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Choix d’investissement

Une boussole pour orienter
au mieux les ambitions ESG

Créé le

25.11.2022

-

Mis à jour le

21.02.2023

À l’aune des avancées en matière de réglementation extra-financière, le fichier EET (European ESG Template) vise une harmonisation des échanges entre sociétés de gestion, émetteurs de produits structurés et leurs partenaires distributeurs et assureurs, au travers d’un document standardisé et universel. Objectif : redonner de la lisibilité
aux investisseurs.

L’engouement pour la finance responsable ne cesse d’augmenter depuis la COP 21. Aujourd’hui, l’ensemble des acteurs financiers propose une gamme de solutions durables à leurs clients, entraînant ainsi la prolifération de différentes définitions et approches de la finance durable.

Mif 2 (la directive Marchés d’instruments financiers révisée ou, en anglais, MiFID II), DDA (Directive Distribution Assurance), SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) ou encore la taxonomie européenne... Plusieurs vagues de réglementations se sont succédé pour proposer un cadre réglementaire, tant au niveau national qu’au niveau européen ou mondial.

En parallèle, les labels ESG (environnementaux, sociétaux et de gouvernance) se sont aussi multipliés. Alors qu’ils devaient initialement apporter un degré supplémentaire de clarté, leur nombre est venu ajouter de la complexité, là où les investisseurs finaux ont désormais besoin de lisibilité.

Si chacun des acteurs financiers a tendance à s’intéresser aux réglementations ou labels qui le concernent, il est important d’en rappeler l’objectif initial :

– d’une part, éduquer les investisseurs aux impacts des risques ESG sur leurs portefeuilles et aux externalités dites négatives des actifs financiers et donc des entreprises, états ou biens immobiliers, mesurés entre autres par les PAI (Principle Adverse Indicators) ;

– d’autre part, inciter à investir de manière plus responsable, soit en désignant des activités vertueuses (par exemple, pour l’environnement au travers d’une taxonomie précise avec une recherche d’effets positifs pour le climat ou la biodiversité), soit en mettant en avant des gestions et produits avec des exigences accrues en matière ESG.

In fine, ces efforts réglementaires placent le client au centre de ses choix d’investissement. Mais pour cela, les clients comme les acteurs financiers concernés ont besoin de définitions plus lisibles, de données de qualité et homogènes pour analyser et comprendre les impacts d’un portefeuille, d’un fonds, d’une unité de compte ou encore d’un PEA.

Permettre des choix éclairés

Dans un souci de transparence et d’homogénéisation, un groupe de travail « FinDatEx » a été mandaté à l’échelle européenne par l’ensemble des associations financières européennes1 pour créer un modèle de données standardisé permettant de capturer toutes les caractéristiques durables essentielles des produits financiers.

La création de ce fichier commun, l’European ESG Template (EET), permettrait ainsi aux sociétés de gestion, assureurs et banquiers d’agréger les données transmises par les entreprises et de les présenter aux clients de manière homogène.

Aujourd’hui, force est de constater qu’encore trop peu d’entreprises sont en mesure de publier les chiffres demandés par la réglementation ESG, et qu’il existe encore un grand flou quant à la définition ou à la méthodologie de calcul de certains indicateurs, ne serait-ce que pour l’empreinte carbone !

Toutefois, en attendant les nouvelles réglementations relatives à la transparence des données des entreprises, il est important de poursuivre les efforts de coordination en termes d’indicateurs souhaités pour avancer vers une définition plus standardisée de l’investissement responsable. L’EET donne ainsi la possibilité aux sociétés de gestion et aux distributeurs de communiquer avec un même langage, autour d’un format d’échange de données unique, notamment toutes les informations permettant d’identifier les fonds afin de les réconcilier avec les préférences ESG des épargnants pour respecter les obligations réglementaires des distributeurs et des assureurs dans le cadre respectif de MiFID II et de DDA.

L’utilisation de l’EET n’est pas une exigence réglementaire, mais les distributeurs et fournisseurs de fonds, tels que Fidelity International, l’utiliseront pour rassembler les informations nécessaires pour faire correspondre les préférences des clients en matière de développement durable à l’offre de produits. En effet, ce format de place européen définit près de 600 points de données autour de l’ESG.

