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Dette grecque

Sauvetage de la Grèce sous condition

Créé le

22.06.2011

-

Mis à jour le

29.06.2011

« Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras » dit la fable. Réuni le 20 juin, l’Eurogroupe a réussi à définir les termes d’un compromis visant à sauver la Grèce de la banqueroute, mais il a conditionné son aide par l’adoption d’un plan d’austérité devant le Parlement grec. C’est chose faite. Dans la nuit du 21 au 22 juin, celui-ci a voté en faveur du plan du gouvernement de Georges Papandreou. Au programme, 50 milliards d’euros de recettes nouvelles issues de la privatisation de nombre d’infrastructures, ainsi que des économies budgétaires supplémentaires, à hauteur de 28 milliards d’euros. L’Eurogroupe doit se réunir le 3 juillet pour statuer sur le déblocage de la 5e tranche du plan d’aide accordé en mai 2010, s’élevant à 12 milliards d’euros (sur un total de 110 milliards).

Ce vote donne un peu d’air à un pays plombé par des recettes fiscales moins importantes que prévu (près de 2 milliards d’euros de manque à gagner) et un alourdissement du service de la dette (en hausse de 8,3 % sur un an, à 5,844 milliards d’euros). Conséquence, la Grèce s’est brutalement trouvée confrontée à l’impossibilité de faire appel aux marchés à partir de 2012, comme le prévoyait initialement le plan de sauvetage imaginé par le FMI et l’Union européenne de 2010. Le principe d’un nouveau plan d’aide a donc été acté après d’âpres débats.

Les modalités d’octroi et la composition de ce plan, qui devrait avoisiner les 110 milliards d’euros, sont encore en négociation. Selon Jean-Paul Gauzès, eurodéputé, « on n’évitera pas une restructuration de la dette de la Grèce. »L’Eurogroupe en a convenu à demi-mot, en appelant de ses vœux le 20 juin « l’implication volontaire du secteur privé, sous la forme de roll-over informels et volontaires de la dette grecque arrivée à maturité ». Il s’agit d’éviter de provoquer le moindre événement de défaut, synonyme de faillite pour la Grèce. C’est possible, selon Jean-Paul Gauzès, à condition que les créanciers renoncent aux clauses de défaut croisées liées aux titres de dette grecque [1] .

Les agences de notation dans le rôle du pompier pyromane

Et les banques dans tout ceci ? Depuis plusieurs semaines, leur capacité à résister à un défaut de la Grèce a suscité nombre de débats. Les agences de notation n’ont pas été étrangères au mouvement d’inquiétude qui a agité les marchés. Ainsi, suite à la dégradation de la note grecque – de B à CCC – par Standard&poor’s, Moody’s a annoncé le 15 juin une revue des notes de trois banques françaises avant de se prononcer sur une éventuelle dégradation. Une épée de Damoclès qui n’a pas été du goût de tous : « Ce serait une mesure assez choquante, commente Jean-Paul Gauzès , dans la mesure où les établissements bancaires ont conservé des titres grecs dans leurs bilans à la demande des autorités publiques. Ce faisant, elles ont contribué à un peu de stabilité. »

Depuis l’annonce d’un consensus européen, les agences se veulent rassurantes et amorçaient dès le 21 juin un changement notable dans leur analyse des risques. Moody’s est à l’origine de la volte-face la plus marquante [2] : « La probabilité d’une contagion due à un défaut sur la dette souveraine grecque reste plus faible que n’ont pu le laisser croire les récents gros titres ». Fitch affiche également son soutien au plan d’aide européen [3] : « L’exposition des banques commerciales européennes au risque souverain grec n’est pas assez importante pour justifier que le marché se préoccupe des conséquences d’une quelconque restructuration sur la solvabilité desdits établissements. »

Standard&Poor’s n’a pas encore fait connaître sa position, elle qui promettait une nouvelle dégradation de la note grecque, et ce quelle que soit la nature de l’aide.

A. M.

1 Dans les contrats internationaux, et notamment les contrats de prêt internationaux, existent des clauses appelées « clauses de défaut croisées ». Si le débiteur ne rembourse pas dans les termes et conditions prévus par ce contrat, cela a pour effet de créer la déchéance du terme pour tous les autres contrats. 2 Greek Sovereign Debt Default Probability Drops on Agreement Between Germany, France, Moody’s, 21 juin 2011 3 European Bank Exposure to GIPs:Second Order Risks More of a Concern Than Direct Holdings of Sovereign Debt or Bank Exposures, Fitch Ratings, 21 juin 2011

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº738
Notes :
1 Dans les contrats internationaux, et notamment les contrats de prêt internationaux, existent des clauses appelées « clauses de défaut croisées ». Si le débiteur ne rembourse pas dans les termes et conditions prévus par ce contrat, cela a pour effet de créer la déchéance du terme pour tous les autres contrats.
2 Greek Sovereign Debt Default Probability Drops on Agreement Between Germany, France, Moody’s, 21 juin 2011
3 European Bank Exposure to GIPs:Second Order Risks More of a Concern Than Direct Holdings of Sovereign Debt or Bank Exposures, Fitch Ratings, 21 juin 2011