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Cas pratique

Le régulateur suisse et les modèles : « Ne pas se substituer au bon sens »

Créé le

03.03.2016

-

Mis à jour le

25.03.2016

« Les modèles internes de calcul des risques financiers se sont fortement répandus il y a un peu plus de vingt ans. Il était soudain à la mode, pour les banques, d’engager des physiciens. Tant le management des banques que les autorités de surveillance étaient convaincues que la modélisation des phénomènes naturels apporterait de précieux enseignements pour la modélisation interne des risques financiers. Comme le passé récent l’a démontré, cette vision des choses fut un échec généralisé. » Ainsi s’exprimait en mars 2015 [1] Mark Branson, directeur de l’Autorité de surveillance des marchés financiers suisse, la FINMA. Pour lui, le fonctionnement des marchés est trop dicté par les comportements humains, prompts à la peur, à l’avidité et à l’instinct grégaire, pour que ses évolutions futures soient modélisables sur la base des événements passés. Et de citer des banquiers s’étonnant de voir advenir plusieurs jours d’affilée des événements ne pouvant arriver, selon les modèles, qu’extrêmement rarement. « Une banque nous a ainsi demandé récemment de ne pas tenir compte de la date du 15 janvier 2015 – et donc de la suppression du taux plancher [du franc suisse, ndlr] – dans le calcul de son risque de marché. Le plus surprenant était la justification de cette demande : un événement comme celui-ci ne saurait se reproduire… », relatait ainsi Mark Branson. « Il est pourtant clair que les modèles internes de risque ne peuvent se substituer au bon sens. »

Pour lui, corriger les modèles défaillants en les rendant encore plus complexes n’est pas une solution. Il veut au contraire des modèles « moins nombreux et plus simples », sans pour autant y renoncer. La FINMA a ainsi pris plusieurs mesures. Un moratoire conduit à ne plus autoriser de modifications des modèles qui rendent les pondérations « matériellement plus basses ». Un multiplicateur, sorte de floor inversé, vient augmenter la pondération trouvée via les modèles internes pour certaines classes d’actifs trop favorablement traitées. Les établissements doivent également publier les différences obtenues entre la méthode standard et les modèles internes. Enfin, le régulateur suisse a été un des premiers à significativement relever les exigences en matière de ratio de levier, fixées à 5 % pour ses établissements systémiques. Un chemin que suit actuellement le Comité de Bâle. S.L.

 

1 « Tout modèle a ses limites » : conférence de presse annuelle du 31 mars 2015.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº795
Notes :
1 « Tout modèle a ses limites » : conférence de presse annuelle du 31 mars 2015.