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L’atout du marché chinois ? Son inefficience !

Créé le

08.02.2022

La deuxième économie mondiale a une importance croissante sur les portefeuilles des investisseurs. Ses performances passées sont décevantes. Ici, plus qu’ailleurs, la sélectivité est de mise.

La Chine n’a jamais joué un rôle plus grand sur la scène mondiale. De quoi, a priori, aiguiser l’appétit des investisseurs. Mais l’empire du milieu et les marchés financiers font-ils bon ménage ? Certes, le marché boursier chinois s’est ouvert sur le monde extérieur. L’inclusion d’actions chinoises de série A, originaires de Chine continentale, dans les grands indices mondiaux en est sans doute l’exemple le plus visible. Le marché boursier chinois est aussi devenu plus dynamique. Certaines des plus grosses sociétés technologiques, comme Tencent et Alibaba, ont la Chine comme port d’attache. En 2019, la Bourse Star de Shanghai a été lancée comme équivalente chinoise du Nasdaq : elle a vocation à être une plaque tournante permettant aux firmes chinoises les plus novatrices de se procurer des capitaux.

Si beaucoup de choses ont changé dans le pays, le statu quo demeure de mise sur nombre de thèmes. Le gouvernement chinois continue d’exercer son contrôle sur l’activité économique, comme en témoignent ses récents efforts pour se défaire de l’enseignement privé à but lucratif. La dépendance du pays à la dette pour alimenter sa croissance a fait une fois de plus les manchettes lorsque le groupe Evergrande, société de promotion immobilière, s’est retrouvé au bord du défaut de paiement.

Économiquement, la Chine se porte bien. De 1993 à 2020, son produit intérieur brut a augmenté de plus de 9 % par an. Les investisseurs, eux, n’ont non pas franchement profité (voir graphique 1). Au cours de la même période, l’indice MSCI Chine n’a gagné que 2,71 % par an. Dans le même temps, le MSCI États-Unis a gagné 10,37 % par an et le MSCI Marchés émergents 7,95 %. Clairement, les investisseurs auraient mieux fait d’allouer leur portefeuille en actions américaines, voire sur les pays émergents au sens plus large, que de miser sur la Chine !

Pourquoi donc des décennies d’expansion économique rapide ne se sont pas traduites par des gains proportionnels pour les investisseurs ? Les économistes ont conclu de longue date que le lien entre la croissance économique et les rendements boursiers est dans le meilleur des cas ténu, voire absent. Il y a des tas de raisons à cela. La plus forte est que les valorisations de début de période sont les meilleurs prédicteurs des rendements futurs. Mais il y a d’autres forces plus fondamentales en jeu. L’une d’elles, invoquée par le professeur de finances Jay Ritter, est particulièrement pertinente pour la Chine : « Un pays peut connaître une croissance rapide en y mettant plus de capitaux et de travail sans que ceux qui possèdent les capitaux gagnent des rendements plus élevés. » Ce qui laisserait à penser qu’un ralentissement de la croissance pourrait servir les intérêts des actionnaires…

L’investisseur moyen est encore peu investi directement en actions chinoises

En dépit de ses contre-performances boursières, la Chine voit son influence s’accroître. En octobre 2011, les actions chinoises ne représentaient qu’un peu plus de 17 % de l’Indice MSCI Marchés émergents. À la fin septembre 2021, soit près de dix ans plus tard, ce chiffre était passé à près de 24 % (voir graphique 2). Au cours de cette même période, la part de la Chine dans l’Indice MSCI Monde Tous Pays est passée de 2,2 % à 4,1 %. Par conséquent, dans un portefeuille hypothétique constitué à 60 % d’actions et 40 % d’obligations, la part occupée par les actions chinoises est passée de 1,3 % à 2,4 %. Donc, dans le contexte d’un portefeuille diversifié, les actions domiciliées dans la deuxième économie mondiale ne jouent encore qu’un petit rôle. Il conviendra de se le rappeler au prochain effondrement boursier de Chine continentale, comme celui du sauve-qui-peut des investisseurs particuliers en 2015.

Un terrain fertile pour la gestion active

S’ils ne veulent pas ignorer la Chine, les investisseurs devraient faire les difficiles quand ils y investissent. Ils pourront simplement, au besoin, décider que les risques n’en valent pas la peine. Ou au contraire, faire la chasse aux opportunités. Car paradoxalement, un accès difficile, l’ingérence du gouvernement et un public-cible constitué principalement de négociateurs locaux font du marché boursier chinois un environnement plein de cibles potentielles pour les investisseurs avertis. Les gérants professionnels y trouveront de nombreuses inefficiences de marché à exploiter. Ici, la recherche fondamentale est davantage récompensée. C’est peut-être le seul des grands marchés actions où une majorité d’investisseurs professionnels surclasse régulièrement l’indice de marché. Dans le dernier baromètre Morningstar actif/passif du marché chinois, les trois quarts des fonds d’actions chinoises gérés activement ont réussi à la fois à survivre et à surclasser la moyenne des fonds passifs (qui répliquent l’indice de référence du marché) par rapport à la décennie précédente. À titre de comparaison, seuls 19 % des fonds d’actions américaines activement gérés peuvent y prétendre au cours des 10 ans qui se sont terminés en juin 2021. Autrement dit, le marché américain est beaucoup plus efficient.

Pour les investisseurs prêts à franchir le pas, voici quelques idées de fonds d’actions chinoises appréciés par les analystes Morningstar : JPM China C Acc USD (Code Isin : LU0129472758), Schroder ISF China Opps A Acc EUR (Code Isin : LU2345993211), UBS Lux EF China Opportunities USD P EUR Acc (code Isin : LU2131365186), Fidelity China Focus Y-Acc-EUR (Code Isin : LU0936575868) ou encore FSSA China Growth VI EUR Acc (Code Isin : IE00BYXW3909). Histoire d’espérer que la prochaine décennie, soit boursièrement plus rentable pour ce marché que ne le furent les trois précédentes.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº866
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