Le projet de loi bancaire qui a été présenté en février dernier et qui devrait faire l'objet d'un examen par les parlementaires allemands cette année, semble au premier abord très proche du texte français qui pourrait être adopté en juin 2013. Ces ressemblances ne sont pas fortuites.
D'une part, la France et l'Allemagne ont plutôt mieux traversé la crise financière entamée en 2007 que la moyenne des pays d'Europe ou de la zone euro. Sur le fondement des
D'autre part, dans les deux pays, les lois bancaires de référence (1962 en Allemagne, 1984 en France) ont consacré le modèle de la banque universelle. Comme le souligne le rapport Liikanen, ce modèle a plutôt prouvé une bonne résistance pendant la crise et les régulateurs allemands et français inclinent à penser qu'il faut le garder, en améliorant sa résistance aux chocs et les conditions de résolution en cas de défaut lors d'une crise. Dans ces deux pays, la crise a touché une seule banque universelle, Commerzbank. Celle-ci s'était trouvée plus exposée, en raison d'acquisitions passées (formation du pôle Eurohypo) et récentes (prise de contrôle de Dresdner Bank fin 2008). En dehors de cela, les problèmes et les aides ont essentiellement concerné les Landesbanken, c'est-à-dire les banques régionales de gros du groupe public des Caisses d'Épargne (Sparkassen) et deux établissements très spécialisés,
L'Allemagne plus sévère avec les hedge funds ?
Le projet de modification de la loi bancaire allemande a été présenté le 6 février 2013 par le gouvernement allemand. Son objectif est de prévenir les risques et d'organiser la résolution des défauts. La loi comporte trois parties :
- 1. une simplification des procédures de réorganisation, grâce à la mise en place de plans de résolution précis ;
- 2. une séparation des activités risquées, pour ne pas mettre en danger les activités traditionnelles ou utiles qui reposent sur la collecte de dépôts ;
- 3. une responsabilité pénale pour les dirigeants de sociétés financières qui enfreindraient ou ignoreraient ces règles.
La prévention des crises passe aussi par une séparation des activités risquées et s'inspire, dans une certaine mesure, du rapport Liikanen. Le principe est qu'au-delà d'un certain seuil, les activités de trading pour compte propre devront être séparées. Les activités exclues comprennent aussi les prêts aux hedge funds, les prêts aux entités financières qui utilisent l'effet de levier (dette élevée) et dans les deux cas les garanties associées. Le seuil devrait être de 20 % du total de bilan ou de 100 milliards d'euros d'actifs (pour des banques dont le bilan est supérieur à 90 milliards d'euros). La tenue de marché pour le compte de client restera autorisée dans l'entité principale, avec une vérification ex-post par la BaFin du bien-fondé des opérations. Le régulateur aura aussi à sa disposition la possibilité d'interdire certaines activités en cas de besoin, comme les investissements sur des CDS nus. Compte tenu de ces spécifications il semble que de facto seule une partie très minime des activités serait concernée par la séparation.
Enfin le texte prévoit des sanctions pénales (jusqu'à 5 ans de prison) à l'encontre des dirigeants de banques en défaut qui doivent être aidées. Les articles 3 et 4 de la loi définissent précisément les responsabilités en termes de suivi et de contrôle des risques pour les banques et assurances.
Plus de similitudes avec la France que de différences
Ce texte présente de fortes similitudes avec le texte français sur les points clefs que sont les régimes de résolution et les modalités de définition des activités risquées qui devront être séparées (qui n'incluent pas la tenue de marché) ; au point que sur ces deux éléments les agendas sont communs : la mise en place commencera en 2014 et la séparation sera effective en juin-juillet 2015. On peut aussi relever que les deux ministères des Finances ont envoyé une réponse commune à la consultation qui a suivi la publication du rapport Liikanen.
Toutefois, il existe des différences : par exemple, le traitement réservé aux hedge funds est moins sévère dans la loi française puisque dès lors qu'un prêt est assorti d'une garantie, il peut demeurer dans la maison mère. Mais globalement, les réformes bancaires dans les deux pays se ressemblent assez largement ; ce rapprochement est fondé sur la résilience de leurs systèmes financiers supérieure à la moyenne européenne et s'explique par une présence forte de la banque universelle et par la cohabitation entre trois modes d'organisation bancaire : banque privée, banque coopérative et banque publique. De ce fait, la France et l'Allemagne partagent une vision commune de ce que doit être un système bancaire stable.