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Le secteur bancaire français reste dynamique

Créé le

24.11.2022

-

Mis à jour le

09.12.2022

La première quinzaine de novembre a été marquée par
les publications des résultats des banques européennes
au troisième trimestre 2022. Le résultat net agrégé
des quatre principaux groupes bancaires français
s’est élevé à 7,6 milliards d’euros, quasiment stable
(-1,3 %) par rapport au troisième trimestre 2021.

Le produit net bancaire agrégé des quatre principaux groupes bancaires français est demeuré en hausse au troisième trimestre 2022 (+3,2 % en glissement annuel) mais moins sensiblement qu’au premier semestre (+8,8  %). Si les revenus des activités de banque de détail en France furent, en moyenne, comparables à ceux générés un an auparavant, ceux des activités de banque de détail et de services financiers spécialisés à l’étranger se sont révélés plus dynamiques, à l’instar de ceux des autres métiers (banque de financement et d’investissement, gestion d’actifs).

$!Le secteur bancaire français reste dynamique

Banque de détail : pincement des marges, hausse des volumes

Le produit net bancaire de la banque de détail en France a été, pour l’ensemble de l’échantillon, quasiment stable entre le troisième trimestre 2021 et le troisième trimestre 2022 (+0,6 % selon nos calculs). La tendance générale fut à la contraction des revenus nets d’intérêts, à laquelle seule un groupe bancaire de l’échantillon a finalement échappé. Les évolutions positives des commissions, tant de services1 que financières2, ont compensé le recul des revenus nets d’intérêts. Certes, à terme, les taux d’intérêt plus élevés constitueront un facteur de normalisation des marges d’intérêt bancaires. Ainsi, le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a calculé qu’une hausse de taux de 200 points de base accroîtrait le revenu net d’intérêt des banques françaises d’environ 15 % avec, toutefois, des disparités importantes selon les établissements. Mais dans l’intervalle, le repricing du coût des ressources, qui présentent une maturité plus courte, est plus rapide que celui du rendement des actifs, ce qui pèse au contraire, temporairement, sur les marges d’intérêts.

Dans ce contexte, la fin de la période de sur-bonification des opérations ciblées de refinancement à long terme (TLTROs) le 30 juin 2022 a contribué au renchérissement des ressources bancaires, de même que, dans une plus large mesure, la hausse des taux de l’épargne réglementée. Cette dernière frappe plus fortement les acteurs détenant une part de marché importante sur ces produits.

Enfin, l’étalement dans le temps de la remontée des taux des nouveaux prêts à l’habitat, du fait du taux d’usure, réduit à court terme la faculté des banques à répercuter la hausse du coût des ressources sur la tarification de la production nouvelle. Les effets du pincement temporaire des marges d’intérêt sur les revenus éponymes ont, à l’inverse, été limités par la croissance des volumes, le glissement annuel des encours des prêts au secteur privé non financier résident demeurant particulièrement dynamique, à +6,6 % en septembre 2022 selon les dernières données de la Banque de France. Au-delà de ces évolutions globales, les croissances individuelles d’encours et les stratégies de couverture mises en place contribuent à expliquer les écarts observés d’un groupe bancaire à l’autre. Au-delà des frontières françaises, les revenus des activités de banques de détail et, surtout, des services financiers spécialisés3 se sont montrés particulièrement dynamiques.

La volatilité a profité
aux activités de BFI

Les revenus de banque de financement et d’investissement ont progressé de manière significative. Les activités de marché ont, notamment, profité de la volatilité importante sur les marchés et sur les taux. Les activités de financement ont bénéficié du report de la demande des grandes entreprises vers les financements bancaires, désormais plus attractifs que les financements de marché, dont les coûts ont très fortement augmenté depuis le début de 2022. Les activités de banque d’investissement ont toutefois pâti de conditions de marché défavorables et de la baisse des volumes d’opérations. Dans leur ensemble, les activités de BFI ont bénéficié d’un effet change positif lié à l’appréciation du dollar.

