Square

Dettes souveraines : la fin des certitudes

Créé le

25.03.2011

-

Mis à jour le

30.03.2011

Qu’il s’agisse du monde politique (le printemps arabe), industriel (l’alerte nucléaire au Japon) ou économique (l’effondrement de Lehman Brothers), l’époque met à mal bien des certitudes. La possibilité d’un défaut d’un pays européen sur ses dettes obligataires est un autre exemple de cette remise en cause : les dettes souveraines des pays développées pourraient ne plus être les valeurs refuges estimées quasiment sans risque par les investisseurs. Les banquiers doivent faire le grand écart entre deux tendances contradictoires : celle qui ne remet pas – encore ​– en cause le risque très faiblement pondéré des dettes souveraines des pays développés et incite à détenir ces actifs comme le Comité de Bâle, et l’autre qui estime au contraire qu’il faut envisager clairement ce type de défaut, comme le propose par exemple la Commission européenne, en instituant des clauses d'action collective (CAC), qui vise à organiser les restructurations de dettes d'État. Reste que l’idée d’un défaut souverain n’est plus taboue… Au point que Marc Fiorentino n’hésite pas à pointer du doigt la situation budgétaire désastreuse des États-Unis. Le dossier de Revue Banque fait part des nombreuses réflexions en cours pour gérer le mur de dettes qui menace de s’abattre sur la zone euro.

La logique économique est-elle suffisante pour justifier de prêter aux régimes dictatoriaux ? Hubert de Vauplane rappelle dans sa chronique qu’il existe une doctrine  – très ancienne puisque datant du 19e siècle – de « dette odieuse » qui permet à un gouvernement, ​en cas de passage d’un régime totalitaire à un régime démocratique, d’annuler les dettes contractées par son prédécesseur. Un autre type de défaut souverain en quelque sorte ​! Remise au goût du jour, cette doctrine pourrait donner « un signe aux créanciers qui, aujourd’hui, pensent que l’argent n’a toujours pas d’odeur et qu’il est toujours possible de prêter aux régimes les plus autoritaires sans aucune conséquence pour eux. L’annulation de leur créance devient aujourd’hui possible. Leur responsabilité, civile mais aussi parfois pénale, peut aussi être recherchée ».

La chasse aux fonds propres est ouverte : compte tenu des nouvelles réglementations en cours autour des ratios de Bâle et de liquidité, « les 94 établissements qui, ​dans le monde, ont un capital supérieur à 3 milliards vont devoir augmenter leurs fonds propres de 577 milliards » souligne Georges Pauget. Faut-il à ce point solliciter l’épargne, surtout à moyen et long terme, ​pour assurer la stabilité du système financier ? Car les États aussi vont devoir trouver des ressources pour financer des chantiers sur longue période, ​comme ceux de la retraite ou de la dépendance. « Il va nous falloir apprendre à économiser notre épargne. Et, dans le système financier, à renforcer la surveillance plutôt que le capital » conclut Georges Pauget.

Celui-ci aurait d’ailleurs pu rajouter à la liste des prétendants au capital les assureurs confrontés à la réforme Solvabilité II : celle-ci, comme Bâle II et bientôt III dans le secteur bancaire, s’appuie sur « la constitution d’un capital réglementaire fondée sur une mesure économique des risques » explique Tanguy Faroult (Groupama). Mais en contrepartie, ​« ​il y aura élévation du niveau de capital nécessaire ». Alors que cette réforme arrive dans une phase décisive de son implantation avec les résultats du QIS5 annoncés en France à mi-mars par l’ACP, l’auteur en rappelle l’esprit et en pointe les dangers : « un tel type de régulation, parce qu’elle influe directement sur le comportement des acteurs, reste un acte politique majeur dont un mauvais paramétrage d’entrée ou un mauvais encadrement de ses conditions d’utilisation pourraient se révéler particulièrement dommageables à la profession ».

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº735