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Enquête

La fonction Organisation survivra-t-elle à la transformation numérique des banques ?

Créé le

05.12.2014

-

Mis à jour le

24.12.2014

Depuis 20 ans, Trend Consultants-Cabinet Solucom mène une étude biennale sur l'évolution de la fonction Organisation dans le domaine du tertiaire financier. Pour l'édition 2014, soixante-dix entreprises ont été interrogées et les avis convergent vers une mutation profonde de son rôle et de ses missions.

Sous l'impulsion de la transformation numérique, la banque change de visage. Un consommateur connecté, plus éclairé et mieux informé a vu le jour. Effet miroir de ce changement d'attitude, le collaborateur 2.0 a également émergé. Le digital s'érige en fil rouge pour guider et structurer les mutations vécues par le secteur. Face à ces transformations, sur quelles ressources la fonction Organisation doit-elle s'appuyer pour résister ? Comment asseoir sa légitimité en tant que partenaire de choix pour guider la banque dans cette période troublée ?

Les solides atouts de la fonction Organisation

Selon l'étude menée par Trends Consultants-Cabinet Solucom, le pilotage de projets transversaux, en interaction avec les autres métiers, arrive en tête des attributions de la fonction. Vient ensuite au deuxième rang, et en progression constante, la conduite du changement. Le déploiement de nouveaux outils et l'organisation des structures du siège représentent quant à eux environ un quart des missions. Confirmée comme « transverse », la fonction Organisation intervient de manière croissante sur la gestion du portefeuille de projet. Elle est présente sur l'assistance et l'accompagnement méthodologique des chantiers portés par les métiers. Les contributions à la transformation numérique connaissent une croissance significative depuis deux ans.
En une douzaine d'années, la proportion de structures au rang de direction a doublé, passant de 21 % en 2002 à 41 % cette année. Plus de la moitié de celles-ci sont rattachées à la direction générale ou à un membre du directoire. Quant au lien avec les directions informatiques, il ne concerne plus que 17 % d'entre elles. Positionnée à des niveaux supérieurs avec des responsables membres des comités de direction, la fonction Organisation est aujourd'hui reconnue. Une place qu'elle a conquise en étant rigoureuse sur les méthodes – près de 80 % des missions sont menées avec une « boîte à outil » standard – et convaincante auprès des directions : les métiers ne sont plus de simples clients ou contributeurs, ils sont devenus acteurs des projets.

Le renouvellement impératif des équipes

98 % des responsables Organisation sont convaincus que le numérique va entraîner l'ouverture de nouveaux chantiers. Ils se disent certains à plus de 90 % de la capacité de leurs équipes à conduire des projets et confiants, pour plus de 60 % d'entre eux, vis-à-vis de la compétence en « pilotage du changement » développée par leurs
équipes. Pour autant, des doutes persistent. Interrogés sur l'avenir de la fonction, 20 % d'entre eux n'ont pas de visibilité sur l'évolution des effectifs, près de 50 % pensent que ces derniers resteront stables et seulement 25 % prévoient une augmentation. Comment ces responsables conjuguent-ils cette situation et la prévision d'ouverture massives de projets liés à la transformation numérique ?
Avec plus ou moins de retenue, ils évoquent le besoin de renouvellement des équipes. S'ils valorisent la contribution des « pionniers du numérique », ils souhaitent s'attacher la collaboration de digital natives. L'objectif ne se limite pas à la préparation de la relève, il s'agit, aussi, de dépasser des pratiques et des réflexes constitués aux temps de
l’analogique. En 2014, les deux tiers des collaborateurs ont plus de quarante ans, 77 % sont dans la fonction depuis plus de cinq ans. Cette proportion, jamais atteinte depuis 20 ans, a bondi de plus de 20 points en 10 ans. Les quelques recrutements sont majoritairement issus de la mobilité interne et l'embauche de jeunes diplômés demeure marginale.
Pour ne pas s'étioler, la fonction Organisation a besoin de se renouveler, d'accueillir de nouveaux profils, de se confronter à de nouvelles approches et de nouvelles méthodes. Les responsables rencontrés sont généralement conscients de cette réalité. Ils perçoivent la transformation numérique comme l'opportunité de ce dépassement.

Une culture-métier forte sur laquelle s'appuyer pour évoluer

La fonction Organisation reste synonyme d'une culture d'alignement sur les meilleures pratiques, d'intégration du progrès technique pour améliorer la performance et la
compétitivité. Cheville ouvrière du déploiement des outils dans l'entreprise, la fonction Organisation est l'un des tout premiers vecteurs de la transformation numérique. La virtualisation des traitements, le déploiement des workflows, la dématérialisation des supports ou documents et l'implémentation de GED  : ce sont les résultats concrets des dix dernières années de travail des
organisateurs. L’innovation est une manière différente d'aborder l'évolution et le développement de l'entreprise. Il s'agit d'intégrer les nouveaux objets – matériels ou immatériels –, porteurs de valeur et d'usages. La banque ne peut rester à l'écart de ces évolutions et doit au contraire s'en emparer et renouveler son métier. La fonction Organisation, rompue aux déploiements « d'outils » est à même de déployer ces « objets ». Ce qui lui manque, c'est l'anticipation, la veille technologique et sociétale, la sensibilité aux bruits faibles qui annoncent les
transformations. Indispensable pour les missions de déploiement d'outils, la fonction Organisation est néanmoins bousculée par des fonctions montantes. La création de « directions du changement », orientées ressources humaines, réduit son champ d'action. Les progrès en matière d'animation de la performance des « directions du contrôle de gestion » limitent son besoin d'intervention. Si elle affirme sa volonté d'accompagner la banque dans la transformation numérique, elle devra regarder derrière elle. Les principaux obstacles pourraient être près d'elle, très près.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº779