Square

Et en France ?

« Oui, une banque de détail islamique a sa place en France »

Créé le

02.05.2011

-

Mis à jour le

07.06.2011

Êtes-vous intéressés par le marché français ?

Sultan Choudhury. Nous nous y sommes intéressés il y a quelques années. Nous avions alors conduit une enquête marketing sur l’intérêt des consommateurs français pour les produits de finance islamique. Actuellement, le message qui circule dans le monde de la finance islamique en Europe est qu’elle peut fonctionner mais sur des activités de banque de gros, et non sur la banque de détail. Ce n’est pas mon opinion. Les fondations de la finance islamique reposent sur la croyance de certains consommateurs, qui souhaitent la transposer dans leur vie quotidienne. Je pense qu’il ne serait pas sage d’oublier cela et je n’ai aucun doute qu’une banque de détail islamique ait sa place en France.

Quels produits pourraient être prioritairement développés ?

Le financement d’un bien immobilier est un axe possible. Cela demande toutefois d’importantes adaptations par rapport au crédit immobilier traditionnel, sur lequel les banques françaises prennent de faibles marges, qui est à taux fixe et avec une maturité très longue. En Angleterre, les banques islamiques pratiquent plutôt des financements locatifs avec réévaluation des loyers [1] – ​ce qui se rapproche du taux variable –, car nous n’avons pas d’outils de couverture du taux fixe à long terme. Je pense que le positionnement du financement immobilier islamique devra être très différent de celui du prêt immobilier, et miser sur le concept de « louer pour acheter ».

Les musulmans de France sont-ils aussi sensibles à la finance islamique que ceux du Royaume-Uni ?

Globalement, on peut dire que 25 % des musulmans sont intéressés par les produits de finance islamique, que 50 % le sont si l’offre est compétitive et que 25 % n’y accordent pas d’importance. Sur le premier quart, une partie juge que la finance islamique n'est pas assez stricte. Nous nous adressons donc à une niche de niche. Mais en France, cette dernière est plus peuplée. Je crois que l’important n’est pas la taille du marché mais sa pertinence : permet-il à la banque d’atteindre son point mort ? Nous avons, au Royaume-Uni, le concept des « building societies », petites institutions financières, très locales pour la plupart. Elles ne s’adressent qu’à quelques milliers de clients, via 3 ou 4 agences. Mais leur activité est viable car elles sont adaptées au marché qu’elles ont à servir.

1 Il s’agit de la « diminishing musharaka ». La musharaka ne faisait pas partie des 4 contrats traités par les instructions fiscales d’août 2010 (sukuk, murabaha, ijara et istisna) mais le sera dans une autre qui devrait être publiée « très prochainement », selon les mots de Christine Lagarde le 4 mars dernier (NDLR).

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº737 bis
Notes :
1 Il s’agit de la « diminishing musharaka ». La musharaka ne faisait pas partie des 4 contrats traités par les instructions fiscales d’août 2010 (sukuk, murabaha, ijara et istisna) mais le sera dans une autre qui devrait être publiée « très prochainement », selon les mots de Christine Lagarde le 4 mars dernier (NDLR).
RB