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Bibliographie : "La liberté contractuelle du banquier – Réflexions sur la sécurité du système financier" et "Les Sûretés – La Publicité Foncière"

Créé le

05.12.2014

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Mis à jour le

12.05.2016

La liberté contractuelle du banquier – Réflexions sur la sécurité du système financier

Anthony Maymont, Lextenso éditions, collection des thèses du centre Michel de l’Hospital, 603 pages, 40euros

 

Ainsi que l’observe Anthony Maymont dans une longue et passionnante introduction, si la liberté contractuelle du banquier est une liberté parmi d’autres, sa singularité tient à ce que cette liberté peut avoir des répercussions sur son activité et sur la sécurité du système financier, en facilitant le phénomène des « bulles », dont les récentes crises financières fournissent une parfaite illustration. Le contrat étant au cœur de l’activité bancaire a conduit l’auteur à étudier l’ensemble des opérations bancaires nationales et internationales, notamment celles les plus risquées, et à mesurer la part de la liberté contractuelle dans ces opérations avec l’objectif, non pas d’en exclure toute liberté, mais d’en proposer le degré souhaitable, afin de concilier ce besoin de liberté contractuelle avec celui de sécurité du système financier, nécessaire à la pérennité des banques et à l’équilibre de l’économie mondiale. Au résultat de cet inventaire, l’auteur constate, à contrecourant de l’opinion générale, qu’en droit bancaire et financier, de nombreuses opérations sont dictées par la liberté contractuelle sans qu’aucune réglementation spécifique ne vienne l’encadrer. Ainsi, le droit au compte et la convention de compte sont réglementés par un seul article du Code monétaire et financier, la liberté d’octroi ou de refus de cré- dit étant reconnue au banquier par la jurisprudence. Quant au droit financier, où la liberté prédomine également largement sur la réglementation, l’auteur observe que rien ne vient restreindre la liberté du banquier, qu’il s’agisse du recours aux dérivés de crédit, de la titrisation, des prises de participations bancaires, du recours aux fonds structurés ou alternatifs, soulignant cependant que le développement des opérations effectuées via l’Internet – e-banking et e-trading – a des répercussions sur cette liberté, le banquier étant tributaire de la capacité technique du matériel auquel il a recours pour réaliser ces opérations. L’objectif poursuivi étant d’améliorer la sécurité du système bancaire et financier tout en préservant les activités essentielles des métiers de banquier impliquant une nécessaire liberté d’action, Anthony Maymont, dans une première partie, se livre à une étude de la mesure de la liberté contractuelle du banquier en droit bancaire et financier, avant d’en proposer une « relecture » plus critique et prospective, dans la seconde partie. S’il est impossible de résumer l’ampleur et la richesse du travail d’analyse, de recherche et de proposition auquel s’est livré l’auteur, on peut cependant, afin d’inviter le lecteur à découvrir ses richesses, tenter d’en extraire les principales constatations. La première: l’étude menée confirme – exemples à l’appui – que la liberté contractuelle du banquier, lorsqu’elle dérive en abus et excès, menace directement le système financier et peut engendrer une crise systémique. La deuxième: si la loi est compétente pour maîtriser certaines activités, elle peut être rapidement dépassée par l’innovation financière, remettant ainsi en cause l’efficacité de la régulation. Pour Anthony Maymont, afin d’éradiquer ces dérives, la maîtrise de cette liberté doit être recherchée au moyen de sa « relecture » consistant essentiellement, selon l’auteur, à effectuer un réexamen de certains contrats ou de certaines opérations afin d’en corriger les faiblesses, la liberté contractuelle devant être l’exception pour ceux et celles présentant le plus de risques identifiés, pour la banque, pour ses clients et pour le système financier au niveau tant national qu’international. À cette fin, alors que l’attitude générale consiste à attendre que les difficultés surviennent pour agir, selon l’auteur, il est nécessaire d’instaurer une inversion des schémas classiques de réglementation. Parmi les nombreuses propositions en vue de l’inversion de ces schémas est proposée la création de banques dites « spéculatives », auxquelles serait réservée la conclusion de contrats ayant un risque systémique, les opérations bancaires et financières étant ainsi divisées en catégories professionnelles, selon le risque qu’elles engendrent.
Pour autant, ce besoin de réglementation ne doit pas aboutir à une inflation normative préjudiciable au système financier, cette régulation des excès de la finance devant s’opérer par des règles établies tant au plan national, qu’européen et international. La proposition forte de la thèse consiste donc à maîtriser la liberté contractuelle du banquier en établissant des règles durables et pérennes non soumises aux incessantes variations que connaît le système financier. Si les propositions faites par Anthony Maymont peuvent sembler osées, elles sont courageuses, nécessaires et entraînent l’adhésion.
Comme le souligne en préface le professeur Dominique Legeais, la thèse d’Anthony Maymont, distinguée par l’attribution du Prix de Thèse Michel de l’Hospital 2013, est ambitieuse, dans la mesure où l’activité de distribution de crédits s’inspire de plus en plus du droit financier et que le crédit, comme le produit financier, apparaît de plus en plus comme un produit à risque justifiant que, dans ces deux secteurs, le droit est aujourd’hui à la recherche de son équilibre. La thèse d’Anthony Maymont contribue utilement à cette recherche en enrichissant le débat et en invitant le lecteur à se forger sa propre opinion: « C’est le propre d’une bonne thèse que d’être stimulante pour l’esprit » (dixit Dominique Legeais).

 

Les Sûretés – La Publicité Foncière (8e édition)

Laurent Aynès et Pierre Crocq, LGDJ, Lextenso édition, collection « Droit civil », 443 pages, 36euros.

 

Dans la présentation faite, ici même, de la pré- cédente édition, en août 2013, de l’ouvrage de Laurent Aynès et Pierre Crocq, était soulignée l’inflation des textes touchant directement ou indirectement au droit des sûretés alors que l’ordonnance du 13 mars 2006 pouvait laisser espérer – à tout le moins pour les sûretés réelles – qu’il serait pour un certain temps fixé : loi du 4 août 2008 et ordonnance du 18 décembre 2008 réformant le droit des procédures collectives, ordonnance du 30 janvier 2009 et loi du 12 mai 2009 réformant la fiducie sûreté, loi du 15 juin 2010 et ordonnance du 9 décembre 2010 relative à l’EIRL, loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. Depuis août 2013, cette inflation n’a pas cessé: ordonnance du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement, loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, ordonnance du 12 mars 2014 et décret du 30 juin 2014 réformant à nouveau le droit des procédures collectives, loi « Hamon » du 17 mars 2014 relative à la consommation et loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement (loi « ALUR »)… Tous ces textes qui ont une incidence sur le droit des sûretés sont bien entendu pris en compte dans cette huitième édition. S’il n’est plus, depuis longtemps, nécessaire de présenter cet ouvrage bien connu tant des praticiens – et tout particulièrement des juristes de banque – que des étudiants, il est important d’annoncer la parution d’une nouvelle édition afin que ces lecteurs sachent qu’ils peuvent être ainsi assurés de ne pas passer à côté de textes ou jurisprudences importants. À titre d’exemple de cette « actualité » de l’ouvrage, on peut citer le débat en cours – et qui devrait être prochainement tranché par la Cour de cassation en Assemblée plénière – sur la faculté ou non, pour un établissement de crédit, de recourir au gage sans possession de droit commun pour la mise en gage de stocks de marchandises – possibilité refusée par un arrêt du 19 février 2013 de la chambre commerciale de la Cour de cassation, la Cour de Paris par arrêt de renvoi du 27 février 2014 décidant du contraire. Pour conclure cette brève présentation de cet ouvrage indispensable, rappelons que les très nombreuses notes de bas de pages donnant des références doctrinales et jurisprudentielles également constamment actualisées, l’index alphabétique très détaillé et celui des principales décisions judiciaires visées dans le corps de l’ouvrage constituent autant d’instruments utiles aux étudiants comme aux praticiens.

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À retrouver dans la revue
Banque et Droit Nº158