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3 questions à Fabrice Montagné, économiste chez Barclays

Brexit : « No deal » plus probable en 2021 qu’en 2019

Créé le

23.08.2018

-

Mis à jour le

03.09.2018

Dans son Livre blanc du 12 juillet sur la relation future entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE), Theresa May n’a pas repris la revendication de la City d’obtenir une reconnaissance mutuelle en matière de services financiers ; comment expliquer sa position ?

D’une part, il était quasiment certain que Bruxelles n’accepterait pas la notion de reconnaissance mutuelle ; d’autre part, Theresa May a dû définir ses priorités et elle a choisi de concentrer ses efforts sur l’industrie, sans doute car, électoralement, il n’est pas rentable de se battre pour les services financiers. L’industrie représente un nombre d’électeurs beaucoup plus important et ne doit pas subir un retour des contrôles douaniers. Pour sauver l’industrie, Theresa May demande donc que le Royaume-Uni demeure dans le marché unique pour les biens. Les services financiers quant à eux devront, pour survivre, se contenter de la notion d’équivalence. Mme May cherche tout de même à obtenir une équivalence « améliorée », c’est-à-dire plus stable que l’équivalence telle qu’elle existe jusqu’à présent.

Croyez-vous à un « No deal » pour l’échéance du 30 mars 2019 ?

C’est très peu probable car, pour l’accord de sortie, la plupart des questions (comme le montant du chèque de sortie) sont maintenant réglées. La relation future sera simplement esquissée dans cet accord ; elle donnera lieu à un texte dédié qui sera pour l’essentiel négocié pendant la période de transition. Certes, pour l’accord de sortie, le sujet de l’Irlande demeure difficile mais une solution de secours (backstop) est prévue : l’Irlande du Nord restera dans l’Union douanière et dans la même sphère réglementaire que le marché unique pour un certain nombre de produits et services afin que l’accord de paix irlandais continue de fonctionner. Pour nous, le scénario le plus probable est donc la signature d’un accord de sortie. Ainsi, le 30 mars 2019, une période de transition va s’ouvrir pendant laquelle presque rien ne changera (par exemple, les services financiers continueront de bénéficier du passeport) et cette période va durer jusqu’à la fin de l’année 2020.

Êtes-vous aussi optimiste pour l’accord qui portera sur la relation future ?

Non, la négociation de ce second accord promet d’être rude. Par exemple, l’Union européenne ne va sans doute pas accepter que le Royaume-Uni reste dans le Marché unique pour les biens et en sorte pour les services, les capitaux et les personnes. Un « No deal » est beaucoup plus probable pour janvier 2021 que pour le 30 mars 2019.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº823