Square

Système d’information bancaire

Conjuguer legacy et API pour rester compétitif

Créé le

18.11.2020

Les données et la robustesse des systèmes d’information sont deux atouts des banques traditionnelles à réseaux, mais pour rester compétitives, elles doivent faire évoluer ces derniers grâce aux API et aux solutions de gestion des données.

 

Partout en Europe, la crise consécutive à la pandémie de la Covid-19 a servi de révélateur de tendances déjà bien établies, et ce notamment dans le domaine bancaire : tropisme digital de plus en plus marqué des clients, risques de cyberattaques beaucoup plus élevés, réduction drastique du nombre d’agences bancaires… Le tout dans un contexte concurrentiel exacerbé avec, d’un côté, la montée en puissance des néobanques et des FinTechs, et, de l’autre, la meilleure santé des concurrents américains, notamment dans le domaine de la banque d’investissement.

La nécessaire évolution du système d’information des banques

Les banques européennes, et en particulier les établissements français, doivent revoir leur modèle selon trois axes : réduction des coûts, digitalisation accrue et diversification vers de nouveaux services. Selon un rapport du cabinet de conseil Alvarez & Marsal publié au début de l’été 2020 et intitulé « Banque de détail, un modèle économique à bout de souffle ? », les acteurs concernés se retrouvent pris dans un redoutable effet ciseau, face à la baisse de leurs revenus et à la hausse significative du coût du risque, jusqu’à présent relativement contenu, en raison de la pandémie. Selon Alvarez & Marsal, « les banques de détail subiraient une baisse du résultat d’exploitation de 10,6 milliards d’euros dans un scénario de crise modérée (chute du produit net bancaire de 8 % et hausse du coût du risque de 200 %) ». Dans le même temps, la Banque Centrale européenne (BCE), tançait ces mêmes banques au sujet de leur vision trop optimiste de la résilience de leurs systèmes d’information dans les domaines de la gestion de la qualité des données et du risque IT. Un avertissement à sérieusement prendre en compte mais à relativiser cependant. Si le nombre de cyber attaques visant les banques dans le monde a effectivement triplé pendant le confinement, entre février et avril 2020 (+283 % selon une étude VMware Carbon Black), une étude de Moody’s reprenant ces chiffres souligne que « les banques ont développé des outils de plus en plus sophistiqués pour prévenir les risques cyber. L'automatisation de la cybersécurité est désormais supérieure dans le secteur financier par rapport aux autres secteurs. »

Les données : l’avantage concurrentiel des banques traditionnelles

Or les données et la robustesse de leurs systèmes d’information sont deux atouts des banques, et plus particulièrement leurs données clients, qui représentent un avantage concurrentiel certain. Les banques traditionnelles disposent en effet de données relatives à plusieurs millions de clients sur des dizaines années, voire plus pour certaines entreprises. Comparé aux millions d’utilisateurs de N26 ou de Revolut en France, acquis ces dernières années et sur un panel de services assez restreint au regard de l’offre d’une grande banque généraliste, on remarque que ces données sont la condition sine qua non pour proposer de nouveaux services plus adaptés aux clients, alimentés notamment par de l’intelligence artificielle. C’est ce qui fait défaut aux FinTechs, même si elles se dotent d’un système d’information dans l’état de l’art, en tirant parti du meilleur des nouvelles technologies.

Exploiter au mieux ces données

Cependant, pour exploiter ces données, encore faut-il s’en donner les moyens. Les systèmes d’information des grandes banques traditionnelles sont des millefeuilles agrégeant des technologies à la fois récentes et plus anciennes. En effet, l’arrivée d’une nouvelle technologie ne balaie pas la plus ancienne mais conduit naturellement les deux à cohabiter… Se réinventer ou réussir sa transformation digitale n’est ainsi pas une mince affaire ! Et c’est là où le bât blesse pour les grandes banques. Sans compter leur organisation en silo qui démultiplie les bases de données et autres systèmes de stockage des données. Ainsi, une grande banque anglaise s’est aperçue qu’elle possédait des centaines de copies de données relatives à des comptes clients. Un autre établissement, britannique également, construit par multiples acquisitions en une vingtaine d’années, a dû gérer quelque 150 processus d’intégration de données entre différents systèmes. Bien évidemment, cela a des répercussions en termes d’efficacité, de coûts et de qualité des données.

Si les grandes banques traditionnelles bénéficient d'une longueur d'avance sur les néobanques en raison de l'historique de leurs données clients, elles doivent en revanche s’appuyer sur des APIs pour proposer de nouveaux services. En effet, les APIs ouvrent leurs systèmes d’information à des services complémentaires pour leurs clients, et contribuent à les positionner de façon compétitive et attrayante. Les données provenant de leurs systèmes historiques dits 'legacy', corrélées avec des données générées par les services basés sur les API, vont enrichir la connaissance comportementale des clients des banques et permettre à ces dernières de proposer des services adaptés au fil de l'eau. En étant capables d’intégrer et de corréler leurs données « on-premise » avec celles provenant du cloud avec le support de plateforme d'intégration hybride, les banques font évoluer leur business model et répondent également à l’impératif d’adaptation de réglementations, telles que la DSP2.

Des architectures informatiques orientées cloud et basées sur des AP

Depuis plusieurs années, les grandes banques se sont donc mises en ordre de marche pour gérer au mieux leurs données. Une grande banque française a par exemple initié, dès 2014, plus de 15 projets dans ce domaine. Ainsi, la banque peut migrer certaines de ses applications sans renoncer à son système d’information dit « legacy ».

Une autre banque française traditionnelle, en intégrant des données provenant de systèmes hétérogènes dans une plateforme API, a éliminé de multiples processus d’intégration et de validation de données, chronophages, rigides et coûteux. En moins d’un an, elle est parvenue à intégrer plus de 1 000 flux de données en provenance de plus de 45 partenaires différents.

Autre exemple, l’établissement britannique aux 150 processus d’intégration de données a redéfini l’architecture de son système d’information hétéroclite pour qu’elle soit entièrement centrée sur les données clients. Cette nouvelle architecture est orientée cloud et basée sur des API. Les bénéfices ne se sont pas fait attendre : 150 processus d’intégration de données ramenés à 15 et réduisant ainsi les coûts, avec une meilleure connaissance des clients, une augmentation des capacités d’analyse, la mise en place d’un système de sécurité plus sûr mais surtout une capacité d’innovation décuplée, avec des technologies open source et non plus seulement des logiciels propriétaires.

Sans big bang ni révolution, les grandes banques établies font évoluer leurs systèmes d’information avec une meilleure qualité de la gestion de leurs données. Cela leur donne plus d’agilité, et surtout, décuple leurs capacités d’innovation pour mettre au point des services mieux adaptés aux besoins de leurs clients, plus diversifiés, tout en respectant la régulation toujours plus stricte. En un mot, en tirant parti du digital, elles seront en mesure de retrouver leurs atouts concurrentiels vis-à-vis des FinTechs et autres néobanques bénéficiant de technologies récentes et homogènes.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº850