La banque allemande Commerzbank a de nouveaux alliés dans sa croisade contre les taux négatifs de la BCE. Le chef économiste de la Fed de Saint
Que dit la théorie ?
Pour simplifier, le principe applicable en termes de rémunération diffère selon qu’il s’agit de réserves obligatoires ou excédentaires (i. e. au-delà des réserves obligatoires). Les premières n’ont pas vocation à circuler et devraient donc être rémunérées à un taux voisin de celui des opérations principales de refinancement afin de limiter le coût d’opportunité supporté par les banques. En revanche, les réserves excédentaires peuvent être rémunérées à un taux inférieur, qui constitue le plancher du corridor dans lequel évoluent les taux du marché interbancaire (aucune banque n’ayant intérêt à prêter à un taux inférieur au taux de rémunération de ces réserves excédentaires) afin d’encourager la circulation des excédents de monnaie centrale entre les banques commerciales. Le coût d’opportunité associé à un taux négatif peut être théoriquement neutralisé par sa transmission aux ressources bancaires. En pratique, les obstacles sont toutefois multiples. Tout d’abord, la mise en place de taux négatifs sur les dépôts est légalement et/ou commercialement difficile et se limite à certaines clientèles (financière, institutionnelle). Ensuite, les agents préféreront toujours détenir de la monnaie fiduciaire plutôt que des passifs bancaires à taux négatifs (limite connue sous le nom de « zero lower bund »). Enfin, l’existence de produits d’épargne à taux réglementés rémunérés à des taux sensiblement supérieur à zéro (comme le Livret A, le PEL par exemple en France) complique encore la donne. En conséquence, toute tentative d’abaisser les taux des dépôts bancaires en deçà de zéro entraînerait une explosion de la demande de cash ou des transferts vers des ressources bancaires plus coûteuses, à l’encontre de l’objectif poursuivi. La pénalité sur les réserves est donc coûteuse. Une partie de ce coût est absorbée par les banques (érosion des marges d’intérêts), l’autre est répercutée (hausse des taux des prêts, des commissions).
Des réserves excédentaires qui n’en sont plus tout à fait
Théoriquement, lorsque la hausse des réserves excédentaires relève de comportements de précaution, l’écartement du spread entre le taux de refinancement et le taux de dépôts est de nature à stimuler le marché interbancaire. Au cours des dernières années, l’accumulation de réserves a eu des origines bien différentes. La première découle de la nécessité pour les banques de se conformer au Liquidity Coverage Ratio (le seuil réglementaire est de 70 % en 2016 mais le niveau moyen de l’ordre de 120 % au 30 juin 2015 selon l’EBA suggère des exigences implicites de marché plus élevées). Une partie des réserves excédentaires au sens de la politique monétaire sont donc, sinon obligatoires (puisque d’autres actifs sont éligibles), constitutives d’actifs hautement liquides exigés par le régulateur. La deuxième cause réside dans les achats d’actifs de la BCE qui gonflent les réserves auprès de la BCE au-delà de la liquidité que les banques empruntent auprès d’elle. De fait, une fraction croissante des réserves n’a plus pour contrepartie des lignes de refinancement auprès de la BCE et ce phénomène va s’amplifier avec l’élargissement des achats mensuels de la BCE de 60 à 80 milliards d’euros depuis avril 2016. La neutralisation du coût d’opportunité par les nouvelles opérations de refinancement TLTRO II (dont le taux pourra potentiellement descendre à -0,4 %, identique à celui sur les réserves) entre juin 2016 et juin 2017 sera donc partielle. Le relèvement du seuil à partir duquel le taux négatif devrait s’appliquer – bien au-delà des réserves obligatoires stricto sensu – mérite d’être étudié.