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Économie

Des banques centrales inefficaces ?

Créé le

17.11.2015

-

Mis à jour le

01.12.2015

De nombreux investisseurs font part de leur doute sur l’efficacité des mesures d’assouplissement quantitatif prises progressivement par les banques centrales du monde riche depuis 7 ans. Celles-ci ne parviendraient ainsi pas à faire remonter durablement la croissance réelle, l’inflation et les actifs risqués. Il est vrai que ce mode de régulation a très probablement empêché le processus de destruction créatrice (« schumpetérien ») de fonctionner normalement.

Mais il n’y avait sans doute pas de sortie par le haut envisageable après le choc Lehman en 2008 et la crise de la dette européenne en 2010-2012 qui ne passait pas par du Quantitative Easing (QE). Que l’entrée dans une spirale déflationniste (« hard » comme dans les années 1930 et « soft » comme le Japon depuis 20 ans) constituait encore un risque mortel de moyen terme. Aujourd’hui, peut-on imaginer sérieusement une économie américaine dont le PIB réel se situe plus de 8 points au-dessus de son niveau d'avant-crise et qui a créé plus de 13 millions d’emplois s’il n’y avait pas eu de QE ? Peut-on de la même façon envisager une résolution de la crise de la dette européenne sans l’action déterminée de la BCE (au travers de l’OMT à l’été 2012, puis du QE proprement dit en 2015) ? De plus, une attitude passive se serait traduite par plus de destructions de capacités.

En réalité, le QE constitue un mode régulatoire de l’économie de bulle, qui présente une différence de degré mais non de nature avec les mesures de politique monétaire traditionnelles d’action sur les taux directeurs. Les banques centrales ayant déjà abaissé à zéro les taux directeurs et n’admettant que difficilement les taux négatifs, elles n’avaient pas d’autres choix que de procéder à une régulation quantitative (achats d’actifs). Mais il s’agissait, comme après chaque crise financière depuis 30 ans, d’enrayer les pressions déflationnistes en agissant à la baisse sur les taux longs nominaux (baisse des taux courts futurs anticipés) et réels (remontée des anticipations d’inflation). Même remarque pour la reflation des actifs risqués (hausse de la prime de risque, rebalancement du portefeuille), la baisse du change (baisse des taux courts futurs anticipés) et les gains de confiance au secteur privé.

De fait, les frustrations émises à propos du QE montrent qu’on attend trop de la politique monétaire aujourd’hui. Le QE laisse du temps pour l’ajustement des agents publics et privés et nous permet d’éviter les enchaînements dépressifs. Mais il ne constitue pas la panacée ni ne peut constituer un substitut aux défaillances encore réelles de gouvernance ou au manque de réelles réformes structurelles dans de trop nombreux pays.

La fin des QE ?

Ce cycle du QE n’est en tout cas pas terminé pour nous. La BCE nous a d’ores et déjà préparés à un QE 2 dès décembre prochain. La Bank of Japan sera amenée selon nous à adopter une nouvelle vague de QE dans les prochains mois. Il ne faut même pas exclure un QE 4 aux États-Unis en 2016 ou 2017 si les choses évoluaient plus mal en Chine et dans le monde émergent. Car le message ultime du monde émergent cette année est bien que la menace principale reste de nature déflationniste.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº790