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Brexit: étonnante unité européenne

Créé le

16.05.2017

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Mis à jour le

24.05.2017

Pour préparer la négociation du Brexit, les 27 pays de l’Europe continentale font jusqu’à présent preuve d’unité. Ils ont rapidement trouvé des positions communes et ces orientations (guidelines) ont été adoptées le 29 avril 2017, avant de se traduire en directives de négociation. C’est dans cette optique que Michel Barnier – qui, au sein de la Commission, pilote les négociations – a présenté la recommandation de la Commission le 3 mai 2017. De nombreux points sont très éloignés des positions britanniques. Alors que le Royaume-Uni souhaite négocier de front à la fois les modalités de sa sortie de l’UE et un accord sur ses futures relations avec l’Europe à 27 États, ceux-ci ont retenu une approche en deux étapes. La première sera bien évidemment consacrée aux conditions du « divorce ». Barnier prévient : « D'aucuns voudraient faire croire que le Brexit n'aura pas d'impact notable sur nos vies ou que les négociations pourront aboutir rapidement et sans peine. Rien n'est moins vrai. Nous devrons élaborer des solutions fiables avec toute la précision juridique requise. Et cela prendra du temps ».

Parmi les questions qui devront être traitées lors de la première étape, celle du règlement financier est brûlante. Michel Barnier a donc pris le temps d’expliquer : « L'Union et le Royaume-Uni se sont engagés mutuellement à financer des programmes et des projets […]. Nous devons solder les comptes. Ni plus, ni moins […]. Notre objectif, au cours de cette première phase, sera de nous mettre d'accord avec le Royaume-Uni sur une méthodologie rigoureuse pour calculer ses obligations. » Pour le moment, des estimations ont été avancées (40 à 60, puis 100 milliards d’euros), qui ont suscité des réactions très vives au Royaume-Uni. Ce chiffre peut éventuellement être négocié à la baisse, mais un montant substantiel devra être versé puisque le Royaume-Uni s’est engagé et doit honorer sa parole.

Dans ses orientations, l’Union à 27 affirme qu’elle fera tout pour parvenir à un accord mais se préparera également à un échec des négociations, afin d’être en mesure de faire face à ce scénario. Une telle perspective ne peut pas être exclue lorsqu’on entend certains membres du mouvement britannique radical « Leave means leave » qui souhaite une rupture nette avec l’UE : « no deal is better than a bad deal » écrivait le 3 mai Richard Tice, coprésident du mouvement.

Un banquier français installé à Londres est effrayé par une telle perspective : « Le Royaume-Uni serait plongé dans le chaos ! » Ce Français très anglophile pense que dans certains domaines, comme dans le secteur de la finance, les négociations n’aboutiront pas. Il estime que la France fait tout pour mettre en difficulté le secteur financier de Londres – Paris pensant attirer l’activité financière – et n’œuvre pas en faveur d’un accord. Selon ce banquier, « le Royaume-Uni va réclamer un accord qui, certes, ne lui offrirait pas les mêmes facilités que le passeport européen, mais serait plus avantageux qu’un régime d’équivalence. Cela pourrait s’appeler une “reconnaissance réciproque”. Les chances sont minimes pour que l’Europe accepte. Donc mon scénario central est une absence d’accord dans le domaine financier. Les relations entre le Royaume-Uni et l’Europe seront alors simplement régulées par les règles de l’OMC. » Un tel scénario serait beaucoup plus dommageable pour le Royaume-Uni que pour l’Union à 27. S. G.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº809