Région MENA : accroître les financements bancaires des TPE/PMI-PME

Plusieurs pays de la r&eacute;gion MENA pr&eacute;sentent des indicateurs macro&eacute;conomiques qui leur conf&egrave;rent une &eacute;ligibilit&eacute; relative aux crit&egrave;res d&rsquo;&eacute;conomies &eacute;mergentes : taux de croissance positif sur plusieurs ann&eacute;es, d&eacute;ficits budg&eacute;taires ma&icirc;tris&eacute;s, inflation contr&ocirc;l&eacute;e, etc. Toutefois, parmi les indicateurs qui ternissent ce &laquo; tableau d&rsquo;honneur &raquo;, deux caract&eacute;ristiques tirent encore leurs performances vers le bas : la pr&eacute;pond&eacute;rance des entreprises op&eacute;rant dans le secteur dit informel. Celles-ci repr&eacute;sentent 85 &agrave; 90 % du nombre total des entreprises du segment des PMI/PME et TPE constituant le tissu productif de l&rsquo;&eacute;conomique ; la tr&egrave;s faible participation du secteur bancaire dans le financement des besoins en tr&eacute;sorerie et/ou investissement des TPE/PMI-PME. Le taux de la p&eacute;n&eacute;tration des financements bancaires est &agrave; peine de 8 % du total des cr&eacute;dits bancaires. Cette analyse a pour objectif d&rsquo;apporter quelques &eacute;l&eacute;ments &agrave; l&rsquo;&eacute;bauche d&rsquo;une strat&eacute;gie visant &agrave; cr&eacute;er les conditions n&eacute;cessaires &agrave; la croissance &eacute;conomique soutenue dans les pays de la r&eacute;gion MENA. Parmi ces conditions, figurent, en t&ecirc;te de liste, l&rsquo;augmentation de la part des concours bancaires dans le financement des besoins des TPE/PMI-PME et, dans son sillage, l&rsquo;encouragement du transfert des TPE op&eacute;rant dans le secteur informel vers le formel. Afin de bien cerner cette probl&eacute;matique, nous dresserons, dans un premier temps, la situation des financements bancaires des PMI-PME dans les pays de la r&eacute;gion MENA, avant d'indiquer, dans un second temps, les conditions n&eacute;cessaires pour son d&eacute;veloppement. Les caract&eacute;ristiques des financements bancaires des PMI-PME dans la r&eacute;gion MENA Le Graphique 1 montre, d&rsquo;une part, un taux moyen des financements bancaires inf&eacute;rieurs &agrave; 8 % et, d&rsquo;autre part, une dispersion tr&egrave;s importante entre les pays de la r&eacute;gion, o&ugrave; le Maroc arrive en t&ecirc;te avec un taux de 24 %. Il est vrai que le pays, dont la structure &eacute;conomique demeure bas&eacute;e sur la production des hydrocarbures, justifie en grande partie la faiblesse du taux de financement bancaire des PMI et PME : proportionnellement, ces derni&egrave;res ne font pas le poids face aux multinationales. Mais rien ne peut justifier raisonnablement cette faiblesse dans des &eacute;conomies telles que celles de la Syrie, l&rsquo;&Eacute;gypte, la Jordanie, la Tunisie et le Liban ! En r&eacute;alit&eacute;, c&rsquo;est le mod&egrave;le du syst&egrave;me bancaire et financier qui est structurellement inadapt&eacute; aux r&eacute;alit&eacute;s &eacute;conomiques. La logique et la doctrine du financement bancaire doivent s&rsquo;adapter aux structures du tissu productif d&rsquo;une &eacute;conomie et non l&rsquo;inverse, c&rsquo;est-&agrave;-dire attendre que l&rsquo;entreprise PMI-PME &eacute;volue et devienne &eacute;ligible aux regards de cette logique bancaire. Cette inadaptation du syst&egrave;me de financement se d&eacute;montre non seulement par la faiblesse du taux de p&eacute;n&eacute;tration du concours bancaire dans les besoins en financement des entreprises PMI-PME, mais aussi par l&rsquo;exclusion pure et simple d&rsquo;environ 90 % des entreprises actives op&eacute;rant dans le secteur informel. Des entreprises entre &eacute;conomie formelle et informelle D&rsquo;apr&egrave;s une &eacute;tude men&eacute;e par le cabinet McKinsey (voir Graphique 2 et Tableau 3), la r&eacute;gion MENA dispose d&rsquo;environ 15 &agrave; 23 millions d&rsquo;entreprises. Moins de 10 % sont des PMI-PME avec un nombre de salari&eacute;s variant entre 9 et 250, soit moins de 2,4 millions d&rsquo;entreprises, alors que plus de 20 millions d&rsquo;entreprises sont des micro-entreprises, dont la majorit&eacute; (15,7 millions) op&egrave;re dans le secteur informel. Cette large population d&rsquo;entreprises, qui constitue la force vive des &eacute;conomies de ces pays, est tout simplement exclue, dans la majorit&eacute; des cas, du syst&egrave;me de financement bancaire. Ce faisant, ce dernier se prive d&rsquo;une v&eacute;ritable &laquo; manne &raquo; de croissance pour son propre d&eacute;veloppement. Ce potentiel est en effet estim&eacute;, selon la m&ecirc;me source, &agrave; environ 210 &agrave; 240 milliards de dollars, dont 58 milliards concernant uniquement les entreprises op&eacute;rant dans le secteur informel. Cet important potentiel est estim&eacute; dans le cadre du syst&egrave;me de financement existant. Il est plus important encore si la logique des financements bancaires change dans la perspective d&rsquo;une convergence vers la logique entrepreneuriale des PMI-PME et des TPE [1] . Mais, avant d&rsquo;arriver &agrave; cette &eacute;tape, que faire pour que le taux de financement bancaire des PME-PMI enregistre une croissance substantielle dans la dur&eacute;e ? Quelles sont les mesures &agrave; prendre d&rsquo;urgence et les r&eacute;formes &agrave; entreprendre afin que le syst&egrave;me de financement devienne plus efficient dans le segment des financements des PMI-PME ? Les facteurs du d&eacute;veloppement du syst&egrave;me de financement des PMI-PME Cette n&eacute;cessaire adaptation est d&rsquo;autant plus urgente que la mondialisation des &eacute;conomies du reste du monde ouvre de larges perspectives de croissance de nombreux pays dits &eacute;mergents, et laissera ceux de la r&eacute;gion MENA, s&rsquo;ils se complaisent dans cet immobilisme, loin &agrave; la tra&icirc;ne. Pour ce faire, trois pr&eacute;alables sont d&eacute;terminants comme facteurs interd&eacute;pendants dans toute strat&eacute;gie de choix de politique &eacute;conomique visant &agrave; renforcer le taux de financement des TPE/PMI-PME par concours bancaires : la lib&eacute;ralisation du syst&egrave;me bancaire et financier ; une volont&eacute; politique de ce choix &eacute;conomique avec implication de l&rsquo;&Eacute;tat ; la motivation pour des choix strat&eacute;giques des banques pour le financement des PMI-PME et TPE en encourageant parall&egrave;lement la micro-finance. La n&eacute;cessaire lib&eacute;ralisation du syst&egrave;me bancaire Cette importance du r&ocirc;le des financements dans l&rsquo;&eacute;conomie conf&egrave;re au syst&egrave;me bancaire et financier un rang distinctif des autres agents &eacute;conomiques et, par cons&eacute;quent, une responsabilit&eacute; majeure dans le fonctionnement d&rsquo;une &eacute;conomie. C&rsquo;est la raison pour laquelle il ne peut d&eacute;pendre d&rsquo;un &laquo; courant unique &raquo;, ni &ecirc;tre la panac&eacute;e d&rsquo;un seul agent &eacute;conomique, quand bien m&ecirc;me il s&rsquo;agit de l&rsquo;&Eacute;tat. La lib&eacute;ralisation du syst&egrave;me bancaire s&rsquo;av&egrave;re une &eacute;vidence dans toute &eacute;conomie, quel que soit son degr&eacute; de d&eacute;veloppement, d&egrave;s lors que la r&egrave;gle du march&eacute; fonctionne. Un syst&egrave;me de financement de l&rsquo;&eacute;conomie, libre et concurrentiel, est le gage de l&rsquo;efficience de la politique de l&rsquo;allocation des ressources financi&egrave;res et de son optimisation. La comp&eacute;titivit&eacute; du syst&egrave;me bancaire doit &ecirc;tre transparente, saine et loyale. Il n'y a pa de demi-mesure sur ce principe. Or nous pouvons ais&eacute;ment constater, dans certains pays de cette r&eacute;gion MENA, que le syst&egrave;me bancaire demeure &laquo; administr&eacute; &raquo; sous le contr&ocirc;le de l&rsquo;&Eacute;tat &agrave; travers ses organes ex&eacute;cutifs, ou pr&eacute;sentant un semblant de lib&eacute;ralisation &agrave; comp&eacute;titivit&eacute; faible ou inexistante, ou encore un syst&egrave;me quasi monopolistique, avec une ou deux banques tr&egrave;s dominantes sur le march&eacute;, le plus souvent contr&ocirc;l&eacute;es par l&rsquo;&Eacute;tat. La lib&eacute;ralisation doit &ecirc;tre globale touchant tous les compartiments du syst&egrave;me financier (d&eacute;p&ocirc;ts, cr&eacute;dits, taux, placements, investissements, change&hellip;). Bref, les conditions n&eacute;cessaires &agrave; l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un vrai march&eacute; de l&rsquo;argent. L&rsquo;implication des pouvoirs publics Pour autant, le r&ocirc;le de l&rsquo;&Eacute;tat dans la pr&eacute;paration du terrain pour un accroissement de la part des financements bancaires dans les besoins financiers des PMI-PME/TPE est fondamental. Sans cette implication ouverte, d&eacute;clar&eacute;e et engag&eacute;e des pouvoirs de l&rsquo;&Eacute;tat dans le cadre d&rsquo;une strat&eacute;gie volontariste de soutien de cette cat&eacute;gorie d&rsquo;entreprise, il est &agrave; craindre que le march&eacute; bancaire &agrave; lui seul arrivera difficilement &agrave; renverser la tendance actuelle, ou du moins la surmontera sur une longue p&eacute;riode. Or, le temps est aujourd&rsquo;hui dans l&rsquo;urgence, les &eacute;conomies du pays de la r&eacute;gion MENA agonisent, elles s&rsquo;&eacute;touffent par manque de fluidit&eacute; dans les r&eacute;seaux et circuits de la collecte et de la distribution de l&rsquo;&eacute;pargne. Comment l&rsquo;&Eacute;tat doit-il agir et par quel mode op&eacute;ratoire ? Une d&eacute;claration de politique g&eacute;n&eacute;rale visant &agrave; promouvoir les PMI-PME ? L&rsquo;instauration d&rsquo;une prime d&rsquo;encouragement aux investissements de ces entreprises ? Une taxation diff&eacute;renci&eacute;e avec des exon&eacute;rations fiscales cibl&eacute;es, etc. ? Ce type de mesures a des effets tr&egrave;s variables, voire m&ecirc;me