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Témoignage

« Il nous faudra créer une structure en dehors du Royaume-Uni »

Créé le

24.10.2016

-

Mis à jour le

28.10.2016

Cyrille Antignac, cofondateur d’une société d’impact investing aujourd’hui localisée à Londres, détaille les effets du futur Brexit sur son activité.

Quel sera l’impact du Brexit sur votre activité ?

Notre outil de travail est un fonds d’investissement réglementé et contrôlé par l’autorité financière du Royaume-Uni, capitalisé par des investisseurs qualifiés, personnes privées ou  institutions, quasiment toutes britanniques. Avec le Brexit, il est vraisemblable que les sociétés financières du Royaume-Uni ne bénéficieront plus du passeport européen pour vendre leurs produits en Europe ; or, notre fonds levé en 2014 étant aujourd’hui complètement investi, notre stratégie initiale était de lancer une deuxième opération sur la même plate-forme, soit sous forme d’un deuxième fonds ou simplement sous forme d’un compartiment du premier fonds. Mais si nous voulons toucher des investisseurs européens, au-delà du Royaume-Uni, nous risquons d’avoir du mal à le faire. Il nous faudra recréer une autre structure en dehors du Royaume-Uni.

Où allez-vous créer cette structure ?

Nous allons probablement créer une société de gestion en France, agréée par l’AMF, car nous y avons gardé un réseau d’affaires que je compte redynamiser, sans oublier nos liens personnels et familiaux. Mais reste à savoir sur quelle Place lever les capitaux… Comme nous investissons en Asie du Sud Est, nous pourrions cibler Singapour, mais comme nous démarchons principalement des clients européens, la Place luxembourgeoise est l’environnement le plus accueillant. Notre activité reste un produit de niche et ne présente pas d’effet d’échelle qui justifierait un investissement important dans la chaîne de traitement fiduciaire. Nous cherchons donc à nous greffer sur une plate-forme existante, qui nous offrira les services réglementaires et fiduciaires nécessaires.

La France a-t-elle des attraits particuliers dans cette perspective ?

Nous raisonnons plus Europe que France ! Pour nous, le terrain de jeu s’étend à tout le continent européen. En outre, il n’existe pas de spécificités dans le marché français qui le rendent particulièrement attractif. Même les sociétés de gestion installées et réglementées en France gèrent souvent leurs capitaux au Luxembourg qui présente un arsenal réglementaire et opérationnel plus favorable : par exemple le trust n’existe pas en France, ce qui crée d’emblée un handicap en termes de gestion d’actifs.

Souhaitez-vous, de façon pragmatique, le maintien sous une forme ou une autre du passeport européen ?

Il faut en effet être pragmatique : la sortie de l’UE doit-elle systématiquement signifier la fin du marché unique ? Tout le monde, y compris dans les milieux d’affaires britanniques, se pose des questions à ce sujet, mais personne n’a envie que cela coûte cher et empêche le business. Donc nous anticipons qu’au-delà d’un discours politique affirmé sur l’euroscepticisme, le gouvernement britannique va proposer un scénario plus proche de celui de la Norvège ou de la Suisse que celui d’une coupure complète avec l’Europe continentale.

Propos recueillis par E.C.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº801