L’expertise du FRR

Au 1er juin 2018, le Fonds de R&eacute;serve pour les Retraites (FRR) g&eacute;rait 34,5 milliards d&rsquo;euros d&rsquo;actifs. Ses engagements au passif sont tr&egrave;s majoritairement constitu&eacute;s de paiements annuels de 2,1 milliards d&rsquo;euros [1] (nominaux) par an &agrave; la CADES. La composition de l&rsquo;actif du FRR montre une r&eacute;partition sectorielle tr&egrave;s diversifi&eacute;e : services aux collectivit&eacute;s, industrie, biens de consommation, sant&eacute;, banque, etc. Toutefois la taille du fonds implique une diversification g&eacute;ographique pour d&eacute;gager les rendements n&eacute;cessaires au regard de la structure de son passif, ce qui implique d&rsquo;&eacute;laborer une grille d&rsquo;allocation d&rsquo;actifs tr&egrave;s pointue. Cette d&eacute;marche du FRR illustre d&rsquo;ailleurs parfaitement la r&eacute;alit&eacute; d&rsquo;un mode de gestion innovant d&rsquo;un fonds de pension. La gestion du FRR est de type LDI [2] , donc bas&eacute;e sur son passif. Les indicateurs les plus pertinents du FRR sont calcul&eacute;s sur le surplus (actif &ndash; passif). Celui-ci a &eacute;t&eacute; pr&eacute;f&eacute;r&eacute; au ratio de financement (actif/passif), car le passif actuel du FRR tend vers 0 en 2024, ce qui aurait fait tendre le ratio de financement vers +&infin;. Le passif total actualis&eacute; est actuellement de 17,9 milliards d&rsquo;euros ; par cons&eacute;quent le surplus du FRR est d&rsquo;environ 16,6 milliards d&rsquo;euros (34,5 &ndash; 17,9). Il a ainsi sensiblement augment&eacute; depuis le d&eacute;but de la gestion bas&eacute;e sur le passif, fin 2010 (9,5 milliards d&rsquo;euros). Le but du FRR est donc de conserver &agrave; tout moment un surplus positif pour &ecirc;tre certains de pouvoir faire face &agrave; ses engagements, tout en maximisant la probabilit&eacute; d&rsquo;obtenir un surplus &eacute;lev&eacute; en 2024. Le FRR n&rsquo;est sujet &agrave; aucune contrainte r&eacute;glementaire majeure. La recherche de l&rsquo;&eacute;quilibre rendement-risque dans la dur&eacute;e repose sur un ma&icirc;tre mot : la diversification. La diversification r&eacute;sulte &agrave; la fois de la construction de l&rsquo;allocation strat&eacute;gique et des modalit&eacute;s d&rsquo;impl&eacute;mentation des investissements. Cette approche est compl&eacute;t&eacute;e par un pilotage de l&rsquo;allocation et par un suivi des risques tr&egrave;s exigeants. D&eacute;termination de l&rsquo;allocation strat&eacute;gique Les travaux sur l&rsquo;allocation strat&eacute;gique et le pilotage de l&rsquo;allocation sont enti&egrave;rement r&eacute;alis&eacute;s en interne. Ils commencent par la d&eacute;termination de sc&eacute;narios macro&eacute;conomiques. Le FRR a accord&eacute; en 2018 une probabilit&eacute; de r&eacute;alisation forte &agrave; deux sc&eacute;narios afin de construire une allocation robuste. Le sc&eacute;nario de continuit&eacute; correspondait au consensus de march&eacute; : poursuite de la croissance sans exc&egrave;s d&rsquo;inflation d&eacute;coulant sur une remont&eacute;e graduelle des taux US et zone euro, des d&eacute;fauts toujours bas et des b&eacute;n&eacute;fices en progression sensible. Le sc&eacute;nario de correction, en revanche, int&egrave;gre un choc conjoncturel, caract&eacute;ris&eacute; par une r&eacute;cession aux &Eacute;tats-Unis provoqu&eacute;e par une hausse des co&ucirc;ts salariaux, dans un contexte de faible productivit&eacute;. Ce choc pourrait s&rsquo;accompagner d&rsquo;un ralentissement sensible de la croissance en Chine, ou d&rsquo;un choc politique ou g&eacute;opolitique. Le FRR s&rsquo;appuie sur ces sc&eacute;narios pour d&eacute;terminer les trajectoires moyennes sur les performances des actions, l&rsquo;&eacute;volution des spreads (dette des pays &eacute;mergents, obligations de qualit&eacute; en euros et en dollars, obligations &agrave; haut rendement en euros ou en dollars) et l&rsquo;&eacute;volution du niveau, de la pente et de la courbure des taux euro et dollar. Ainsi, le FRR prend pleinement en compte l&rsquo;asym&eacute;trie sur l&rsquo;&eacute;volution future des spreads et des taux. Ensuite, le FRR calibre la distribution des chocs &agrave; appliquer &agrave; ces variables dans ses simulations de Monte-Carlo (voir Glossaire). Deux mod&egrave;les sont utilis&eacute;s : une loi de Student et un mod&egrave;le &agrave; changement de r&eacute;gimes (RSLN), afin notamment de mieux simuler les queues de distribution. Enfin, pour les actifs de taux, les mod&egrave;les de Nelson-Siegel et de Vasicek sont utilis&eacute;s pour traduire les &eacute;volutions de taux et de spreads en performances de classes d&rsquo;actifs. En plus d&rsquo;une &eacute;valuation fine du risque de taux, ces simulations permettent de bien mod&eacute;liser le risque de change et de volatilit&eacute;. En effet, la performance du dollar et des devises des pays &eacute;mergents fait aussi partie des variables simul&eacute;es. Enfin, le mod&egrave;le RSLN tient pleinement compte des phases de forte volatilit&eacute; et de son auto-corr&eacute;lation &agrave; court/moyen terme. Ayant d&eacute;termin&eacute; 10 000 trajectoires possibles de performance pour chacune de ses classes d&rsquo;actifs dans deux sc&eacute;narios macro&eacute;conomiques et deux lois de distribution, l&rsquo;allocation strat&eacute;gique optimale est celle qui, sous certaines contraintes, maximise l&rsquo;utilit&eacute;. &Agrave; cette fin, le FRR a construit une fonction d&rsquo;utilit&eacute; (voir Glossaire) reliant sa satisfaction au niveau de surplus de 2024, ce qui lui permet de choisir le niveau de risque ad&eacute;quat. Deux modes de rebalancement sont utilis&eacute;s : un rebalancement statique, aux m&ecirc;mes poids chaque ann&eacute;e sur les classes d&rsquo;actifs (hors adossement au passif) ; un rebalancement dynamique, autorisant des changements annuels d&rsquo;allocation en fonction du niveau de surplus atteint et de l&rsquo;ann&eacute;e. Au bout du compte, l&rsquo;allocation strat&eacute;gique choisie doit permettre d&rsquo;obtenir une utilit&eacute; moyenne &eacute;lev&eacute;e dans tous les types de simulations utilis&eacute;s. Calibration et suivi des risques Le FRR consid&egrave;re que les risques doivent &ecirc;tre bien calibr&eacute;s d&egrave;s la formation de l&rsquo;allocation strat&eacute;gique et qu&rsquo;il est trop dangereux de se fier &agrave; la seule allocation tactique pour les r&eacute;duire. Ainsi, par exemple : la sensibilit&eacute; du surplus aux taux est r&eacute;gl&eacute;e d&egrave;s l&rsquo;allocation strat&eacute;gique, en d&eacute;terminant notamment les montants de couvertures de taux euro et dollar mises en place ; les devises des pays d&eacute;velopp&eacute;s sont couvertes &agrave; 90 % pour les actifs de performance et &agrave; 100 % pour les actifs de couverture, ce qui limite ce risque ; le FRR a augment&eacute; ces derni&egrave;res ann&eacute;es son allocation strat&eacute;gique en actions couvertes par des options jusqu&rsquo;&agrave; 10 % aujourd&rsquo;hui. Ces strat&eacute;gies lui permettent de limiter les pertes extr&ecirc;mes, au prix d&rsquo;un plafonnement des gains. Les couvertures de taux, les options et la couverture de change sont mises en place par nos gestionnaires overlay (voir Glossaire). Le mandat overlay du FRR est le plus complet de la Place au sein du monde institutionnel. Il englobe &agrave; la fois la macrocouverture du change, le calibrage des grandes classes d&rsquo;actifs (via des futures) et les strat&eacute;gies optionnelles. De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, lorsque l&rsquo;allocation strat&eacute;gique est choisie, des stress tests de court