Pour les banquiers et assureurs européens, il est désormais naturel de transmettre le reporting réglementaire CRD/BRRD (états Corep et Finrep) et Solvabilité 2 selon le langage commun XBRL, dérivé du XML et retenu en 2005 par la Commission européenne et les comités CEBS (Comité européen des superviseurs bancaires) et CEIOPS (Comité européen des contrôleurs d’assurance et de pensions professionnelles) devenus EBA (Autorité bancaire européenne) et EIOPA (Autorité européenne des assurances et des fonds de pension). On a presque pris goût aux taxonomies (dictionnaires des indicateurs) qui normalisent les exigences de reporting et les règles de validation, pour permettre un contrôle avant envoi au superviseur. Elles aident à identifier les données nécessaires, à formaliser les règles de cohérence et ainsi à réduire les coûts. Le format, désormais standard dans l’Union européenne et au-delà, est pris en charge par de nombreux éditeurs, avec un large éventail de produits et de services, à des prix raisonnables et permettant aux responsables de reporting de se concentrer sur le contenu, en oubliant la technologie de transmission.
Mais pour les plus grandes organisations, la taille des fichiers XBRL transmis peut s’avérer importante, jouant sur les besoins de stockage et de bande passante. Le reporting toujours plus granulaire souhaité par les autorités pèse sur les volumes. La solution est l’usage d’un format moins verbeux, comme le CSV (comma-separated values), pour comprimer l’information, en conservant néanmoins les avantages de normalisation, de structuration et de contrôle apportés par les taxonomies XBRL.
Le format XBRL-CSV n’est pas un simple fichier texte dans lequel les données sont séparées par des virgules, mais un groupe de fichiers liés à une taxonomie XBRL donnant la signification des données et les relations qui peuvent être vérifiées entre elles. XBRL-CSV permet d’échanger des fichiers pesant moins de 10 % du volume d’un fichier XBRL usuel. Le schéma donne une représentation d’une instance XBRL-CSV et sa comparaison avec une instance XBRL-XML, ainsi que les fichiers ajoutés dans la taxonomie.
La revue OIM
XBRL-CSV est né d’une revue stratégique du langage XBRL, appelée OIM (Open Information Model), pour renforcer l’interopérabilité avec des formats autres que XML. Dans ce cadre, le Comité normalisateur (XBRL Standard Board, XSB) de l’organisation XBRL International en charge du standard a simplifié les spécifications en faveur des développeurs et des utilisateurs. Des caractéristiques anciennes, non utilisées par les taxonomies actuelles, sont supprimées et des améliorations substantielles sont intégrées, en particulier pour les mécanismes de Calculations et Formulaes XBRL, qui permettent de décrire les règles de contrôle (additions et assertions plus complexes) au sein d’un document ou entre les documents.
La mise en œuvre
De nombreux éditeurs ont pris en compte les spécifications OIM dans leurs outils et proposent des processeurs OIM certifiés par XBRL International. Côté superviseurs, l’EBA a initié l’utilisation des nouvelles spécifications depuis la CRR 3.1 et souhaite rendre le format de remise XBRL-CSV obligatoire d’ici fin 2025, même si certaines évolutions au niveau des systèmes de validation XBRL sont encore à réaliser pour être totalement compatibles avec le format.
Les travaux ont permis une harmonisation des modèles entre l’EBA et l’EIOPA, avec un projet commun (DPM Refit, récemment renommé DPM 2.0) de modernisation du DPM (Data Point Model) et de l’architecture de la taxonomie. Mais il pourrait subsister des différences : l’EIOPA doit encore définir la structure XBRL-CSV qui sous-tendra le reporting des assureurs et le choix de l’EBA d’inclure les codes DPM (datapoint_ID) dans la taxonomie pour qualifier les données ne sera pas forcément retenu.
La nouvelle architecture, mise en place avec l’aide de l’association Eurofiling, répondra aux exigences du DPM 2.0 pour formaliser la définition technique en couche additionnelle aux spécifications XBRL existantes. La méthodologie DPM permet l’analyse des tableaux de reporting réglementaires pour générer la taxonomie, en définissant des codes basés sur la numérotation des états, des lignes et des colonnes pour identifier chaque cellule dans les tableaux de reporting. Les règles de validation sont rédigées sur cette base. Ainsi, les utilisateurs peuvent connaître le « datapoint_ID », qui relie la donnée aux gabarits réglementaires.
Les perspectives
Pour XBRL et le reporting réglementaire, le standard révisé OIM avec xBRL-CSV et XBRL-JSON (format léger de transmission en particulier utilisé pour les échanges entre une page web et un serveur) ouvre des possibilités de traitement de volumes importants de données.
Cela prend sens dans la démarche de reporting intégré initiée par la Banque Centrale Européenne (Integrated Reporting Framework, IReF) pour rassembler les collectes statistiques et prudentielles dans un dictionnaire rationalisé, en ne demandant qu’une fois chaque information, tant sur des données granulaires, pour les statistiques ou pour justifier les ratios, que sur des indicateurs agrégés, pour la supervision.
Pour les développeurs, c’est le moyen de maintenir des volumes raisonnables et des performances acceptables même pour des données transmises contrat par contrat, pour les plus grands établissements. Pour les banquiers, c’est l’espoir que le reporting mille-feuille actuel (dans lequel on ajoute un état et des indicateurs distincts pour chaque besoin de supervision, alors qu’ils sont calculés à partir de données sources communes) laisse place à une transmission unique de données élémentaires.