Pour leur part, les revenus des activités de gestion d’actifs et d’assurance ont plutôt bien résisté, dans un contexte de marché défavorablement orienté. Le recul des marchés durant l’été s’est traduit par une baisse des actifs sous gestion, même si les activités de gestion de fortune et d’assurance ont été relativement épargnées. Les revenus, en recul par rapport au deuxième trimestre 2022, sont demeurés en hausse par rapport au troisième trimestre 2021.

Les grandes banques européennes ont, en moyenne, connu des croissances plus élevées de leurs revenus au troisième trimestre 2022 à la faveur, le plus souvent d’une proportion de taux variables plus élevée dans les portefeuilles de prêts de banque de détail (en Espagne par exemple). Cette dernière pourrait, a contrario, fragiliser certains emprunteurs et se traduire par une dégradation plus prononcée de la qualité des actifs en 2023. Une telle généralisation ne saurait s’appliquer, en revanche, aux groupes bancaires exclusivement orientés vers les activités de banque d’investissement et de gestion d’actif qui ont, pour leur part, connu des fortunes diverses au troisième trimestre.

Un effet de ciseaux négatif
en moyenne

Au cours des neuf premiers mois de 2022, les revenus et les frais de gestion ont, dans l’ensemble, progressé rigoureusement au même rythme. Mais au troisième trimestre, le ralentissement du produit net bancaire légèrement plus prononcé, en glissement annuel, que celui des frais de gestion s’est, en moyenne, traduit par un effet de ciseaux négatif et par une décélération du résultat brut d’exploitation plus sensible que celle du PNB. Que l’on considère les glissements annuels au troisième trimestre ou au cours des neuf mois 2022, deux groupes bancaires de l’échantillon ont enregistré des effets de ciseaux positifs ; les deux autres, présentant une moindre croissance de leurs revenus et plus largement dépendants des activités de banque de détail en France, ont connu des effets de ciseaux négatifs.

La hausse du coût du risque consacrée aux actifs sains

Le coût du risque agrégé des quatre groupes bancaires de l’échantillon s’est accru d’environ 45 % par rapport au troisième trimestre 2021. Il a été très largement constitué de provisions sur encours sains (stage 1 et 2) reflétant les anticipations d’une dégradation de l’environnement économique, ce qui réduira d’autant l’effort de provisionnement supplémentaire sur les actifs détériorés au cours des prochains trimestres. Pour l’heure, le coût du risque avéré (stage 3) exprimé en proportion des encours s’établit à des niveaux historiquement bas.

Sur les neuf premiers mois de l’année, le résultat agrégé de l’échantillon atteignait 18,4 milliards d’euros, en recul de 12,2 % par rapport aux neuf premiers mois de 2021. Cette baisse est exclusivement imputable, cependant, à la perte exceptionnelle comptabilisée au deuxième trimestre par la Société Générale à la suite de la cession de ses filiales russes Rosbank et d’assurance (3,2 milliards).

La hausse des taux d’intérêt n’a pas encore produit ses effets positifs sur les revenus des banques françaises. Les évolutions observées depuis le début de l’année 2022 montrent que les modèles d’activités les plus diversifiés ont permis d’absorber plus aisément le pincement transitoire des marges d’intérêts, voire d’en neutraliser les conséquences sur les revenus globaux.

Les banques françaises semblent bien positionnées pour faire face à la détérioration de l’activité économique attendue au tournant de l’année 2023. La qualité des actifs est élevée et la prépondérance des taux fixes sur le marché français est de nature à limiter la hausse de la sinistralité. Enfin, leurs modèles de banque universelle leur procurent, quoique à des degrés variables, un avantage indéniable au regard de concurrentes européennes, dont les activités sont davantage tributaires d’un marché national ou d’un type d’activité, qui peuvent certes se montrer ponctuellement plus performantes, mais moins endurantes au long cours.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº874
Notes :
1 Frais liés au fonctionnement du compte (frais CB, envoi de chéquier, paiement hors zone euro, virements interbancaires...).
2 Frais sur opérations sur titres ou parts d’OPCVM, droits de garde, etc.
3 Crédit immobilier, crédit à la consommation, crédit-bail, affacturage.
RB