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Publi rédactionnel : Intégration du risque climatique dans les modèles de crédit

Créé le

17.06.2021

Selon Mark Carney, envoyé spécial de l’ONU sur le Climat et fondateur de la Task-force sur les reporting financiers liés au climat (TCFD), « toute entreprise ne s’adaptant pas au changement climatique fera banqueroute ». Décryptage de l’impact des risques climatiques sur les modèles de crédit par le cabinet Nexialog Consulting.

Le risque climatique peut être considéré comme un risque résultant du changement climatique et affectant les systèmes naturels ainsi que les activités humaines. Il se décline sous trois volets : le risque physique, à savoir les pertes directes causées par les événements climatiques ; le risque de transition, qui comprend les conséquences économiques et financières d'une transition soudaine et imprévue vers une économie sobre en carbone ; et le risque de responsabilité, en particulier les dommages qu'une personne morale serait tenue de payer au cas où elle serait légalement responsable des conséquences du changement climatique (le risque de responsabilité n'est pas encore analysé par les banques françaises).

 

Des exigences réglementaires de plus en plus strictes

Les régulateurs ont identifié le changement climatique et les risques associés comme l'un des sujets les plus importants pour les institutions financières. Au cours des deux dernières années, d’importantes guidelines ont été présentées par les régulateurs sur le sujet. La BCE a ainsi publié en novembre 2020 ses attentes prudentielles en matière de gestion des risques climatiques, exigeant une auto-évaluation de chaque banque en 2021. En France, l'AMF et l'ACPR font monter la pression sur les sujets ESG, et notamment sur la gestion des risques climatiques. Les analyses de l’ACPR d'avril 2019 encouragent le développement d'outils de stress tests pour s'assurer que les exigences de fonds propres reflètent adéquatement les risques liés au changement climatique. Par ailleurs, le gouverneur de la Banque de France a annoncé fin novembre 2019 que les banques et les assureurs français réaliseront des stress tests climatiques courant 2020. L’ACPR a alors publié en juillet 2020 les scénarios et hypothèses principales de cet exercice pilote dont les résultats, pour les banques volontaires, ont été publiés en avril 2021.

Les grandes banques françaises ont volontairement adopté les recommandations de la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD), mise en place fin 2015 lors de la COP21 par le Conseil de stabilité financière du G20. Cette décision implique de prendre des mesures afin de se conformer à chacun des quatre éléments fondamentaux recommandés par le TCFD et, en particulier, les processus utilisés par l'organisation pour identifier, évaluer et gérer les risques liés au climat.

 

La vulnérabilité des portefeuilles des banques françaises

Sur la base des données communiquées par les banques au 31 décembre 2017, l'ACPR constate que les groupes bancaires français semblent être relativement peu exposés au risque physique. Ceux-ci se considèrent plus directement exposés au risque de transition avec des expositions non négligeables (12,2% du total des expositions) aux secteurs les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. L’ACPR note également que, malgré quelques progrès, le changement climatique est encore partiellement et de manière hétérogène intégré dans le processus de gestion des risques des institutions financières.

Selon notre analyse, les portefeuilles d’expositions Corporate sont potentiellement les plus impactés par le risque de transition en France. Ce portefeuille comprend notamment les entreprises des secteurs pétroliers, agricoles et miniers - ou les entreprises dépendant fortement de ces secteurs -, très impactées par une transition retardée ou soudaine vers une économie bas-carbone. La perte de valeur ajoutée destrois secteurs atteindrait respectivement 58%, 25 % et 25% à l’horizon 2050 en cas de transition soudaine, et notamment d’une hausse brutale et inattendue du prix du carbone. Les impacts s'expliquent principalement par l’augmentation des coûts économiques imposée par la taxation du carbone ; ce qui accroît la probabilité de défaut (PD) des contreparties concernées.

 

Intégration des risques climatiques dans le cycle de vie du crédit

L’inclusion du risque climatique dans les modèles de crédit devrait se faire à chaque étape du cycle de vie du crédit : de l’octroi du crédit au reporting. Ce qui devrait se refléter dans les exigences de fonds propres.

Nous suggérons de prendre en compte les critères climatiques ou ESG dans la construction du score d’octroi de crédit, par la collecte et la fiabilisation des données ESG et climatiques, l'utilisation des scores externes - indicateur de vulnérabilité du PNUE-FI, score de risque climatique physique de «Four Twenty Seven» - et la refonte du score d’octroi avec ces différentes données. Après cette étape, la refonte du score comportemental et le recalibrage des classes de risque (PD) sont nécessaires en vue de la prise en compte de la situation à l’octroi dans l’estimation de la PD règlementaire. Aussi, une réévaluation des collatéraux et une estimation de la Loan To Value (LTV), notamment pour le portefeuille immobilier (en zone à risque), permettront d’ajuster la perte en cas défaut (LGD). Dans le cadre des stress tests EBA et de l’ICAAP (pilier 2 de la réglementation bâloise), il sera question de définir et valider des scénarios climatiques et de les intégrer dans le process de l’appétit au risque.

Ces évolutions impacteront naturellement l’estimation de l’ECL pour le compte de IFRS 9 à travers l’intégration des scénarios climatiques dans les estimations Forward Looking.

Les dispositifs de backtesting sera ensuite enrichi de nouveaux indicateurs de monitoring de la performance des paramètres de risque (PD, LGD) et de l’exposition aux risques climatiques. Enfin, le reporting sera impacté (IRB Pilier 3), principalement celui des expositions aux risques climatiques (transition ou physique).

 

Nos conclusions

Les problématiques liées au climat suscitent un grand intérêt ces dernières années, du fait des conséquences déjà visibles des événements climatiques sur certaines régions du monde et des évolutions réglementaires en faveur de l’intégration du risque climatique dans le processus de gestion des risques bancaires.

Partant des analyses de sensibilité et de vulnérabilité des portefeuilles des banques au risque climatique en France, les experts de Nexialog Consulting recommandent de traiter prioritairement le portefeuille Corporate, les stress tests ainsi que la gouvernance Risque. Cela implique la segmentation des expositions au risque climatique par secteur d’activité et par géographie, la prise en compte du risque de transition via le développement d’outils de stress tests reliant les paramètres de risque aux scénarios de l’ACPR, et la refonte des scores d’octroi de crédit en intégrant les indicateurs ESG.