Les indicateurs que l’on retrouve dans l’EET émanent des éléments publiés dans le cadre de SFDR. On y retrouve par exemple le pourcentage minimum d’investissements durables alignés sur la taxonomie (Taxonomy Sustainable Investments), le pourcentage minimum d’investissements durables tels que définis par SFDR (SFDR Sustainable Investments) ou encore la prise en compte des PAI (Principal Adverse Impacts), tels que définis par SFDR. Les documents périodiques seront remis aux clients à leur publication pour fournir des informations encore plus détaillées, en faveur de la protection de l’environnement, par exemple les pourcentages d’entreprises permettant de prévenir la pollution ou les pourcentages d’entreprises de l’économie circulaire.

L’EET constitue un outil pour décrire toutes les informations précontractuelles : les assureurs doivent montrer à leurs clients ces documents pour tous les fonds des contrats d’assurance vie, comme les PRIIPS (Packaged Retail Investment and Insurance-based Products), avant de les faire souscrire à des unités de comptes, liés à ces fonds. Les sociétés de gestion peuvent également expliciter leur politique d’exclusion, de vote et d’engagement avec les entreprises en portefeuille ainsi que leurs engagements à long terme, par exemple les objectifs relatifs à la stratégie zéro carbone Net Zero.

Vers l’unification des approches

Si toutes les parties prenantes sont en accord concernant l’utilité d’un tel fichier, sa création n’en a pas été facile pour autant. Avec plus de 15 pays autour de la table et l’ensemble des différents métiers de l’industrie financière représentés, la création de l’EET a généré de nombreux débats entre des industries financières soumises à des réglementations et des interprétations similaires de prime abord, mais différentes dans leurs applications. Par exemple, la réglementation des sociétés de gestion leur indique que l’information précontractuelle SFDR est une annexe du prospectus du fonds, juridiquement non détachable du prospectus, tandis que la réglementation des assureurs indique qu’ils doivent montrer aux clients un document indépendant pour chaque unité de compte, donc de facto pour chaque fonds. Les associations de gestion d’actifs se sont engagées dès l’automne 2021 auprès des assureurs à fournir ces informations précontractuelles dans un document indépendant. Une belle conciliation !

Les débats concernant la définition de ce qu’est la finance durable et les préférences potentielles des clients ont également fait ressortir les différences culturelles liées aux pratiques locales, à leur approche divergente dans certains pays et à la maturité de chacun face à la finance verte. Non seulement l’interprétabilité des régulations est marquée par des systèmes juridiques différents, mais d’un point de vue plus sociétal, les divergences font qu’entre le tabac, le charbon, le nucléaire ou encore le cannabis, la longue liste des secteurs d’exclusion n’est potentiellement pas la même selon les pays.

Difficile donc de trouver un parfait alignement pour tous, mais à travers l’exercice de la création de l’EET, nous constatons qu’il est possible de faire gagner le collectif pour aboutir à un format adapté aux besoins plus larges qui sont ceux de réallouer le capital en faveur d’une économie bas carbone et d’une société plus inclusive ainsi que d’accompagner le secteur vers une transition juste et durable.

Un fléchage plus efficace
des investissements

Si nous saluons les initiatives réglementaires en faveur d’une finance responsable et durable qui avancent dans le bon sens, il y a encore trop de place pour les interprétations divergentes. Aligné avec ces réglementations structurelles qui font évoluer l’industrie, l’EET est un outil précieux qui fournit une vue d’ensemble des indicateurs clés de l’investissement responsable, en un seul document standardisé.

Comme pour beaucoup d’autres outils de mesure et d’analyse, le défi principal auquel l’industrie doit faire face est celui de l’accès à la donnée de qualité. Ici aussi, de nombreux chantiers sont en cours, notamment la réglementation CSRD, qui vise à poser des règles pour les entreprises en matière de transparence, mais le chemin reste encore long. Si le fichier EET a aujourd’hui le mérite d’exister et d’homogénéiser des indicateurs complexes, ce qui représente une avancée majeure, il n’est pour le moment que parcellaire et sera complété au fur et à mesure que l’information deviendra disponible.

Nous sommes convaincus que ces étapes contribueront activement à l’accès crucial à la donnée et à la normalisation du cadre réglementaire, afin d’accélérer l’orientation des capitaux en faveur des entreprises les plus actives en matière de transition vers un modèle plus durable.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº874
Notes :
1 Insurance Europe pour les assureurs, dont France Assureurs ; l’EFAMA pour les sociétés de gestion, dont l’AFG ; l’EUSIPA pour les produits structurés, dont l’AFPDB ; EAPB/EBF/EACB/ESBJ pour les banques, dont la FBF.