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Depuis avril 2013, la Fed défend le statut du dollar

Créé le

12.05.2014

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Mis à jour le

28.05.2014

Face à la Chine, qui à sa suprématie démographique ajoute une supériorité industrielle, commerciale, économique et même financière, les États-Unis conservent encore deux atouts majeurs : leur suprématie en matière monétaire et militaire.

Si, sous les coups de Pékin, ils devaient perdre leur suprématie monétaire, ils s'exposeraient alors à perdre assez vite aussi leur suprématie militaire. S'ils ont remporté la Guerre froide, c'est bien parce que leur suprématie monétaire leur avait donné une formidable capacité de financement, qui leur avait permis d'infliger à l'URSS une course aux armements et de la gagner; en 1989, Moscou capitulait sans avoir livré combat.

C'est un tel enjeu qui explique l'énigme du comportement de la Fed en avril 2013 : seulement trois mois après le début de l'opération QE3, M. Bernanke commençait à communiquer pour annoncer un dénouement qui se concrétisera dès octobre 2013. Pourquoi donc un aller-retour aussi précipité ?

La Maison-Blanche et la Fed venaient de réaliser que le formidable mouvement haussier du cours de l'or, qui s'était amorcé en 2001 pour s'accentuer en 2005 et venir culminer à 1911 dollars l'once en mars 2011, était catalysé par la Chine et par la Russie et pouvait finir par disqualifier le dollar dans son rôle de monnaie du monde. Après mars 2011, le prix de l'or avait bien reculé, mais s'inscrivait encore dans sa tendance fortement haussière : le 9 avril 2013, l'once valait encore 1585 dollars.

C'est alors que Washington a décidé de frapper un grand coup. Le carburant essentiel de la hausse de l'or était le sentiment, chez les investisseurs, d'une fuite en avant de l'économie américaine dans un recours prononcé et prolongé aux expédients budgétaire et monétaire.

En préannonçant, début avril 2013, une interruption de l'opération QE3, la Fed entendait écraser cette défiance embryonnaire à l'égard du dollar pour mieux casser la tendance haussière de l'or. Le résultat fut à la hauteur de l'initiative : en avril et mai 2013, le prix de l'once chuta lourdement pour venir ensuite fluctuer entre 1 200 et 1 350 $.

Mais c'est un succès à la Pyrrhus qu'ont obtenu les États-Unis : l'annonce de la sortie de QE3 a suffi à faire monter, fortement et dès l'été 2013, les rendements longs américains. Leur marché immobilier s'en est trouvé meurtri, portant dangereusement atteinte à leur croissance.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº773