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Change/taux

Patience et longueur de temps

Créé le

12.12.2017

-

Mis à jour le

22.12.2017

La Réserve fédérale comme la Banque Centrale Européenne amorcent, à pas comptés, la normalisation de leur politique. Pourtant, on est loin de l’objectif d’inflation (2 %, pour faire bref). Mais les politiques monétaires doivent être préventives – il faut plusieurs trimestres pour qu’une hausse de taux agisse sur l’économie, selon la Réserve fédérale –, or les prix semblent enfin donner des signes, certes encore modestes, d’accélération. Bien sûr, la croissance économique est modérée, mais elle est supérieure au potentiel, ce qui permet au taux d’utilisation des capacités d’augmenter, ce qui est usuellement un assez bon précurseur de l’inflation. On peut aussi observer que les résultats d’enquête montrent une légère hausse des anticipations, celles des entreprises comme celles des ménages. Signalons aussi que la Réserve fédérale de New York a mis au point un indicateur de l’inflation sous-jacente ; à la différence des mesures usuelles, il n’exclut pas tel ou tel article du panier de la ménagère (l’alimentation, ou l’énergie, ou les prix les plus volatils) mais, à partir de quelque 300 variables, extrait le facteur commun statistiquement le mieux corrélé à l’inflation. Selon cette mesure, on serait à 2,95 % ! Ce n’est pas tant, d’ailleurs, ce niveau en lui-même qui est frappant que l’accélération depuis un an (0,9 point de pourcentage). Certes, la hausse de l’inflation est beaucoup plus lente que d’habitude. Faut-il penser que les mécanismes traditionnels ont disparu ? sans doute pas : qu’ils soient plus lents ou de moindre ampleur est une évidence, et les explications seraient nombreuses, qu’ils aient disparu est très improbable. Mais pourquoi tant tenir à faire remonter l’inflation ? Après tout, la stabilité des prix, stricto sensu, serait une inflation nulle, et on pourrait imaginer que cela favorise le pouvoir d’achat. L’image souvent utilisée de l’huile dans les rouages est assez fondée. Comme les prix relatifs s’adaptent sans cesse, une inflation nulle suppose que certains prix, ou certains salaires, baissent : pas si simple, en dehors des cas de progrès technique rapide comme l’informatique. Une inflation légèrement positive facilite aussi la vie des banques centrales : il est évidemment plus aisé d’obtenir un taux directeur réel négatif si l’inflation est positive que si elle est nulle. Enfin, même si peu de gouvernements ou de banques centrales l’avoueront, un peu d’inflation facilite la résorption (presque) indolore des dettes…

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº815