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Union européenne

Brexit : « L’incertitude est toujours très forte »

Créé le

22.08.2019

L’économiste Laure Baquero rappelle que Boris Johnson, en tant que maire de Londres, a œuvré en faveur du rayonnement de la City à l’international. Il cherchera peut-être davantage que Theresa May à défendre les intérêts du secteur des services financiers.

Délaissée par Theresa May, la City de Londres sera-t-elle mieux défendue par Boris Johnson ?

Alors que le secteur des services financiers britanniques réclamait un système de reconnaissance mutuelle avec l’Union européenne à 27, Theresa May n’a pas insisté sur ce point lors de ses négociations avec Bruxelles. Ce choix de Mme May a été vécu par la City comme un abandon et trois jours avant qu’il ne soit officialisé dans le Livre blanc du 12 juillet 2018 (plan Chequers), Boris Johnson a démissionné de son poste de ministre des Affaires étrangères. Il est impossible de savoir à quel point la situation de la City a contribué à motiver cette démission. Toutefois, quand il était maire de Londres, Boris Johnson a ardemment œuvré au rayonnement de la City dans le monde et il continue de promouvoir des valeurs assez libérales sur le plan économique. Enfin, depuis son entrée au 10 Downing Street, Boris Johnson a nommé un ancien banquier d’affaires, Sajid Javid, au poste de Chancelier de l’Échiquier.

Le 27 juillet à Manchester, Boris Johnson a présenté les grandes lignes de son programme économique où la dérégulation est en bonne place. Comment cette dérégulation pourrait-elle se décliner dans le domaine bancaire et financier ?

Dans ce discours du 27 juillet, Boris Johnson ne mentionne pas le secteur financier. Dans l’hypothèse où il souhaiterait déréguler ce secteur après le Brexit, pensant avoir les mains libres du fait de la sortie de l’UE, il restera lié par un certain nombre d’engagements, comme la signature des accords de Bâle III par le Royaume-Uni qu’il ne remettra sans doute pas en cause.

Il aura en revanche davantage de marges de manœuvre dans le domaine fiscal : il pourrait revenir sur certaines taxes exceptionnelles qui ont été appliquées aux revenus bancaires au Royaume-Uni ou encore favoriser fiscalement les très hauts revenus.

En cas de hard Brexit le 31 octobre, le secteur financier est-il préparé ?

Les acteurs financiers sont globalement bien préparés à un Brexit, même dur, mais le doute qui continue de planer sur le moment auquel le Brexit surviendra fait partie du choc. Dans le camp européen, un nouveau report semble tout à fait envisageable, comme l’a laissé entendre la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen. Certes, Boris Johnson affirme que le Brexit aura lieu le 31 octobre avec ou sans accord, mais le Parlement britannique est déterminé à empêcher un « no deal ». L’incertitude est donc toujours très forte.

Dans l’hypothèse d’un Brexit sans accord, que se passera-t-il en matière de compensation ?

Dans le domaine de la compensation, les dispositions prises par la Commission européenne le 19 décembre 2018, en prévision de l’échéance du 29 mars 2019, pour 12 mois au-delà du Brexit devraient être applicables si celui-ci a lieu le 31 octobre. Ainsi, pendant un an, les établissements bancaires et financiers de l’UE à 27 pourront continuer d’utiliser les services des établissements de compensation britanniques, notamment s’agissant des dérivés de taux. Toutefois, sur le continent, Eurex à Francfort et la filiale française de LCH se positionnent. Ces deux entités sont dans des situations très différentes : LCH Paris est dépendant de Londres tandis qu’Eurex tente de se développer au détriment de ses concurrents qu’ils soient britanniques ou autres. Les banquiers centraux sont satisfaits de la perspective de voir se développer plusieurs pôles de compensation en zone euro. À l’inverse, certains opérationnels regrettent une fragmentation du marché qui pourrait limiter son efficacité.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº835
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