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Zone euro

Bientôt une monnaie parallèle en Italie ?

Créé le

05.09.2017

-

Mis à jour le

02.10.2017

Après la campagne présidentielle française, c’est au tour de la campagne italienne en vue des prochaines élections générales d’agiter le spectre effrayant pour les marchés financiers d’une sortie de l’euro. À la fin de l’été, Silvio Berlusconi a déclaré à la presse italienne qu’il souhaite la création d’une monnaie parallèle. La ligue du Nord est sur une ligne assez proche et il n’est pas exclu de voir les deux mouvements unir leurs forces. Un troisième mouvement politique est très critique vis-à-vis de la monnaie unique : le Mouvement 5 étoiles. Face à ces idées, les marchés craignent une sortie de l’Italie de la zone euro. Après les déclarations de Silvio Berlusconi, le spread italien (écart de taux avec l’Allemagne) a grimpé. « Il a atteint 170,2 points de base le 22 août, précise Éric Dor, économiste à l'IESEG School of Management, et 174,3 pb le jour suivant. » Pourtant, cette monnaie parallèle devrait en principe cohabiter avec l’euro, d’après Forza Italia et le Mouvement 5 étoiles. Seule la Ligue du Nord estime que cette monnaie parallèle permettrait de préparer le pays à une sortie de l’euro sans pénurie temporaire de liquidité.

En cas de victoire de ces idées, que se passerait-il sur un plan pratique ? Éric Dor a étudié cette hypothèse.

Tout d’abord sur le plan légal, l’économiste rappelle que « en vertu de l’article 128 du traité européen, la création d’une monnaie nationale qui coexisterait avec l’euro est interdite. Toutefois, rien ne semble empêcher, en droit européen, qu’un gouvernement émette des titres de dettes qui soient spontanément utilisés comme moyen de paiement par les citoyens privés, sans aucune contrainte légale. » Et l’économiste de donner l’exemple du chèque restaurant, qui n’est pas une monnaie mais constitue bien un moyen de paiement.

Ainsi, les propositions des eurosceptiques italiens relèvent davantage de la mise en circulation de moyens de paiement que de celle d’une véritable monnaie. Par exemple, la Ligue du Nord propose de recourir à des obligations à court terme émises par l’État italien qui rémunérerait avec ces outils ses fournisseurs privés, ceux-ci les diffusant dans l’économie et en faisant une sorte de monnaie parallèle.

Autre outil envisagé, cette fois par le Mouvement 5 étoiles : des certificats de crédit d’impôt qui seraient distribués par l’État à l’ensemble de la population et des entreprises (selon le modèle de l’helicopter money) et seraient acceptés par l’État comme paiement de l’impôt. Cette valeur accordée par l’État devrait en principe permettre à ces outils de circuler dans l’ensemble de l’économie comme des moyens de paiement. « Cette “helicopter money” relancerait la demande intérieure, mais aussi les exportations car les entreprises bénéficiaires pourraient baisser leurs prix, ce qui aurait un effet équivalent à celui d'une dépréciation de la monnaie, devenue impossible depuis la création de l’euro. »

Éric Dor doute toutefois que les autorités européennes assistent à la diffusion de ces crédits d’impôt sans considérer qu’il s’agit d’un endettement public supplémentaire pendant l’année d’émission.

Et surtout, ces scénarios italiens ressemblent aux scénarios français de victoire d’un candidat eurosceptique lors des dernières présidentielles. Résultat : les Français ont accordé la victoire au proeuropéen Emmanuel Macron. SG

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº812