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Épargne de crise

En attendant la reprise de la consommation

Créé le

23.02.2021

Un débat au Sénat a porté sur la meilleure utilisation possible du surplus d’épargne accumulé du fait de la crise déclenchée par la pandémie de Covid-19.

À fin 2020, le surplus d'épargne financière en France a atteint 130 milliards d’euros, selon la Banque de France, qui estime également que le taux d’épargne devrait rester supérieur à son niveau d’avant crise en 2021, ce qui pourrait porter le volume de l’épargne à 200 milliards d’euros à la fin de cette année. Ce montant historiquement élevé, traduit à la fois  une baisse des opportunités de la consommation et la crainte d’une hausse du chômage due aux incertitudes économiques, et a suscité un questionnement de la commission des finances du Sénat, réunie le 17 février dernier, sur sa meilleure utilisation possible : « l’enjeu immédiat est donc que ce surplus d’épargne soit utilement mobilisé par les intermédiaires financiers pour soutenir l’économie, ce d’autant plus que cette épargne a jusqu’à présent été accumulée sur des supports, a priori, peu favorables aux financements sous forme de fonds propres ou de prêts à long terme, à savoir les comptes courants et les livrets d’épargne réglementée », a ainsi souligné Claude Raynal, président de la Commission et sénateur de la Haute-Garonne.

Convié à s’exprimer sur cette question, Philippe Brassac, président de la Fédération bancaire française (FBF) et DG de Crédit Agricole SA, a confirmé que 50 % de cette épargne a été maintenue en dépôts à vue (DAV), 25 % placée sur des livrets d’épargne réglementée, et 25 % seulement investie en assurance vie en unités de compte ou sur des PEA-PME. Pour autant, il a souligné que toute l’épargne au passif des banques, y compris les DAV, permet aux banques, grâce au mécanisme de transformation, en prenant en compte non pas simplement son échéance mais aussi sa stabilité statistique, de distribuer des crédits à moyen et long terme. Il a ainsi pointé que les 60 milliards de dépôts à vue ont notamment contribué à nourrir la capacité de distribution des 130 milliards d’encours de PGE.

Au-delà de cette utilité déjà avérée, l’orientation de cette épargne plus directement vers les entreprises est-elle envisageable ? Pour Philippe Brassac, il faut décorréler la question structurelle du fléchage de l’épargne vers des placements plus risqués, de celle conjoncturelle de l’utilisation de cette épargne de crise : « Nous avons intérêt à ce que cette sur-épargne revienne le plus vite possible vers l’économie, notamment par la consommation ». Une position partagée par les autres intervenants, Olivier Mareuse, directeur des fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, Emmanuel Moulin, DG du Trésor, et Valérie Plagnol, présidente du Cercle des épargnants, qui estiment qu’une part importante de cette épargne correspond à une consommation différée et que son maintien sur des supports liquides peut être interprété comme une solution d’attente avant un effet de reprise, quand les circonstances le permettront. Valérie Plagnol constate d’ores et déjà un premier retour vers la consommation au troisième et quatrième trimestres 2020, notamment sur des biens manufacturés. E.C.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº854
RB