contest&eacute;es par certains quant &agrave; leur efficience &eacute;conomique et sociale. En revanche, si notre objectif est de promouvoir le financement bancaire des PMI-PME, il faut chercher les raisons qui font d&eacute;tourner l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t des banques pour ce type de financement. L&rsquo;une des raisons principales est clairement le risque. Alors, l&rsquo;&Eacute;tat doit mettre en place un syst&egrave;me attractif face aux banques, att&eacute;nuant sensiblement la notion des risques chez elles. La meilleure formule de cette couverture est celle d&rsquo;un fonds de garantie bas&eacute; sur la notion de partage &eacute;quilibr&eacute; du risque entre, d&rsquo;une part, la PMI/PME et, d&rsquo;autre part, la banque et l&rsquo;&Eacute;tat. Afin de rendre ce sch&eacute;ma viable, auto-entretenu et p&eacute;renne, il y a lieu d&rsquo;&eacute;largir l&rsquo;assiette des participants au financement de ce mod&egrave;le &agrave; l&rsquo;ensemble des intervenants dans le syst&egrave;me financier [2] . La croissance &eacute;conomique g&eacute;n&eacute;r&eacute;e &agrave; travers ce mod&egrave;le apporte des b&eacute;n&eacute;fices &agrave; tous les acteurs &eacute;conomiques op&eacute;rant dans le syst&egrave;me financier. Il est normal que les agents &eacute;conomiques (fonds d&rsquo;investissement, soci&eacute;t&eacute;s de Bourse, grandes entreprises) qui tirent un profit de cette croissance contribuent &agrave; rendre la formule de couverture viable dans la dur&eacute;e. Les choix strat&eacute;giques des banques Le 3 e pilier des bases structurelles pour le d&eacute;veloppement des financements des PMI-PME/TPE est un aboutissement naturel des deux pr&eacute;c&eacute;dentes actions. Celui-ci implique deux actions de choix strat&eacute;giques compl&eacute;mentaires : l&rsquo;&eacute;mergence de banques sp&eacute;cialis&eacute;es dans le financement des PMI/PME ; l&rsquo;adaptation du syst&egrave;me de financement aux besoins de la micro-entreprise et de l&rsquo;informel. En effet, en lib&eacute;ralisant le syst&egrave;me financier, et en mettant en place les mesures d&rsquo;accompagnement et d&rsquo;encouragement des banques &agrave; s&rsquo;int&eacute;resser aux financements des PMI-PME, il est certain que les lois du march&eacute; conduiront un ou plusieurs &eacute;tablissements &agrave; s&rsquo;afficher en tant que banque du financement des PMI-PME. Dans le cas o&ugrave; certaines imperfections dans le fonctionnement des deux premiers piliers, emp&ecirc;chent l&rsquo;&eacute;mergence de cette (ou de ces) banque(s) sp&eacute;cialis&eacute;e(s) dans le financement des PMI-PME, il sera opportun, pour l&rsquo;&Eacute;tat, de participer &agrave; l&rsquo;&eacute;closion de cette cat&eacute;gorie de banque dans le respect des r&egrave;gles du march&eacute; bancaire et de la concurrence loyale. &Agrave; notre avis, l&rsquo;impl&eacute;mentation de ces facteurs contribuera dans un d&eacute;lai tr&egrave;s court au d&eacute;veloppement des financements bancaires des PMI-PME et verra le taux de 8 % se hisser &agrave; des proportions beaucoup plus significatives. La 2 e action &agrave; entrevoir sur ce volet est aff&eacute;rente &agrave; l&rsquo;adaptation des modes de financement bancaire aux exigences des r&eacute;alit&eacute;s &eacute;conomiques. Une large partie des acteurs &eacute;conomiques est conctitu&eacute;e de micro-entreprises et d'entreprises op&eacute;rant dans l&rsquo;informel, ce qui implique le d&eacute;veloppement et l&rsquo;encouragement des soci&eacute;t&eacute;s de micro-finance. Le mod&egrave;le d&rsquo;importation pur et simple du syst&egrave;me bancaire est, &agrave; notre avis, une erreur de choix strat&eacute;giques dans plusieurs pays de la r&eacute;gion MENA. Le mod&egrave;le qui para&icirc;t opportun &ndash; compte tenu des choix strat&eacute;giques du pass&eacute; &ndash; est la coexistence compl&eacute;mentaire d&rsquo;un syst&egrave;me bancaire dit classique soumis aux r&egrave;gles internationales et aux standards des nouvelles r&egrave;gles b&acirc;loises, &agrave; c&ocirc;t&eacute; d&rsquo;un r&eacute;seau de soci&eacute;t&eacute; de micro-finance. Le premier assurant la s&eacute;curit&eacute; et la garantie des d&eacute;p&ocirc;ts et de la collecte de l&rsquo;&eacute;pargne, et le second assurant la distribution de cette &eacute;pargne, l&agrave; o&ugrave; les banques rechignent &agrave; aller ! Le fonds de garantie (2 e pilier) pourrait apporter son soutien &eacute;galement aux soci&eacute;t&eacute;s de micro-finance. Ce sch&eacute;ma contribuera &agrave; int&eacute;grer les entreprises de l&rsquo;informel dans les structures de l&rsquo;&eacute;conomie et des personnes exclues du &laquo; syst&egrave;me &raquo; dans la structure &eacute;conomique et sociale. 1 Lire, du m&ecirc;me auteur, &laquo; Financements bancaires des PMI-PME et croissance &eacute;conomique : l&rsquo;&Eacute;tat doit intervenir &raquo;, Revue Banque n&deg; 764, octobre 2013. 2 Ibid.

