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Consommateurs

« Le meilleur moyen d’apaiser les rapports clients-banques, c’est le respect des textes »

Créé le

18.07.2013

-

Mis à jour le

05.09.2013

Nicole Perez, administratrice nationale de l’association de consommateurs UFC-Que choisir, explique les principales causes de mésentente entre les banques et leurs clients.

L’UFC-Que choisir dénonce régulièrement certaines pratiques des banques : quels sont vos principaux griefs ?

La majorité des plaintes que nous recevons concernent les commissions d’intervention. Dans certaines situations, en effet, un prélèvement inattendu sans information préalable du client peut gravement plomber son budget. Nous demandons aux banques de faire appliquer leurs arguments publicitaires de qualité de service au sein de tous leurs réseaux, car nous constatons qu’en pratique, la décision de prélever ou non les frais dépend de l’agence et de ses relations avec le client.

Nous appelons donc à une plus grande lisibilité et à la moralisation des tarifications bancaires. Les libellés des opérations affichées dans les brochures tarifaires sont souvent obscurs pour le consommateur. Nous avons récemment mis en place sur notre site un comparateur des tarifs bancaires, un outil qui permet au consommateur de constater l’écart impressionnant de prix entre les 143 banques étudiées. Nous observons également que, bien qu’elles se soient proposées de fournir des nouveaux packages désépaissis, mises à part LCL et BRED, les banques continuent à proposer des services inutiles au client. La palme revient aux chèques de banque, quasiment toujours assortis de services accessoires indéchiffrables.

Enregistrez-vous plus de plaintes avec le développement des paiements en ligne ?

Nous enregistrons surtout une incohérence entre les tarifs des assurances moyens de paiement et le risque de fraude. Par exemple, le tarif moyen des assurances est l’un des plus bas à Paris alors que le taux de fraude y est plus élevé. Inversement, l’Indre a les tarifs les plus élevés… alors que sa délinquance reste bien en dessous de la moyenne nationale.

Par ailleurs, avec la transposition de la directive sur les Services de paiement [1] , les banques ont l’obligation de rembourser leurs clients en cas de fraude sur les moyens de paiement, ces derniers n’ayant plus qu’à subir une franchise de 150 euros. Le périmètre de l’assurance moyens de paiement se trouve donc réduit. Logiquement, cela aurait dû se traduire par une baisse du prix de ces assurances, or il n’en a été rien. Les banques, la Caisse d’Épargne mise à part, ont ajouté des services souvent inutiles, comme le remboursement du coût de réfection des papiers d’identité à leurs assurances moyen de paiement, afin de justifier les tarifs qu’elles ont gardés au même niveau. De plus, ce sont des services supplémentaires méconnus par les consommateurs, faute d’information sur les conditions générales des assurances moyens de paiement auxquels ils souscrivent.

Le paysage des services bancaires est en mutation avec le développement des banques en ligne : qu’en pensez-vous ?

À l’heure actuelle, la banque en ligne n’est encore complètement accessible à tout le monde. Les frais sont plus intéressants, mais les offres y sont moins développées et le service absent. Nous n’enregistrons aucune plainte pour le moment, notamment en raison de l’absence d’effet de masse sur la banque en ligne.

Les dispositions de la nouvelle loi bancaire visant à limiter les frais vous satisfont-elle ?

Les frais bancaires n’ayant jamais fait l’objet d’une véritable réglementation, nous espérions que la nouvelle loi [2] de régulation des activités bancaires serait enfin l’occasion de s’attaquer au problème. Or le texte qui a été voté manque un peu d’ambition. Nous étions partisans d’une tarification unique pour les commissions d’intervention. Cependant, la solution retenue par la loi, soit le double plafonnement, est un premier pas.

Si le prix de 8 euros par acte, comme le prévoit le décret d'application à venir, n'est pas une révolution, parce qu'il correspond à peu près à la moyenne actuelle, les 80 euros de plafonnement mensuel sont en revanche plus satisfaisants, car ils représentent une réelle avancée par rapport à l'existant.

Réelle avancée aussi pour les plafonds de 4 et 20 euros pour les populations les plus fragiles, mais il sera difficile de déterminer les groupes concernés. Nous resterons très vigilants sur les autres frais bancaires, il ne s'agira pas pour les banques de se rattraper, en particulier sur la gestion de tenue de compte!

Quelle place accordez-vous à la médiation bancaire ?

Nous ne sommes pas favorables à la médiation bancaire telle qu’elle est pratiquée actuellement. Nous considérons que les médiateurs ne sont pas neutres, car ils font partie de la banque pour laquelle ils agissent. Nous préférons que les relations entre la banque et ses clients soient régies par des textes réglementaires, car la loi reste le seul moyen d’obliger les banques à appliquer les mesures adéquates. Pour nous, le meilleur moyen d’éviter la judiciarisation des rapports entre les clients et les banques, c’est le respect des textes.

Vous avez activement milité pour l’installation d’une action de groupe en France qui devrait être prochainement votée. Est-ce une victoire pour vous ?

Oui, car cela va servir à assainir certaines pratiques douteuses à l’encontre des consommateurs. Il est évident que le consommateur hésite à agir lorsque le litige concerne des petites sommes. La mutualisation des litiges lui donnera plus de moyens d’action face aux banques.


1 Directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. 2 Loi de séparation et de régulation des activités bancaires, n° 2013-672, 26 juillet 2013.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº763
Notes :
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1 Directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.
2 Loi de séparation et de régulation des activités bancaires, n° 2013-672, 26 juillet 2013.