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Obligations : les financières font leur marché

Créé le

20.12.2023

-

Mis à jour le

26.12.2023

Les spécialistes parlent d’un véritable changement de paradigme. 2023 fut l’année d’une hausse inédite des taux directeurs européens. Le taux d’intérêt des opérations principales de refinancement s’établit à 4,5 %, celui de facilité de prêt marginal à 4,75 % et le taux de facilité de dépôt des liquidités bancaires à 4 %. À ce renchérissement des coûts de financement se sont ajoutées d’autres contraintes. Avant de remonter les taux, la Banque Centrale Européenne (BCE) avait engagé le quantitative tightening. 2023 fut aussi une année de sortie des dispositifs des LTRO (Longer-Term Refinancing Operations), avec d’importantes échéances de remboursement pour le secteur bancaire.

En d’autres termes, des sources primordiales de refinancement se sont taries. Les banques européennes ont su anticiper et s’adapter. Un regain des émissions de dette bancaire, et notamment des obligations sécurisées, a eu lieu en 2022 et s’est poursuivi en 2023.

En France, selon Fitch Ratings, le refinancement de marché est estimé à 40 % en moyenne des ressources financières de banques. Les dépôts collectés auprès de la clientèle constituent les autres 60 %. Les entités françaises y ont davantage recours que la plupart de leurs homologues européennes. De façon générale, la dette bancaire européenne inspire confiance aux investisseurs, en dépit de faibles valorisations. L’épisode Credit Suisse n’est cependant pas passé inaperçu. Deutsche Bank a connu un trou d’air et les émissions de Contingent Convertibles ont enregistré un surcoût lors de leur reprise à l’été 2023.

Quel qu’en soit le prix cependant, les banques ont besoin de s’adresser au marché obligataire pour répondre aux exigences prudentielles. Heureusement, les entités européennes, avec des ratios de fonds propres supérieurs aux seuils réglementaires, sont jugées solides.

Pour alléger leurs bilans, répondre aux besoins de liquidités sans obérer leur résilience et mobiliser les montants nécessaires au financement de l’économie et de sa transition via des sources diversifiées, l’option des titrisations est souvent avancée.

En attendant l’Union des marchés de capitaux

Depuis la crise des subprimes, la titrisation a mauvaise presse. Le marché européen des capitaux, souvent qualifié d’atone, paraît dérisoire comparé au marché américain. Pour expliquer ce quasi-désintérêt, le traitement prudentiel de la titrisation est parfois critiqué, malgré un allègement des pondérations de risque pour le standard STS (simple, transparent, standardisé). Les acteurs du marché appellent de leurs vœux une union des marchés de capitaux européens afin de donner un véritable élan à la titrisation. La Commission européenne a publié une proposition sur ce sujet en décembre 2022.

En attendant, les banques auront à manœuvrer dans une zone euro aux perspectives de stabilité financière « fragile », selon le terme employé par la BCE dans sa revue de stabilité financière parue en novembre. Entre potentielles crises géopolitiques, éventuelle récession, risques accrus d’insolvabilité des agents économiques, et des coûts de financement pour lesquels rien n’indique aujourd’hui qu’ils baisseront à court terme, la tâche pourrait s’avérer délicate. La confiance, des investisseurs comme des déposants, sera déterminante.

$!Obligations : les financières font leur marché

« La faiblesse du marché européen de la titrisation constitue également une entrave au développement des marchés. La réglementation, notamment le traitement prudentiel de la titrisation, freine les émissions. »

Stéphane Giordano, président de l’Amafi, supplément du Revue Banque n° 886, décembre 2023 (© Jean-Noel Martin)

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº887-888
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