et long terme sont effectu&eacute;s : &agrave; court terme, le surplus doit rester sup&eacute;rieur au montant plancher apr&egrave;s occurrence des pires crises historiques sur chaque facteur de risque ; &agrave; long terme, le surplus doit rester sup&eacute;rieur au montant plancher dans la moyenne des 1 % des pires cas simul&eacute;s. En outre, les instances de gouvernance du FRR se r&eacute;unissent si certains seuils sont atteints sur le surplus, &agrave; la baisse comme &agrave; la hausse, pour d&eacute;cider d&rsquo;&eacute;ventuels changements de l&rsquo;allocation strat&eacute;gique en cours d&rsquo;ann&eacute;e. &Eacute;volution r&eacute;cente de l&rsquo;allocation d&rsquo;actifs Ces derniers mois, l&rsquo;&eacute;volution de l&rsquo;allocation du FRR a notamment r&eacute;pondu &agrave; deux logiques : une baisse du risque de la nouvelle allocation strat&eacute;gique apr&egrave;s le paiement de 2,1 milliards d&rsquo;euros de 2018, en laissant le poids des actifs de couverture et de performance inchang&eacute; alors que, apr&egrave;s ce paiement, le passif actualis&eacute; a naturellement baiss&eacute; de 2,1 milliards ; une acc&eacute;l&eacute;ration de la mont&eacute;e en charge sur les actifs non cot&eacute;s en France, engag&eacute;e d&egrave;s 2012 et renforc&eacute;e en 2015 . Le FRR esp&egrave;re ainsi glaner, &agrave; long terme, une prime d&rsquo;illiquidit&eacute;. De plus, il contribue au soutien de l&rsquo;&eacute;conomie fran&ccedil;aise en finan&ccedil;ant les PME et entreprises innovantes en capital et en dette (corporate et d&rsquo;acquisition). Dans ce cadre, le FRR finance aussi la transition &eacute;nerg&eacute;tique (infrastructures, fonds immobilier &agrave; impact, soci&eacute;t&eacute;s innovantes, en sus des green bonds d&eacute;j&agrave; pr&eacute;sents dans ses mandats obligataires). Mode de gestion des mandats La gestion des mandats du FRR est r&eacute;alis&eacute;e par des soci&eacute;t&eacute;s de gestion de portefeuille choisies apr&egrave;s appel d&rsquo;offres ou s&eacute;lection de fonds (&agrave; hauteur de 20 % du total des actifs). Lorsque le FRR identifie une probabilit&eacute; forte de cr&eacute;er de l&rsquo;alpha en gestion active, celle-ci est g&eacute;n&eacute;ralement pr&eacute;f&eacute;r&eacute;e. Sinon, le FRR reste en gestion passive. Au cours des derni&egrave;res ann&eacute;es, le FRR a profond&eacute;ment repens&eacute; sa gestion passive : la quasi-int&eacute;gralit&eacute; des gestions passives sont r&eacute;f&eacute;renc&eacute;es sur des indices dits &laquo; smart beta &raquo; bas&eacute;s en g&eacute;n&eacute;ral sur des techniques de construction de portefeuille (de types ERC, Min Var, Max Sharpe&hellip;), compl&eacute;t&eacute;s de quelques strat&eacute;gies visant &agrave; renforcer certaines expositions &agrave; des facteurs de risque de type &laquo; Value &raquo; ; sur ces strat&eacute;gies, les g&eacute;rants doivent appliquer un processus visant notamment &agrave; r&eacute;duire les &eacute;missions et les r&eacute;serves de carbone, am&eacute;liorer la note ESG et exclure le charbon et le tabac. Dans le cadre de la future transformation du syst&egrave;me de retraites, la mission du FRR sera probablement appel&eacute;e &agrave; &eacute;voluer. Quel que soit le choix des Pouvoirs Publics, l&rsquo;expertise du FRR constitue un acquis pr&eacute;cieux au service de leurs ambitions modernisatrices. 1 La loi n&deg; 2010-1594 du 20 d&eacute;cembre 2010 de financement de la S&eacute;curit&eacute; sociale, a, dans le cadre de l&rsquo;&eacute;quilibre du financement de la r&eacute;forme des retraites, pr&eacute;vu un versement annuel du FRR &agrave; la CADES de 2,1 milliards d&rsquo;euros de 2011 &agrave; 2024, soit un versement total de 29,4 milliards d&rsquo;euros. 2 Liability Driven Investment.

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