Square

« Démultiplier les moyens du FESF par un effet de levier »

Créé le

12.10.2011

La nécessité de recapitaliser les banques a désormais été actée par les autorités européennes. Quelles sont les options pour trouver ces fonds ?

Elles sont multiples. Certaines dépendent des banques elles-mêmes : elles peuvent accroître la part de leurs profits mis en réserves pour augmenter leurs fonds propres ; elles peuvent aussi se désengager de certaines activités, notamment en vendant des actifs non stratégiques et consommateurs de fonds propres, afin d’augmenter leur ratio de solvabilité. Les banques françaises ont déjà recours à ces deux leviers. Mais il faut garder à l’esprit que l’option de la réduction de la taille du bilan peut avoir des effets pervers sur l’économie, avec un risque à court et moyen terme d’une baisse de l’activité de crédit. Enfin, les banques peuvent aller lever des fonds sur les marchés. C’est la solution privilégiée par les Allemands. Toutefois, un certain nombre de banques, notamment celles des pays fragiles de la zone euro comme le Portugal et la Grèce, ne peuvent pas accéder aux marchés. Quant à celles qui le peuvent encore théoriquement, comme les françaises, elles imposeraient une telle dilution aux actionnaires actuels – étant donné les niveaux très bas des cours de Bourse – que l’option n’est pas vraiment envisageable à court terme.

Il existe enfin des solutions plus politiques, via l’intervention soit des États, soit du Fonds européen de stabilité financière (FESF). L’Allemagne préfère que ce soit les premiers qui agissent, mais la France, soucieuse de préserver sa notation AAA, y est plus réticente. Une chose est certaine : les moyens actuels du FESF – à supposer que sa réforme soit votée par tous les États de la zone euro, ce qui n’est pas encore le cas – sont limités à 440 milliards d’euros. Utiliser une partie de cette somme pour recapitaliser les banques européennes se ferait au détriment de l’aide aux pays en difficulté.

Quelles solutions crédibles reste-t-il ?

On peut démultiplier les moyens du FESF par un effet de levier. Le fonds pourrait prendre le statut de banque, accorder des crédits aux États en difficulté puis apporter ces créances en garantie à la Banque centrale européenne pour se refinancer. Une autre solution serait que la BCE augmente ses achats de dette souveraine et que le FESF apporte sa garantie sur ces créances. Ces points ne sont encore qu’en discussion et font face à des oppositions. Mais je pense que l’on y viendra. Les marchés seraient alors face à une force de frappe européenne considérablement accrue, appuyée sur le bilan de la BCE.

Une nouvelle évaluation des fonds propres nécessaires aux banques a été commandée à l’Autorité bancaire européenne (EBA). Les deux derniers exercices de ce genre avaient été vivement critiqués. Comment s’assurer qu’ils soient aujourd’hui crédibles ?

Les premiers stress tests des banques européennes n’avaient retenu aucune hypothèse de défaut, même partiel, d’un État. Intégrer l’hypothèse d’une décote, a minima sur la Grèce, est donc indispensable pour rendre crédible l’exercice en cours. Il faut être transparent sur l’impact de défauts potentiels sur les fonds propres des banques, et assurer ensuite la recapitalisation des établissements les plus faibles. Toutefois, la définition de ces hypothèses de stress doit être faite avec attention. Il ne s’agit pas de tester une situation où tout s’effondre, avec par exemple une hypothèse de décote de 50 % sur la dette italienne, comme le suggèrent les méthodologies du FMI ou de Goldman Sachs. Ce serait tautologique : aucune banque européenne n’y résisterait.

Cela serait-il suffisant pour rassurer les marchés ?

Les marchés testent la résistance des émetteurs et des États, ils vont aussi loin qu’ils le peuvent. Face à des stress tests sérieux, conduisant à une recapitalisation des banques qui en ont besoin, et une force de frappe financière européenne importante, prête à intervenir pour les États fragiles et les banques, je pense que la raison l’emportera.