RECHERCHEZ UN ARTICLE, UNE CHRONIQUE, PARMI L'ENSEMBLE DES PUBLICATIONS

RECHERCHEZ UN AUTEUR

Archive

Région MENA : accroître les financements bancaires des TPE/PMI-PME

À retrouver dans la revue

Banque de détail

[Web Only] Tarifs bancaires : les banques amortissent l’inflation

Blockchain/Cryptoactifs

Les garanties bancaires
sont d’excellents cas d’usage

Banque de financement et d'investissement (BFI)

« Paris est le centre de gravité
pour tous les instruments financiers traités en euros »

Paiements

Le droit de la responsabilité civile appliqué à des virements frauduleux en devises

Archive

Panorama réglementaire des actifs numériques

Archive

Sberbank : une valeur anéantie à zéro en fonds de portefeuille

Archive

La transformation repose sur des directions responsables et des équipes pluridisciplinaires

Suivez-nous

RECHERCHEZ UN ARTICLE, UNE CHRONIQUE, PARMI L'ENSEMBLE DES PUBLICATIONS

RECHERCHEZ UN AUTEUR

Région MENA : accroître les financements bancaires des TPE/PMI-PME

À retrouver dans la revue

[Web Only] Tarifs bancaires : les banques amortissent l’inflation

Les garanties bancaires sont d’excellents cas d’usage

« Paris est le centre de gravité pour tous les instruments financiers traités en euros »

Le droit de la responsabilité civile appliqué à des virements frauduleux en devises

Panorama réglementaire des actifs numériques

Sberbank : une valeur anéantie à zéro en fonds de portefeuille

La transformation repose sur des directions responsables et des équipes pluridisciplinaires

Les garanties bancaires
sont d’excellents cas d’usage

« Paris est le centre de gravité
pour tous les instruments financiers traités en euros »