Square

Marchés financiers

L’AMF milite pour une définition du « market making »

Créé le

22.08.2013

-

Mis à jour le

29.08.2013

En juin et début juillet derniers, l'AMF a observé une baisse de liquidité sur le marché des obligations souveraines, qui pourrait s'expliquer en partie par l'évolution de l'activité de tenue de marché des banques. Pouvez-vous expliquer ce mécanisme ?

En raison des nouvelles règles prudentielles (Bâle III, NDLR), les banques réduisent la taille de leurs bilans et détiennent en stock moins d'actifs dont le coût prudentiel [1] est élevé, ce qui pourrait entraîner une réduction de leur activité de market maker. C'est ainsi que pourrait s'expliquer une partie de la baisse de liquidité observée au début de l'été sur le marché des obligations souveraines, au-delà des effets bien connus liés aux inquiétudes sur les dettes souveraines ou aux fondamentaux économiques. Afin notamment de contrer cette tendance qui pourrait avoir un impact sur la liquidité structurelle, nous militons pour qu'il y ait une définition claire et harmonisée du market making en Europe.

La tenue de marché n'est-elle pas déjà définie ?

À ce jour, une définition claire et harmonisée n'existe pas, le market making étant défini de manière divergente d'un texte européen à l'autre : Marchés d'instruments financiers, Abus de marché, Règlement Ventes à découvert… Et le rapport Liikanen estime qu'il est impossible de définir la tenue de marché, trop proche du « compte propre pur ». Pourtant, ce n'est pas mission impossible puisque la France (avec la loi de régulation et de séparation des activités bancaires et la TTF) et les États-Unis (avec la règle Volker) sont arrivés à proposer une définition.

Quelle est votre vision d'une bonne définition du market making ?

Le market making sain et utile à l'économie doit être défini comme un service d'investissement, c'est-à-dire un service rendu au client pour un coût et un risque maîtrisés, et être différencié du trading pour compte propre. Grâce à cette distinction, les actifs détenus en stock par les banques au titre du market making, qui constitue une activité peu risquée, devraient en principe être moins coûteux prudentiellement. Cette logique se trouve à la frontière entre, principalement, deux corpus réglementaires distincts : MIF et CRD. S'impose donc un lourd travail d'harmonisation.

Une même définition devrait être établie pour l'ensemble des régulations et pour les différentes formes de market making, qu'il soit exercé sur les plates-formes de négociation ou de gré à gré par les banques. Ce socle commun s'accompagnerait bien sûr de règles de niveau 2 adaptées aux différentes classes d'actifs traités, à leur liquidité, à la présence et à la nature d'éventuelles plates-formes de négociation, etc.

Un encadrement est-il nécessaire ?

En effet, le market making doit également être encadré. Les trois grands critères proposés par la loi bancaire française sont très pertinents et pourraient inspirer les textes communautaires : présence régulière sur un marché ; écarts de prix raisonnables ; tailles d'ordres minimales. J'ajouterais le critère d'une rémunération modérée des traders. De façon générale, d'autres règles de nature plus prudentielle sont bien sûr souhaitables. Ce travail d'encadrement avance bien dans MIF 2 pour le market making effectué sur les plates-formes de négociation. Il est moins satisfaisant pour le market making de gré à gré effectué par les banques. Dans ce domaine, la tâche du régulateur est délicate, car un encadrement trop strict peut a contrario étouffer le market making, qui doit donc bénéficier de paramètres adaptés.

 

1 Les règles prudentielles obligent les banques à placer une certaine quantité de fonds propres en face des différents types d’actifs détenus et à maintenir des ratios de liquidité suffisants.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº763
Notes :
1 Les règles prudentielles obligent les banques à placer une certaine quantité de fonds propres en face des différents types d’actifs détenus et à maintenir des ratios de liquidité suffisants.