs », analyse Philippe Allard, expert en réglementation bancaire au sein de l’EBA.

Les États pourraient-ils alors abuser de cette clause pour soutenir leur fleuron national en dépit des règles européennes ? Rien de moins sûr, car même si l’on remplit toutes les conditions de la clause, il faut encore se conformer au régime des aides d’État défini par Bruxelles. « L’État membre qui souhaite participer à la recapitalisation d’un établissement doit aller plaider sa cause devant la direction de la concurrence à la Commission. Ce sera elle l’arbitre », précise Philippe Allard. Des guidelines ont été publiées le 22 septembre, pour donner plus de précisions encore sur cet article 32(4). Seuls sont concernés les exercices de type stress-tests menés à l’échelle d’un secteur bancaire national ou de l’ensemble de l’Europe : les tests menés par les superviseurs dans le cadre de la surveillance d’un établissement ne sont ainsi pas couverts. Si, sur le papier, le dispositif est précisément encadré, reste toutefois à le tester dans la vraie vie, à la merci des tractations politiques. La recapitalisation des banques recalées aux récents stress-tests pourrait en donner une illustration.

1 Directive pour le redressement et la résolution des banques. 2 « Should "precautionary recapitalisations" make taxpayers nervous? », Policy Brief de Finance Watch, octobre 2014.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº777
Notes :
1 Directive pour le redressement et la résolution des banques.
2 « Should "precautionary recapitalisations" make taxpayers nervous? », Policy Brief de Finance Watch, octobre 2014.