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Directive sur les bonus : sa transposition en France fait toujours débat

Créé le

21.09.2011

-

Mis à jour le

16.11.2011

En mai dernier, une polémique est née dans le journal Libération sur la directive CRD 3. Ce texte européen sur les bonus aurait été, selon le député européen Pascal Canfin, mal transposé par la France : la loi française impose un « rapport approprié » entre les parts fixe et variable de la rémunération, alors que le texte européen parle d’« équilibre approprié ».

L’AFB défend la transposition

En juin dernier [1] donnait la parole à ce sujet à Jean-Claude Guéry, directeur des affaires sociales de l’Association française des banques (AFB). Pour lui, « les deux expressions se trouvent dans la directive. Mais les mots “équilibre approprié” n’avaient pas à être transposés car ils se trouvent dans un alinéa qui expose l’objectif de la loi et non pas sa mise en œuvre concrète par les banques, qui doivent au titre du second alinéa fixer un rapport approprié entre le fixe et le variable. »

Mais d'après Pascal Canfin, répondant à Revue Banque le 15 septembre, « le terme “équilibre approprié” n'est pas dans l'exposé des motifs mais dans la directive elle-même. La transposition en droit français a transformé ce terme en “rapport approprié”, ce qui – je le maintiens n'est pas une transposition correcte de la directive européenne. »

Même si l’AFB n’a pas la même lecture de la directive, elle admet que la notion d’équilibre a bien toutefois une incidence pour les banques : « Le superviseur bancaire européen (CEBS, devenu EBA) explique dans ses Lignes directrices de décembre 2010 que ce mot doit être compris au sens prudentiel, poursuit Jean-Claude Guéry. Et dans cette acception, l’équilibre dépend essentiellement de la façon dont la mesure de la performance est ajustée à la prise de risque. Par exemple, le versement d’une partie du bonus accordé à un trader doit être différé et conditionné à la persistance dans le temps du gain issu des opérations effectuées par le salarié, ce gain devant inclure notamment le coût du risque. Alors, la part variable a une action vertueuse du point de vue prudentiel et son montant peut être important. En revanche, si l’ajustement au risque est limité, le montant de la part variable doit être limité. »

Pascal Canfin proteste

Pour le député européen, « Le CEBS – c’est-à-dire les États représentés par leurs régulateurs nationaux – a adopté une interprétation permissive du texte sur ce point. Les É tats sont ainsi revenus sur ce qu'ils avaient cédé au Parlement dans les négociations qui avaient permis d'aboutir à un compromis. Il était pourtant très clair au moment des négociations que la notion d'“équilibre approprié” sous-tendait une répartition entre fixe et variable proche de 50/50, ratio chiffré soutenu par une large majorité au Parlement mais refusé par le Conseil. » Et le député de déplorer : « Nous ne pouvons que constater que tous les points soumis à interprétation du texte ont été utilisés par les États et les banques pour réduire la portée du texte. »

Une riposte du Parlement ?

Une contre-attaque des élus serait en préparation : « Le Parlement va organiser dans les prochaines semaines une évaluation de la transposition de la directive et de sa mise en œuvre, prévient Pascal Canfin. La Commission a mis en route un processus similaire. S’il se confirme que rien n’a changé en profondeur en matière de rémunération, le Parlement demandera un nouveau texte à la Commission. » Affaire à suivre dans Revue Banque.

S. G.

1 Revue Banque n° 737, daté de juin, p. 14.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº740
Notes :
1 Revue Banque n° 737, daté de juin, p. 14.